Se réapproprier la fête des mères

Ce weekend c’est la fête des mères.. Et contrairement à la légende urbaine, elle n’a pas été inventée par le Maréchal Pétain car elle est dans notre calendrier depuis les années 1920. Pour le reste la fête des mères est bel et bien une fête consumériste quand elle n’est pas encore l’occasion de propagandes natalistes.

Aujourd’hui dans tous les pays où le taux de natalité décroît, on entend les gouvernements en appeler à faire des bébés pour éviter une faillite de l’économie redoutée. En France, le Rassemblement National y va franco et y ajoute du nationalisme: « mieux vaut fabriquer des travailleurs français que les importer » assumaient-ils il y a quelques semaines. La Fête des Mères serait-elle immanquablement utilisée contre les droits des femmes?

La fête des mères, on devrait se la réapproprier

En France justement, un appel à repenser la fête des mères en journée de lutte pour les droits des mères et des personnes issues de minorité de genre a été publié sur Mediapart à l’initiative de Johanna-Soraya Benamrouche, Mounia El-kotni et Eva Luna Tholance.

Elles se sont inspirées du collectif de femmes noires Sister Song aux Etats Unis qui travaille cette question depuis les années 80. Elles lient les droits des femmes, les droits sexuels et reproductifs et la justice sociale dans un concept appelé la justice reproductive. Elles défendent ainsi le droit de ne pas avoir d’enfant ou le droit à avoir des enfants et à les élever dans un environnement sain et durable.

Politiser la question des mères, instaurer une journée de lutte pour leurs droits, c’est reconnaître que de nombreuses mères mènent des combats essentiels : les mères protectrices qui luttent contre les violences faites aux enfants, celles pour la qualité de l’enseignement, ou la PMA pour toutes ou encore les conditions d’accouchement.. Politiser cette question c’est reconnaître les efforts considérables qu’implique pour une femme d’avoir un enfant dans une société inégalitaire, et particulièrement celles qui sont déjà les plus exclues, les plus discriminées, ou les plus précaires. C’est reconnaître aussi que toutes les femmes ne seront pas mères mais que la société et particulièrement l’entreprise nous en fait toutes payer le prix.

Car il y a un prix même économique au fait d’être mère…

C’est en ce sens que la Fondation des Femmes publie ce matin un rapport intitulé ”le coût d’être mère”. Les chercheuses de l’observatoire de l’émancipation économique des femmes Lucile Quillet et Lucile Peytavin font le calcul.

Dans les couples hétéro, on fait un enfant à deux mais la maternité pèse de manière disproportionnée sur les revenus des femmes. De la grossesse à la retraite, l’addition est salée, qu’on soit en couple, seule, et particulièrement si on est séparée…il ne faut pas s’étonner si elles sont si nombreuses les femmes cheffes de famille monoparentale à vivre sous le seuil de pauvreté. Faute de place en crèche 160 000 parents principalement des mères, s’arrêtent de travailler. Ce prix économique n’est en revanche jamais compensé et rarement redistribué.

Il est donc temps d’en parler et de considérer différemment les mamans. 

Anne-Cécile Mailfert Présidente de la Fondation des Femmes