Le fait majeur de cette élection législative c’est la défaite d’Alfred Marie-Jeanne face à son ex-poulain, Jean-Philippe Nilor dans la circonscription du sud. Le leader du MIM (Mouvement Indépendantiste Martiniquais) qui était pourtant très confiant après s’être déclaré candidat plusieurs mois auparavant, a commencé à sentir le vent tourné dès le premier tour, lorsque le parlementaire sortant l’a devancé.
Certes, la faible participation du 11 juin dernier pouvait laisser espérer un sursaut de l’électorat marijeanniste, fidèle aux urnes durant les vingt années où l’ancien maire de Rivière-Pilote a siégé au Palais Bourbon à Paris, mais cette fois était visiblement celle de trop. Le verdict du second tour est sans appel pour le patron des patriotes qui, en 2021 avait déjà perdu la présidence du conseil exécutif de la CTM face à Serge Letchimy.
5 échecs cumulés pour les patriotes du GSPM
Alfred Marie-Jeanne quitte donc définitivement l’arène politique sur deux défaites consécutives, auxquelles il faut ajouter les batailles perdues des 3 autres candidats à la députation. Il s’agit de Francis Carole, de Justin Pamphile et de Philippe Edmond-Mariette du GSPM (Gran Sanblé Pou Matinik).
Je reste, pour ma part, un militant déterminé. Je poursuivrai la défense des intérêts de mon pays, avec honneur et fierté, jik bout (jusqu’au bout).
Alfred Marie-Jeanne – extrait d’un communiqué du 18 juin 2022
Qui prendra le flambeau au MIM ?
Désormais, la question de la succession d’Alfred Marie-Jeanne à la tête du Mouvement Indépendantiste Martiniquais se pose clairement, même si l’intéressé entend rester "un militant déterminé", sous-entendu, la barre est libre. Evidemment, on risque d’assister à une bataille de futurs "chefs" parmi les 3 autres candidats malheureux qui y pensent depuis un certain temps forcément et les autres affidés tels que Daniel Marie-Sainte ou Lucien Adenet, deux des plus fidèles du mouvement.
Et puis il y a Louis Boutrin qui se voit sans doute lui aussi aux commandes, après s’être rapproché un peu plus du leader, depuis l’émancipation de Jean-Philippe Nilor. Fort de sa large victoire du second tour, le fils spirituel déchu qui co-préside le groupe "Péyi-A" avec le maire du Prêcheur, Marcelin Nadeau, autre souverainiste convaincu qui a été élu à l’Assemblée nationale, avec le soutien de plusieurs organisations et collègues.
"Péyi-A", fossoyeur du MIM ?
Dans le sillage des deux hommes, il y a le jeune avocat Jiovanny William (37 ans) qui représente désormais le centre atlantique, sans étiquette pour l’instant, mais ostensiblement investi par "Péyi-A", avec l’appui d’un certain nombre d’édiles, dont Aurélie Nélla élue en 2020 à Ducos, sous la bannière du nouveau parti bicéphale.
Les 3 représentants de la récente formation ont souvent mis en avant durant la campagne, "une nouvelle manière de faire de la politique". Mais en coulisse, ils caressent probablement une arrière-pensée, celle de tourner la page du MIM, en devenant la première force patriotique de l’île, avec des têtes et des ambitions nouvelles.
Au vu de cette carte politique métamorphosée, on devine que les dissidents du parti d’Alfred Marie-Jeanne qui ont quitté le navire depuis 2016, sont en train de se réjouir, en attendant peut-être de rejoindre "Péyi-A".
Au soir de leur élection respective, Jean-Philippe Nilor, Marcelin Nadeau et Jiovanny William ont aussi manifesté le souhait de parler d’une même voix avec Johnny Hajjar. L’élu de Fort-de-France, a bien reçu le message de rassemblement pour défendre les intérêts supérieurs de la Martinique en particulier.
Cette manière de procéder contrastera à coup sûr avec les mandatures précédentes, lorsque Alfred Marie-Jeanne était en opposition frontale à Paris avec Serge Letchimy, alors député de la 3e circonscription.
Autre temps, autre approche, mais aussi autre époque, celle où la droite et la gauche classiques sont totalement absentes de l’échiquier local au lendemain de ces législatives.
Les électeurs habituels de ces deux partis de gouvernement en déroute, composent probablement une grande partie des 75% d’abstentionnistes martiniquais, signe en tous cas, que la vitalité démocratique est en berne en Martinique.