"La transition écologique n’est pas amorcée en France" selon l’Autorité environnementale. Ce collège d’experts indépendants chargés de donner leur avis sur les projets d’aménagement du territoire et sur les programmes de protection de l’environnement est sceptique. Une prochaine inversion des valeurs au sein de l’appareil d’Etat, des collectivités locales et des entreprises lui semble impossible. Le conservatisme des autorités est encore trop pesant.
Ces spécialistes estiment que la grande majorité des projets étudiés l’année dernière sous-estiment leur impact sur le climat ou la biodiversité. Paradoxe, l’urgence climatique est désormais intégrée par les porteurs de projets. Ce qui s’explique par l’obligation de respecter la législation européenne. Plus qu’une prise de conscience, c’est d’opportunisme dont il s’agit.
Par exemple, la limitation de l’utilisation des nitrates ou des pesticides. Le rapport de l’Autorité environnementale estime que " l’Etat est en train de rater des occasions d’accompagner ses agriculteurs dans la transition vers l’agro-écologie, pour une agriculture significativement moins polluante et plus résiliente face au changement climatique". Ainsi, l’interdiction du glyphosate semble impossible en France.
Opportunisme écologique
A l’inverse, une autre directive européenne est ignorée dans plusieurs régions. Elle concerne le bon état des ressources en eau. Il est obligatoire d’y parvenir en 2027 au plus tard. Or, les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux, le Sdage, de Mayotte, de Guyane, de Guadeloupe, de Martinique et de La Réunion repoussent cette limite de huit année, à 2039. Sans raison valable estime l’Autorité environnementale. Manque d’ingéniérie pour construire un dossier ? Pollutions persistantes ? Allez savoir !
De manière générale, les experts de l’Ae regrettent que les préconisations des climatologues du GIEC ne sont pas réellement prises en compte en France. Au-delà des discours visant à se donner bonne conscience, les actes sont peu significatifs.
Or, comme un contrepoint positif à ces lacunes, le gouvernement vient de publier la liste des 123 communes de France les plus menacées par l’érosion du littoral. Ce phénomène est bien connu dans notre île. Nos experts, le Pr. Pascal Saffache en tête, ne cessent d’avertir les autorités et la population que le réchauffement du climat et la présence humaine accentuent le grignotage du trait de côte.
Protéger le littoral
Au total, 27 communes sont situées outre-mer, dont 13 en Martinique. Pour être intégré à cette liste, le conseil municipal devait donner son assentiment. Le dispositif prévu par l’Etat est contraignant. Il vise à planifier des décisions lourdes de conséquences : le relogement d’une partie de la population, le déplacement de zones d’activités, la réinstallation des services publics, la réorganisation de la vie sociale, culturelle, politique, sportive d’une commune.
Un défi considérable que certaines communes se disent prêtes à assumer. C’est le cas de 7 communes du littoral atlantique : Grand'Rivière, Macouba, Basse-Pointe, Lorrain, Sainte-Marie, Trinité, Robert. Nous en comptons 6 sur le littoral caraïbe : Prêcheur, Saint-Pierre, Case-Pilote, Schœlcher, Trois-Îlets, Sainte-Luce.
Leur Plan local d’urbanisme (le PLU) devra mentionner des interdictions de construire logements, édifices publics et infrastructures pendant une période pouvant aller de 10 jusqu’à 50 ans. Toutefois, l’avantage non négligeable de l’inscription sur cette liste est que la connaissance des risques est à la portée de tous. Sauf que la connaissance des risques ne signifie absolument pas qu’ils sont pris réellement en compte, comme le sous-entend l’Autorité environnementale. La révolution écologique, ce n’est pas pour demain, mais bien pour aujourd’hui !