Ce mardi, c'est la Saint-Valentin, fête des amoureux. Mais ce 14 février marque aussi le 71e anniversaire d'un événement marquant et douloureux de l'histoire de la Guadeloupe, le "Massacre de la Saint-Valentin".
Un mouvement qui fait boule de neige
Tout débute en novembre 1951. Dans le nord Grande-Terre, sur les exploitations qui fournissent la canne aux usines, les ouvriers agricoles sont en ébullition. Ils réclament une meilleure rémunération et des journées de travail moins lourdes. Très rapidement les ouvriers sont rejoints par les petits planteurs qui réclament à leur tour un meilleur prix de la tonne de canne.
Et le mouvement fait boule de neige, en janvier 1952, ouvriers et cultivateurs obtiennent le soutien de fonctionnaires qui réclament également une revalorisation salariale.
Des revendications qui sont relayée par un appel à la grève générale illimitée sur toutes les exploitations agricoles. Et de fait la sauce semble prendre puisque des débrayages sont constatés non seulement dans le nord Grande-Terre, à Anse-Bertrand, mais également à Capesterre ou à Sainte-Rose.
Les Mouliens constituent le fer de lance du mouvement. En prévision de tout débordement et pour sans doute impressionner les meneurs, le 11 février 1952, les CRS, se positionnent dans la Ville du Moule. Comme bien souvent dans ce cas, de part et d’autre, on se regarde en chien de faïence…
Jusqu’au 14 février, quand un barrage est monté à l’entrée du Boulevard Rougé. L’objectif de ceux qui le tiennent est d’empêcher l’accès de l’usine Gardel aux charrettes qui transportent la canne.
L’ordre est donné au CRS de lever l’obstacle…
Et tout se précipite. On ignore toujours dans quelles circonstances exactes les CRS ouvrent le feu.
4 personnes tombent touchées : 3 hommes et 1 femme. 14 autres personnes sont blessées à des degrés divers. Certains n’étaient que de simples passants.
Ces évènements sont restés dans la mémoire sous le nom de "Massacre de la Saint-Valentin".
Chaque année, à l’initiative du LKP (Lyannaj kont pwofitasyon), une cérémonie du souvenir se déroule devant le cimetière de la commune du Moule, en hommage aux victimes de cette tragédie.
Une stèle en hommage aux victimes a été érigée non loin du lieu de ce drame.
Une version officielle contestée
Le Ministre de l’Intérieur de l’époque Charles Brune publiait un communiqué, quelques jours après le drame, pour justifier le recours aux armes. Selon lui, les forces de l’ordre avaient été attaquées et se trouvaient en état de légitime défense.
Version très largement contestée par les travaux de recherche que les historiens ont pu mener sur ces événements, parmi lesquels René Bélénus.
La volonté de revanche des forces de l’ordre malmenées, quelques jours auparavant à Morne-à-l’Eau, où des premiers affrontements entre ouvriers et CRS avaient eu lieu, et la préméditation apparaissent probables à la lecture de documents de l'époque.
En 1998, Laurent Berville, conseiller municipal du Moule à l'époque des faits, témoignait, à l'occasion du 46ème anniversaire du massacre :