Le chèque-énergie étendu ponctuellement au gaz est-il un leurre ?

La préfecture a lâché du lest. Les familles aux revenus les plus faibles pourront bénéficier d’une aide de 100 euros pour l’achat de bouteilles de gaz. Une victoire à l’arraché, mais ponctuelle, loin des souhaits exprimés par la population.

Le chèque-énergie sera étendu à l’achat de gaz domestique. Une aide exceptionnelle de 100 euros sera versée à 50 000 foyers éligibles en décembre prochain. Il aura fallu un blocus de la raffinerie de la SARA et de l’usine Antilles Gaz par les transporteurs de ces précieuses bouteilles pour obtenir ce résultat. La demande adressée le 4 octobre 2021 par le président du conseil exécutif au Premier ministre n’y est pas étrangère.

A l’orée de la campagne présidentielle, le gouvernement ne veut surtout pas être taxé de proroger une quelconque discrimination à l’encontre de l’outre-mer. Au-delà de cette querelle sur le prix de l’énergie, l’égalité des consommateurs français n’est pas encore acquise. Or, le Premier ministre a instauré un moratoire sur le prix du gaz en oubliant les habitants des territoires périphériques. Il n’y a rien d’étonnant à cet oubli.

C’est la même logique qui prévaut pour l’application poussive de la loi pour l’égalité réelle en outre-mer. Adoptée à l’unanimité par les députés et les sénateurs en février 2017, elle vise à renforcer le soutien à l’économie locale, à garantir les droits des citoyens de nos territoires et à lutter contre la vie chère. Dans cet esprit, des contrats ont été signés entre l’Etat, les collectivités locales et les établissements publics pour planifier les investissements nécessaires sur dix à vingt ans.

Des discriminations persistantes

 

Pour le reste, les choses bougent lentement. Souhaitée par le président socialiste François Hollande, l’élimination des inégalités de traitement dont sont victimes les 2,7 millions d’habitants des 11 collectivités d’outre-mer tarde singulièrement. Deux ans après, en mars 2019, un rapport remis par les députées Cécile Rilhac, de La République en marche, Maud Petit, du Modem et d’ascendance martiniquaise, et Josette Manin de Martinique concluait que ces discriminations ne sont pas suffisamment combattues.

Parmi les 44 propositions avancées par les trois députées, la réduction des inégalités persistantes "dans l'accès au droit, à l'éducation, à la santé". Non sans omettre les écarts significatifs de développement économique et social. Manifestement, la force d’inertie de l’administration est plus forte que la volonté politique.

Vers l’égalité des droits des consommateurs ?

 

Quel est le rapport entre l’égalité réelle et la fixation, en outre-mer, de prix administrés du gaz, des carburants, de l’électricité, du ciment, de la farine, des transports, des télécommunications ? Simplement le fait que le contrat économique entre les consommateurs et les fournisseurs de services et de produits stratégiques varie selon son lieu de résidence. Nous ne sommes pas servis de la même façon si nous vivons à Bordeaux ou à Macouba, à Strasbourg ou à Kourou, à Marseille ou Basse-Terre.

Il est évident que les candidats à l’élection présidentielle mettront en bonne place dans leur programme l’abolition des inégalités de traitement entre habitants de l’hexagone et habitants de l’outre-mer. Avec pas moins de 1,5 million d’inscrits sur les 46 millions composant le corps électoral, il serait étonnant que les prétendants à l’Elysée ne montrent pas qu’ils s’engagent réellement contre la fin des discriminations d’une autre époque.

Nos politiques vont sûrement les y aider. La CTM s’est dit prête à poursuivre avec les partenaires concernés la démarche de co-construction pour établir un chèque-énergie pérenne.