Philippe Martiny, l’animateur de konpa, de retour en Martinique après 4 ans à Haïti

A gauche: Philippe Martiny avec son beau-frère, Maxo Juste à Sainte-Marie.
Empêché de quitter Haïti à cause de la violence et l’insécurité, l’animateur de radio Philippe Martiny, a pu retrouver la Martinique après quatre années d’absence.

Le 13 février 2020, Philippe "zouk konpa" Martiny, connu à la Martinique et en Haïti pour son implication dans la promotion du konpa, la musique populaire haïtienne, quitte son île en direction de Port-au-Prince. Il avait prévu de passer un mois avec ses amis, dont des artistes haïtiens à la Martinique.  

Sa visite d’un mois s’est prolongée de quatre ans.

Il s’était rendu dans la ville d’Arcahaie pour visiter le siège de l'Independence d'Haïti.

Il y est resté bloqué pendant plus de trois ans.

La pandémie, la violence des gangs et l’assassinat du Président Jovenel Moïse ont fait qu’il ne pouvait plus rentrer.

Quand les gars ont commencé à kidnapper les gens, à brûler les prisons et à tirer sur les gens dans les rues, j’ai compris que c’était grave. J’ai été frappé. On a pointé un fusil sur ma tête.

Philippe Martiny

Il a loué une chambre à Arcahaie. La nuit, il fallait éteindre la lumière et ne faire aucun bruit. Il avait peur de dormir. "Les gangs aimaient brûler les maisons avec les occupants pendant la nuit", raconte-t-il.

Philippe Martiny dormait une heure par nuit. Chaque bruit le terrorisait. Il se couchait avec ses chaussures à ses pieds, prêt à fuir en cas d’urgence.

Il mangeait une fois par jour. Son repas, préparé sur un tesson, était composé de riz, d’un pilon de poulet, bien nettoyé avec du vinaigre et de jus d’orange sur.

On ne pouvait pas boire de l’eau. Même pour se doucher ça grattait le corps et on avait des boutons et des plaques.

Philippe Martiny

Il achetait de l’eau à boire dans des sachets en plastique.

Il voyait les gangs assassiner les Haïtiens dans des actes de barbarie. Les femmes enceintes étaient tuées par les chefs de gangs dont certains n’avaient que 14 ans.

La ville d'Arcahaie en Haïti.

L'évacuation des Français 

Fin mars 2024, la France a évacué ses ressortissants en Haïti. Bloqué à Arcahaie, Philippe Martiny n’a pas pu partir.

À la Martinique, dans sa commune natale de Sainte-Marie, sa famille était inquiète. 

On ne savait pas si on allait le revoir un jour. Ce n’était pas évident du tout. 

Maxo Juste, beau-frère de Philippe Martiny

C’est seulement le 15 juillet, 2024 qu’il a pu quitter Arcahaie en direction de Port-au-Prince.

Il est parti à 5h, accompagné d’un ami, un proche des gangs. Sur la route, il a payé l’équivalent de 100 euros pour passer 3 checkpoints contrôlés par des hommes lourdement armés.

Avant de prendre son avion, il s’est rendu à l’Ambassade de France. Il avait besoin d’un laissez-passer pour voyager. Son passeport était périmé.

Son fils et ses amis de la Martinique ont cotisé pour payer son billet d’avion.

Philippe Martiny devant l'église de Sainte-Marie.

Il est passé par la République-Dominicaine et Paris avant d’atterrir à la Martinique le 16 juillet 2024.

Les premiers jours étaient vraiment durs. Je ne croyais pas que j’étais dans mon lit. Je pense que je suis toujours là-bas. J’ai vu tellement de choses. Ça m’a changé.

Philippe Martiny

Philippe Martiny retrouve sa collection de 3000 albums.

Âgé de 67 ans, Philippe Martiny compte entamer d’autres voyages. Haïti n’est plus sur son itinéraire.