Qu’est-ce que le 10 juin en Guyane ?

Le 10 juin, toute la Guyane commémore l’abolition de l’esclavage, prononcée en 1848. Retour sur l’histoire de ce jour historique pour la région et son identité.
Commémorer pour ne pas oublier. A bien des égards, la mémoire collective guyanaise est parsemée de souvenirs de la traite négrière. Appelé aujourd’hui « journée des libertés », le 10 juin se pose comme une date fondatrice de l’identité guyanaise.
 
Si la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen affirme dès 1789 que « les hommes naissent libres et égaux en droits », l’abolition de l’esclavage ne surviendra que près de soixante ans plus tard en Guyane.

De l'abolition au rétablissement de l'esclavage

Partagée entre la France et l’Angleterre, Saint-Domingue est la première colonie française à abolir l’esclavage, en août 1793. A la suite de ces événements, la première abolition française de l’esclavage est officiellement rédigée le 4 février 1794 en ces termes : « La Convention Nationale déclare que l’esclavage des nègres dans toutes les colonies est aboli […] Tous les hommes sans distinction de couleur, domiciliés dans les colonies sont citoyens français, et jouiront de tous les droits assurés par la constitution ».
 
Or, en dépit de cette déclaration officielle, aucun décret d’application n’est mis en place. Les propriétaires d’esclaves continuent leur exploitation. En outre, l’arrivée au pouvoir de Napoléon Bonaparte en 1799 participe au rétablissement de l’esclavage, prononcé le 20 mai 1802, ce qui engendre des mouvements de révolte dans les colonies.

Victor Schoelcher, artisan d'un monde sans esclavage

La situation évolue sous Louis-Philippe. Le monarque reconnait à tous les hommes de couleurs les droits civiques et interdit la traite, par l’intermédiaire de la loi du 4 mars 1831. Or, cette mesure n’endigue pas la traite négrière.
 
Découvrant la situation des esclaves lors d’un voyage aux Amériques en 1829, Victor Schoelcher est le grand artisan de l’abolition de l’esclavage dans les colonies française. Témoin de la traite, il milite à ses retours de voyage pour l’application de la loi interdisant l’esclavage.
 
Son action, conjuguée aux Journées révolutionnaires de 1848 mettant fin à la Monarchie, accélère l’abolition de l’esclavage. Conseillé par Schoelcher, le Ministre de la Marine François Arago fait adopter le principe de l’abolition de l’esclavage par le gouvernement provisoire le 4 mars 1848.

« Nous proclamons l’abolition de l’esclavage à la Guyane française »

Nommé Secrétaire d’Etat en charge des colonies, Schoelcher fait paraître le décret de l’abolition de l’esclavage le 27 avril 1848. Ce décret sera proclamé le samedi 10 juin 1848 en Guyane : « Citoyens, en vertu du décret de la République du 27 avril 1848, au nom du peuple français, nous proclamons l’abolition de l’esclavage à la Guyane française ».
 
A jamais, le 10 juin sonne comme une date historique dans la mémoire collective où, il y a 166 ans, le jour s’est levé sur la Guyane.