Plus de cinq semaines après la Guadeloupe dite continentale, la campagne sucrière est lancée ce 12 avril à Marie-Galante. L’usine de Grande Anse attend à peine 73 000 tonnes de cannes cette année, soit près de 4 % de moins qu’en 2020.
La récolte à Marie-Galante s’effectuant toujours manuellement à plus de 90 %, la coupe de la canne a démarré durant le week-end, pour permettre, ce lundi 12 avril, les premières livraisons à la sucrerie de Grande Anse, qui ouvrait sa balance à 6h, et devrait lancer le broyage mardi au plus tôt. La campagne sucrière 2021 sur la grande galette est donc enfin lancée, et devrait s’achever vers le début juillet. Les acteurs de la filière croisent les doigts pour que les conditions climatiques ne viennent pas perturber cette campagne tardive.
Un volume de cannes en recul
Selon les prévisions arrêtées lors de la commission mixte de bassin, le 23 mars, moins de 73 000 tonnes de cannes sont attendues cette année, ce qui représente une baisse de près de 4% par rapport à l’an dernier.
Ce faible tonnage s’explique notamment par le déroulement de la récolte 2020 à Marie-Galante : elle avait démarré encore plus tardivement : le 27 avril, du jamais vu… C’était en pleine sécheresse. Une météo exceptionnelle qui avait certes permis de couper sans encombre jusqu’au début août, avec de surcroît une très bonne richesse (taux moyen cumulé de 10,11). Mais la repousse des rejetons s’est trouvée elle aussi décalée par cette récolte tardive, d’autant que les pluies se sont fait attendre. Impactées également, les replantations : elles n’ont pas dépassé 200 hectares durant l’intercampagne, et sont intervenues trop tard pour que ces jeunes cannes soient récoltables cette année.
A quand les 150 000 tonnes ?
Comment faire remonter la production cannière sur l’île ? En 2013, alors que le volume livré à la sucrerie était descendu à 62 000 tonnes, un schéma de redynamisation a été mis en place, pour remotiver les planteurs. L’idée : compenser, en partie, l’absence de prime bagasse, payée depuis 2009 aux producteurs du continent, par la Centrale thermique du Moule.
Sur l’enveloppe annuelle de l’ « aide à la garantie de prix », versée par l’Etat, une aide spécifique de 600 000 € revenait ainsi aux planteurs marie-galantais, pour encourager les apports d’engrais, les replantations et la remise en culture des parcelles en friche. L’objectif était de remonter la production à au moins 150 000 tonnes à partir de 2020. Il n’a pas été atteint. Les efforts ont certes permis de dépasser les 110 000 tonnes en 2017. Mais depuis, la production cannière est en baisse constante. Les mesures d’aides spécifiques à Marie-Galante ont laissé place depuis l’an dernier à celles du plan global de relance de la production cannière, mis en oeuvre pour toute la Guadeloupe par l’interprofession Iguacanne.
Remise en état de la chaudière
Aujourd’hui, la surface cannière totale à Marie-Galante ne dépasse pas 1 700 hectares, alors que le potentiel est évalué à 2 300 hectares. L’île compte quelque 1 300 planteurs, dont 960 vendent en sucrerie (le reste alimente les distilleries). Certains agriculteurs, âgés, n’ont pas trouvé de relève ; d’autres ont abandonné.
L’état vétuste de l’usine contribue pour beaucoup à ce découragement, de même que les incertitudes sur la future centrale thermique, qui était censée alimenter la sucrerie en électricité et vapeur à partir de 2022, et fiabiliser ainsi l’outil industriel. La campagne 2020 a été ponctuée par de fréquentes pannes. Et à chaque arrêt de l’usine, les cannes déjà coupées, attendent au sol et se dessèchent. Or, le coût de la récolte manuelle pèse lourd pour les planteurs. La direction de la SRMG (Sucrerie Rhumerie de Marie-Galante), qui a investi durant l’intercampagne plus d’un million d’euros pour remettre en état sa chaudière, promet une campagne 2021 moins chaotique, avec une capacité de broyage de base de 1 200 tonnes par jour.
Promesses sur la prime bagasse
La Région, elle, s’est engagée à payer aux planteurs l’équivalent de l’intégralité de la prime bagasse, « à compter de 2021, et jusqu’à la réalisation effective et opérationnelle de la centrale de cogénération ». Engagement pris dans le relevé de décisions signé le 16 mars dernier par les élus et les dirigeants de la SRMG pour relancer ce projet de centrale, telle que prévue dans le protocole d’avril 2818. La balle est aujourd’hui dans le camp de l’Etat (qui n’est pas signataire de ce relevé de décisions du 16 mars 2021). En attendant, la rémunération bagasse, d’environ 11€ par tonne de canne, représenterait 18% de recettes supplémentaires pour les producteurs marie-galantais…