Esclavage en Martinique : Pierre-Marie Pory-Papy, engagé pour la liberté en 1848 à Saint-Pierre

L'avocat Pierre-Marie Pory-Papy a été un homme politique de premier plan en Martinique.
L'abolition de l'esclavage a 175 ans ce lundi 22 mai 2023. L'occasion de rappeler que Pierre-Marie Pory-Papy a été un artisan essentiel de l’abolition de l’esclavage à Saint-Pierre, ville dont il était adjoint au maire, chargé de la police en mai 1848. Ce républicain s'est éteint en 1874 à Versailles.

C’est à Saint-Pierre que voit le jour Pierre-Marie Pory-Papy, le 3 mai 1805. Lycée à Aix-en-Provence, études de droit à Paris, inscrit au barreau de sa ville natale, il est le premier homme de couleur à exercer cette profession. Sa mère est esclave quand elle le met au monde, avant d’être affranchie. Son père est un mulâtre, proche de Cyrille Bissette, l’un des plus fervents abolitionnistes martiniquais, banni à Paris.

En faveur de l’égalité des droits 

Influencé par son père, militant abolitionniste, le jeune Pory se distingue par son engagement en faveur de l’égalité des droits entre libres de couleurs et Blancs. Républicain, il devient en début mai 1848, le jour de ses 43 ans, adjoint au maire de la ville chargé de la police. Lorsque l’insurrection finale des esclaves et des marrons éclate, dans la dernière semaine du mois, Pory-Papy ordonne la libération de Romain, emprisonné pour avoir refusé de cesser de jouer du tambour lors d’une journée de travail.

La population de Saint-Pierre et du Prêcheur se mobilise pour exiger la libération de Romain. Une foule impressionnante proteste devant la prison. Pory-Papy ordonne sa libération. Le maire, le béké Hervé, le désapprouve. Il convoque un conseil municipal pour blâmer son adjoint. L’hôtel de ville est cerné par ceux qui acclament et protègent celui qui a osé protester contre le sort injuste fait à un frère de misère.

Abolition votée à Saint-Pierre

Loin d’être désavoué, Pory-Papy est acclamé par ses collègues. Il défend sa décision comme devant un tribunal. Les élus votent l’abolition de l'esclavage dans Saint-Pierre, tombée aux mains des insurgés. La révolte se propage dans toute l’île. Pory-Papy se rend auprès du gouverneur par intérim, fraîchement arrivé de Fort-de-France, inquiet par la tournure que prennent les événements.

L’élu républicain parvient à persuader le gouverneur, un militaire comme de coutume, qu’il est dans l’intérêt de tous de prendre une mesure d’apaisement. L’embrasement général menace. Il se trouve que la nouvelle de la proclamation de la République et la mise en place d’un gouvernement provisoire est arrivée dans l’île depuis fin mars, un mois plus tard. Lequel a en projet l’interdiction de l’esclavage dans les colonies.

Républicain à l’engagement constant

Hostile à l’abolition, le maire de Saint-Pierre démissionne. Pory-Papy le remplace le 24 mai. Quatre mois plus tard, le 30 août, il est élu représentant du peuple à l’Assemblée nationale constituante. Ses colistiers républicains sont Cyrille Bissette et Victor Schoelcher. La Constitution adoptée, la chambre est dissoute puis renouvelée. Le tandem formé par Pory-Papy et Schoelcher est battu par l’alliance de son ancien ami Bissette avec le béké Auguste Pécoul.

Républicain à l’engagement constant, il revient à la Chambre des députés en 1871. Trois ans plus tard, il s’éteint à Versailles durant la session parlementaire.

Il est temps que Pierre-Marie Pory-Papy, artisan essentiel de l’abolition de l’esclavage, sorte de l’oubli dans lequel il est tombé ces dernières décennies.