Bleu blanc rouge, le drapeau tricolore symbole de la République française est aujourd’hui l’écrin de l’exposition des Bijoux produits par la classe de 1re année de CAP. Né sous la Révolution française, de la réunion des couleurs du roi: le blanc et de la ville de Paris: le bleu et le rouge, les couleurs du drapeau français sont déclinées partout dans la salle d’exposition. Un décor en parfait accord avec le thème, «la Révolution française».
Les élèves de 1re année CAP Bijoux présentent leurs «Chefs-d'œuvre» aujourd’hui et ils ont réussi la mise en scène de leurs créations. Au centre de la pièce sur des tables drapées du drapeau tricolore, quatre «scènes» trônent sur l’exposition. Elles sont posées sur des cubes rouges et dominent les bijoux «Républicains» qui sont eux, jalousement gardés dans des vitrines.
Dans cette salle de cours reconverti en salle d’exposition, l’histoire a envahi l’espace. Toutes les surfaces portent des objets en lien avec la Révolution française. Les murs sont tapissés des esquisses de dessins qui ont abouti à ces chefs-d’œuvre. Elles côtoient les exposés faits en cours d’histoire.
C’est vraiment talentueux, c’est exceptionnel, c’est fantastique de voir que des élèves comme nous peuvent arriver à faire ce genre de chose!
Einlimati Ibrahim, élève de terminale générale.
Ici, les visiteurs manipulent les figurines couleur jaune or à l’effigie de soldats ou de badauds. Les personnages sont observés sous tous les angles et malgré ces passages de mains en mains, ils brillent de mille feux. Des élèves du lycée général sont venus en voisins.
Un groupe de trois adolescents lancés dans de grandes discutions s’arrachent les figurines des mains. "C’est assez impressionnant de voir que ce sont des élèves comme nous; c’est vrai qu’ils ont eu une autre formation que la nôtre, qui sont arrivés à ce résultat-là. Nous, vous nous donnez ça, dit-elle en prenant une figurine, on n’y arrive pas! On ne sait même pas comment ils ont fait! Ils nous ont expliqué, le processus de fabrication mais c’est pas pour autant qu’on y arrivera" s’enthousiasme Einlimati Ibrahim, élève de terminale générale.
L’admiration est la même pour cette élève du lycée générale de Chirongui qui y suit un enseignement scientifique. Le travail manuel fournit par les CAP bijoux l’impressionne énormément. "Ce sont des artistes! C’est très original, je ne m’attendais vraiment pas du tout à ça! Je trouve qu’ils ont fait un excellent travail" s’extasie la jeune fille.
Devant l’une des scènes, se tient un autre groupe de filles. Les trois copines ont les yeux rivés sur une figurine. Parmi elles, Julie. La jeune lycéenne porte de jolies boucles d’oreilles modernes: en argent et pendantes dans le cou, les créations délicates arborent de belles pierres bleues. En amatrice de jolis bijoux, Julie apprécie à sa juste valeur le travail fait sur les petits personnages de laiton. Avec ses copines, elles manipulent un soldat qui figure dans la scène de «la prise de la Bastille.» "C’est très beau, c’est très joli. On m’a dit que ce serait une journée de travail pour une figurine et deux jours pour une figurine plus élaborée. Le travail est très bien réalisé que ce soit pour les petites pièces de théâtre ou pour les explications" constate Julie.
Les explications, ce sont les élèves qui ont travaillés sur le projet; ils sont vêtus de tee-shirt jaune pour l’occasion, qui les donnent aux visiteurs. Julie a bénéficié des lumières de ses collègues. "Je leur ai demandé comment ça a été travaillé, comment ils ont réussi à atteindre leur objectif, combien de temps ça a duré parce que c’est quand même un travail monstrueux! C’est assez bien réussit quand même!" s’étonne la lycéenne.
Le travail s’est fait autour de quatre épisodes emblématiques de la Révolution Française. Le premier, et sans doute le plus connu, « La prise de la Bastille en 1789 ». Le mardi 14 juillet 1789, la prise de l’ancienne forteresse; transformée en prison, par les émeutiers marque le déclin de la monarchie absolue.
S’en suit l’épisode de «La fuite de la famille royale à Varennes en 1791». Cette scène retrace la fuite manquée des 20 et 21 juin ponctuée par l’arrestation de la famille royale sur la route de Varennes-en-Argonne dans la Meuse.
Ensuite, survient «La levée en masse de 1792». La fuite manquée de la famille royale va précipiter une guerre entre la France révolutionnaire et les monarchies qui se sentent menacées. Cette année-là, les effectifs des troupes révolutionnaires sont au plus bas. 300 000 hommes sont désignés ou tirés au sort pour les renforcer.
La dernière scène est «La mort de Louis XVI en 1793». Elle met en scène Louis-Auguste de France qui monte à la guillotine le 21 janvier 1793 sur la place de la Révolution à Paris.
Ces faits historiques ont donné vie à quatre scènes. Un travail qui s’est fait en lien avec le professeur d’histoire-géographie. "C’est un projet atypique. Le but était d’essayer de marier l’histoire; ici, l’histoire révolutionnaire en l’occurrence c’est le 230ème anniversaire de la première République, et la bijouterie. Ils sont totalement intéressés parce qu’ils aiment la pratique. C’est beaucoup plus facile que le travail écrit pour eux" explique Luc Legeard, professeur d’histoire-géographie
Bagues, bracelets et pendentifs à l'effigie de Marianne, complètent cette exposition. Ces bijoux dits «Républicains» sont fabriqués à partir de pièce de centimes de franc. "On a utilisé du laiton pour faire les pendentifs et les chevalières. Ensuite, on a serti les anneaux de pierres" explique Djannéma Toiouilou, élève de 1ere année en CAP bijouterie. "Moi mon idée, poursuit la jeune fille, ça a été de prendre une pièce de monnaie française avec la tête de la Marianne dessus. J’ai découpé le visage, ensuite, je l’ai embouti pour l’arrondir de manière à ce que ça s’ajuste pour s’adapter autour d’un doigt. Enfin, j’ai soudé le visage pour en faire une bague."
Timothey Braun est le professeur de pratique professionnel des élèves de CAP bijouterie. Il apporte des précisions sur le travail de ces apprentis. "Pour faire leurs créations, ils sont partis de documents, ils les ont stylisés et simplifiés pour en faire un objet en métal. (…) C’est un travail de conception, c’est également un travail artistique. Il faut aussi savoir que c’est un métier d’art donc on leur demande une dimension artistique avec du gout et des notions de dessin."
L’année scolaire touche à sa fin pour les CAP bijouterie. Ces chefs- d’œuvres ont été réalisés pour leur examen de passage en 2eme année. L’heure est maintenant au bilan avec Rozalinda Mchindra l'une des élèves exposant ses œuvres. "On sait faire des bracelets des pendentifs, des bagues. C’est pas grand-chose pour l’instant. On travaille les techniques modernes et anciennes. On peut très bien travailler avec une perceuse, des scies et des machines que faire de la découpe à la main… ça me plait vraiment et je compte poursuivre sur cette voie"affirme-t-il.
"Ce qui est dur en bijouterie c’est de découper le métal. Parfois les limes se cassent … il faut recommencer, deux fois, trois fois … c’est dur mais je veux en faire mon métier quand même "complète cette autre élève, déterminée à poursuivre dans la voie malgré les difficultés.
Timothey Braun l’enseignant CAP bijouterie en atelier a appris différentes techniques de travaille à ces élèves. Notamment la technique du filigrane. " A Mayotte les bijoutiers travaillent principalement cette technique à partir d’argent ou d’or. C’est une technique que nous voyons pendant la scolarité qui est de 2 ans. Mais dans le programme national, on survol beaucoup de technique. On leur apprend beaucoup de compétences différentes comme celle qu’on a vu sur cette exposition. On a vu la découpe de métal, l’ajourage de métal etc... la mise en forme à partir de plaque surtout. A Mayotte c’est beaucoup à partir de fil. C’est un travail qui est également très compliqué mais on le voit au cours de la scolarité."
Je trouve qu’il devrait quand même y avoir un peu plus de monde. C’est important quand même l’histoire pour nous et le travail investit mériterait un peu plus de visibilité.
Julie, élève de terminale au lycée général de Chirongui
"La bijouterie mahoraise est déjà très qualifiée et très belle, mais ces élèves récemment formés peuvent l’enrichir, apporter de nouvelles compétences et techniques qui sont moins utilisées dans la bijouterie mahoraise." conclut Timothey Braun l’enseignant CAP bijouterie en atelier.