Soupçons présumés de favoritisme : un an de prison avec sursis requis contre l'ancienne directrice du MACTe

Laurelle Rinçon, ancienne directrice du Memorial ACTe au tribunal de Pointe-à-Pitre, 23 janvier 2024
Laurella Rinçon est entendue depuis ce matin (mardi 23 janvier ) au tribunal correctionnel de Pointe-à-Pitre pour des soupçons présumés de favoritisme au sein du Mémorial ACTe. Il lui est reproché des faits d’atteinte au Codes des marchés publics entre 2019 et 2022. L’ancienne directrice a rappelé le contexte de l’établissement public.

Le ton a été donné dès le départ. "Je suis médusée d’être devant vous aujourd’hui". C’est par ces mots que Laurella Rinçon a débuté l’audience.
L’ancienne directrice du MACTe est renvoyée devant le tribunal correctionnel pour des faits de favoritisme. Il lui est reproché d’avoir poursuivi des marchés au Centre caribéen d'expressions et de mémoire de la Traite et de l'Esclavage, sans passer par une commission d’appel d’offres, notamment pour des entreprises de sécurité ou encore de nettoyage.

Depuis le début de cette affaire, elle ne s'était jamais exprimée. Elle sort de son silence pour la première fois.

A un moment, il faut parler. Les Guadeloupéens ont assisté pendant trois ans à, d’abord une espèce de harcèlement politique et institutionnel qui s’est très vite transformé en acharnement, puis en persécution jusqu’à aujourd’hui. A-t-on jamais vu directeur de musée traduit devant une chambre correctionnelle. Et, moi je pense que c’est un triste jour pour la Guadeloupe. Ce jour où on peut arriver à cette situation là, où un conservateur du patrimoine guadeloupéen, directeur de musée, qui a mis tout en œuvre pour faire son travail dans des conditions entravées, extrêmement difficiles, se retrouve poussé jusqu’à une situation qui est créée de destruction personnelle, de destruction professionnelle...

Laurella Rinçon, ancienne directeur du Mémorial ACTe

Lors de sa plaidoirie, son avocate Me Fontaine a pointé du doigt l’ingérence du conseil d’administration du MACTe. La défense a appelé à la relaxe et à la nullité de la procédure.

Il y a une procédure qui effectivement a été extrêmement partiale puisque, comme je l’ai décrit, l’enquêteur en charge de l’enquête au sujet de Madame Rinçon a aujourd’hui été recruté par la personne qui a fait le signalement article 40 à l’écart de Madame Rinçon. Donc, tout au long de l’enquête, il était en processus de recrutement. Donc effectivement, ça démontre une partialité de l’enquêteur qui s’illustre également par le fait que l’enquête a été bâclée. Ce n’est pas les bonnes personnes qui ont été auditionnées. On a auditionné uniquement des personnes qui ont témoigné à charge et tout cela démontre qu'il y a une partialité dans l’enquêteur et donc cette procédure doit être annulée.

Maître Margot Fontaine, avocate de Laurella Rinçon

Les débats ont été menés durant plus de quatre heures, tambour battant par le président. Dans un échange sur les faits, Laurella Rinçon a déclaré que ses "compétences ne sont pas de répondre aux marchés publics. C’était ça, où on fermait le MACTe. Réponse cinglant du président : "si le MACTe, établissement public n’est pas capable de respecter le code des marchés publics, alors oui, on ferme le MACTe.

Me Diallo, représentant le Mémorial ACTe, n'a pas hésité à qualifier cette affaire de gâchis. Pour ensuite dénoncer la victimisation de Laurella Rinçon et le prétendu complot dont elle serait victime.

Simplement, les règles de la commande publique n’ont pas été respectées. C’est un gâchis parce qu'elle faisait la fierté de la Guadeloupe. Et je peux vous dire, d’un peu plus que la Guadeloupe. On va en Afrique... On va en Martinique... On va en Guyane... Elle faisait la fierté de tout ce peuple, en fait, qui à ce devoir de mémoire et qui est fier de ce Mémorial ACTe en ce qu’il représente par rapport à l’Histoire. Donc oui, c’est une déception.

Maître Babacar Diallo, avocat du MACTe

Dans cette affaire, le procureur a requis contre Laurella Rinçon, un an d’emprisonnement en sursis simple, 20 000 € d’amende, deux ans d’éligibilité et l’interdiction d’exercer dans la fonction publique pendant deux ans.

Le délibéré est attendu pour le 19 mars prochain.