Les revendications des victimes de l’agriculture productiviste sont de plus en plus entendues par le corps social grâce à l’action du Collectif des ouvriers et ouvrières empoisonnés par les pesticides. La journée de mobilisation du samedi 27 mars 2021 en a été une belle illustration.
Transformer le pays et la société. Voilà le fond du discours du Collectif des ouvriers et ouvrières empoisonnés par les pesticides, le COEPP. En deux mots : arrêter d’utiliser les pesticides et tourner le dos à la course effrénée au profit à tout prix. Une profession de foi ? Mieux, une philosophie. Elle est certes minoritaire aujourd’hui, mais elle a tendance à s’instiller partout sur la planète.
Les principaux axes de réflexion et d’action des partisans de l’écologie politique sont désormais bien connus : placer l’humain au centre des rapports sociaux de production, apprendre à vivre différemment - ce qui passe par s’alimenter avec des denrées saines - payer le juste prix aux agriculteurs, se soucier de l’impact de la production de richesses sur l’environnement pour les générations actuelles et futures.
Cette dynamique prend corps progressivement sur tous les continents. Les citoyens les plus conscients et les élites dirigeantes les plus honnêtes savent que le système économique dominant atteint ses limites. Il convient d’en adopter un autre en le construisant par une large concertation entre tous les acteurs concernés par la vie sur la planète, les citoyens en premier lieu.
Une nouvelle dynamique planétaire
Les cadres de pensée que nous appliquons depuis la Révolution industrielle, voici deux siècles, sont devenus des carcans. Le paradigme occidental de l’accumulation de richesses est douloureusement vécu par ceux qui, tout en bas de la pyramide sociale, contribuent par leur corps et leur énergie vitale à enrichir sans discontinuer d’autres. Tout en haut de la hiérarchie, ils imposent leur manière de voir.
Ce temps-là est terminé, nous dit le COEEP. Il énonce des revendications d’autant plus légitimes qu’elles sont compréhensibles par tous. La première est le droit à la santé pour les travailleurs de la terre, qui ont trimé durant des décennies pour se retrouver souffrant de mille maux désormais.
La seconde exigence est celle d’une retraite décente. Les organismes de protection sociale ont beau jeu d’appliquer la loi en versant des pensions symboliques aux anciens ouvriers. La loi doit-elle être forcément injuste ?
Une soif légitime de justice
Les préjudices subis du fait de l’utilisation de produits chimiques toxiques durant des décennies appellent une juste réparation. Nul ne peut le contester. Restaurer cette catégorie sociale dans sa dignité passe nécessairement par la prise en compte de ses souffrances.
Nul ne le conteste plus, même si les procédures administratives sont trop pesantes et si l’institution judiciaire déçoit. Or, les victimes de l’agriculture productiviste ne demandent qu’à être écoutées, avant d’être totalement entendues. En paraphrasant le poème de Césaire : "La justice écoute aux portes de la beauté", n’est-il pas temps d’espérer que la justice écoute aux portes de la solidarité ?