Chlordécone : la France à deux vitesses a de beaux jours devant elle

Bananeraie au Lamentin
La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a rejeté, mercredi 23 janvier 2019, la proposition de loi de la députée socialiste de Guadeloupe Hélène Vainqueur-Christophe visant à indemniser les victimes de l’exposition au chlordécone et au paraquat.
 
Camouflet. Scandale dans le scandale. Cynisme. Insulte. Indifférence à la souffrance. Les mots ne manquent pas pour qualifier l’incompréhensible décision politique de la majorité présidentielle. Ses députés membres de la commission des affaires sociales refusent d’ouvrir un droit à l’indemnisation des victimes de la pollution au chlordécone.

La commission renvoie la réponse définitive du Parlement à l’adoption prochaine d’une loi plus large, portant sur l’indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques. Il s’agit pour les députés macronistes d’englober toutes les victimes dans toute la France de l’utilisation de tous les produits chimiques toxiques utilisés pour l’agriculture et le jardinage.

Une décision symbolique incompréhensible

Le risque de la dilution de l’empoisonnement spécifique aux Antilles est réel. Le risque pour les députés de s’exposer au lobby de l’industrie pharmaceutique qui a ses entrées au Parlement est évident. Rien n’indique que la future loi sera contraignante ou satisfaisante.

Cette décision est un second coup de canif donné au discours du chef de l’Etat prononcé le 27 septembre dernier à la résidence préfectorale de Martinique. « L’État doit prendre sa part de responsabilité » dans « ce scandale environnemental » disait-il alors.

Le premier coup de canif avait été donné par la même majorité lors du vote du budget. Elle avait refusé d’augmenter l’enveloppe consacrée à la dépollution de 1 à 2 millions d’euros. Le Plan Chlordécone reste donc dramatiquement insuffisamment financé.

Même s’il faut des dossiers solides pour demander une indemnisation ; même s’il faut prouver que l’on est malade à cause de ce pesticide, il n’empêche : ce vote des députés de La République en marche n’honore pas la République. Pour le coup, elle fait marche arrière, en créant une nouvelle forme de discrimination, en validant une forme d’indifférence envers certains citoyens. Décidément, la France à deux vitesses a encore de beaux jours devant elle.