La suite de notre enquête sur le Ceregmia. L’université a une ardoise de 10 millions d’euros liée à la gestion opaque des projets de centre de recherche. Une situation qui s’est construite au fil des ans. Y-a t-il eu défaillance des instances de contrôle ?
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Nos journalistes se sont interrogés sur le rôle des instances internes et externes dans le dossier du Ceregmia.
Sous ses allures paisibles le campus de schoelcher aurait-il abrité durant des années une machine à détourner les fonds publics ?10 millions d’euros de factures, c’est ce que pourrait avoir à payer aujourd’hui l’Université des Antilles. Une somme astronomique qui serait liée aux activités d’un seul de ses centres d’étude : le Ceregmia.
Durant des années, ses dirigeants Fred Célimène et Kinvi Logossah ont développé une véritable organisation pour s’affranchir des règles de gestion. Des pratiques dénoncées de longue date par plusieurs rapports.
Des alertes restées sans suite...
La première alerte c’est Jacqueline Abaul qui la lance. Elle est présidente de l’université en 1998, et déjà à l’époque elle remarque des pratiques douteuses au sein du laboratoire Ceregmia qu’elle tente de canaliser. Jacqueline Abaul tente alors de régler le problème et affirme avoir alerté son ministère de tutelle, sans succès.Depuis cette alerte, trois autres présidents d’université se sont succédés. Ils ont chacun à leur manière tenté d’encadrer le fonctionnement du laboratoire, mais pas suffisamment, selon le rapport conjoint mené par les ministères de l’Éducation et des Finances paru en 2015.
"Le président de l’UAG, tout comme ses deux prédécesseurs (…) ont contribué par leur caution (…) à conforter les pratiques du laboratoire", indique le rapport de l'Inspection Générale de l'Administration de l'Éducation Nationale et de la Recherche (IGAENR).
Une université dans l'université !
Dans les rouages universitaires, il existe des postes clef, comme celui de doyen de faculté. Le doyen a le droit de signer certaines pièces au nom du président. Éric Carpin qui jusqu’à octobre 2015 était doyen de la faculté d’économie, est visé par une plainte pour faux en écriture publique et mandat fictif.Autre poste déterminant, celui du directeur général des services. Le rapport des ministères en cite un. Celui qui a signé sans l’accord de la présidente une convention d’1,2 millions, convention objet d’un épisode rocambolesque de vote puis d'annulation à l’ex Conseil Régional en 2015.
Mais la pièce maîtresse du dispositif, c’est le poste d’agent comptable de l’établissement. La mission d’inspection des ministères consacre un rapport entier à celle qui occupait ce poste à l’époque. C’est elle qui accorde des facilités très particulières au Céregmia pour ses montages financiers.
"L’agent comptable, avant son départ a détruit tous les dossiers papier de son bureau (…) Elle a également fait enlever par le service informatique le disque dur de son PC professionnel." selon le rapport de l'IGAENR).
Quid du rôle des institutions extérieures ?
Le Conseil Régional de Guadeloupe et la commission interministérielle des contrôles ont certifié 2,5 millions d'euros qu’ils réclament aujourd’hui. La préfecture de Martinique, près de 2 millions, qu’elle réclame elle aussi.Les services de la Région Guadeloupe estiment avoir certifié les dépenses dans les règles de l’art. Quant à la préfecture elle n’a pas répondu à nos demandes d’interview. Nous ne saurons donc pas pourquoi un mois après une nouvelle alerte de la Cour des Comptes, les services de l’État ont tout de même nommé le Ceregmia comme référent du fonds social européen en Martinique...