Manmay Matinik, annou palé kréyòl tou lé jou

Cours de créole à l'école de Sarrault au Lamentin
Le Mois du créole en octobre a été lancé par la Collectivité Territoriale de Martinique. Une kyrielle de rendez-vous sont proposés durant ces prochaines semaines pour toucher du doigt la vitalité et la fragilité de notre langue vernaculaire.

Parler, écrire et vivre la langue créole, voilà un sacré défi que nous sommes tous appelés à relever en octobre, mois du créole. La Collectivité Territoriale de Martinique propose un programme éclectique pour aborder plusieurs dimensions permettant de toucher du doigt la vivacité de notre langue vernaculaire. Et aussi de mesurer les menaces de dilution ou de disparition qui pèsent sur elle, si nous ne la défendons pas.

Il convient de noter le formidable saut qualitatif accompli depuis la gouvernance précédente, sous la présidence d’Alfred Marie-Jeanne, qui avait instauré, elle aussi, un mois entier dédié à la mise en valeur de notre idiome natal. Ce qui permet d’aller plus loin que la seule journée internationale du 28 octobre. Le temps est désormais révolu des cris d’orfraie et des sarcasmes à l’encontre de nos linguistes qui osaient prétendre, et démontrer, que le créole est une langue comme toute autre, avec une grammaire et un vocabulaire. L’obscurantisme culturel, appartient bel et bien au passé.

De réels progrès accomplis ces dernières années

Preuve en est, le rectorat de l’académie voit d’un très bon œil la décision prise par les élus de l’Assemblée de Martinique de lancer un appel à projets doté de 90 000 euros destiné à récompenser les éditeurs retenus pour la production de manuels scolaires imprimés et numériques pour faciliter l’apprentissage de la langue dans les écoles et collèges.

Preuve en est, le créole a été élevé au statut de langue co-officielle aux côtés du français par la CTM en mai 2023. Une décision ayant suscité des critiques justifiées sur les modalités et le calendrier de cette décision, ni consensuelle, ni pédagogique, soit dit en passant.

Il reste à la CTM à montrer l’exemple en traduisant ses documents officiels et ses débats publics en créole.

Comme en Corse, qui sert de modèle à nos gouvernants. Il reste aussi à donner aux experts les moyens de densifier leurs efforts pour qu’ils proposent à toute la population des lexiques à utiliser dans tous les domaines, à commencer par tous les échelons des collectivités publiques, de la commune à l’État.

Jury du concours d'éloquence en français et en créole, promotion 2019.

Donner au créole tous les attributs d’une langue d’avenir

À ce jour, un vocabulaire original n’est employé que dans de trop rares secteurs : l’agriculture, la pêche et la mer, le football, la musique, du bèlè au zouk en passant par la biguine. Il n’existe pas de méthode de parler et d’écrire pour la presse, par exemple, alors que les médias sont au cœur de notre vie sociale.

Comme quoi, le travail est loin d’être terminé pour renforcer l’usage et la vitalité du créole.

En Haïti, aux Seychelles et à Maurice, d’immenses progrès ont été accomplis en ce sens, au point que la langue vernaculaire est réellement traitée sur le même plan que le français ou l’anglais. L'un des moyens utilisés pour ce résultat est la généralisation de l'écriture en langue créole. Une pratique largement répandue dans l'administration, le système éducatif et la presse de ces pays.

Pourquoi ne pas s’en inspirer ? En attendant, pour fortifier notre langue, n’oublions pas de la parler et de l'écrire tous les jours. Kidonk, manmay, annou palé épi matjé kréyol tou lé jou !