Samedi 2 septembre alors que le festival Sanaa bat son plein, "c'est le chaos à Mamoudzou". "Ce sont les SMS que j'ai reçus par des amis" annonce Me Yanis Souhaïli, avocat de la défense. À Doujani, vers 23h, un motard se retrouve "face à des clôtures, j'ai pris un impact sur le casque" avant d'annoncer avoir vu arriver sur lui 15 à 20 personnes.
Il décide de faire usage de son arme, rangée dans son jean. Un Glock dont il a une autorisation de détention pour pratiquer le tir sportif en petite terre mais pas d'autorisation de port d'arme. "Je sors toujours avec une arme, c'est pour ma sécurité, le contexte de Mayotte étant anxiogène, je préfère être armé." même si c'est interdit par la loi.
Il fait usage de son arme à feu "pour sauver ma vie"
Il fait donc usage de son arme à feu une dizaine de fois. "J'ai tiré en l'air puis face au sol. J'ai essayé de sauver ma vie, il était hors de question que je reste là, à me faire lyncher." Puis il est rentré chez lui, après avoir détroussé sur la route de son domicile, se faisant voler son téléphone.
Dans la presse, il apprend qu'il a blessé deux individus. Un à la fesse, un mineur de 16 ans, et un autre à la main. Le premier est connu des services de police pour port d'arme, son casier judiciaire est vierge. Le second a un casier judiciaire conséquent où figurent des vols avec armes, des faits de violences aggravées ou encore d'entrave à la circulation sur la voie publique.
Une victime en fuite et inscrite au fichier des personnes recherchées
Âgé de 18 ans, il est également inscrit au fichier des personnes recherchées, jugé comme dangereux, armé et violent. Admis au CHM, il prendra la fuite contrairement à la deuxième personne, blessée à la fesse. Ce dernier dira aux policiers qu'il "était à un manzaraka quand un blanc en scooter tiré en roulant". "Les manzarakas, ça ne va pas jusqu'à 23h" notera l'avocat de la défense remettant en cause la véracité des propos de la victime qui annonce sur procès-verbal avoir été blessée à un endroit différent de celui où l'homme de 50 ans a tiré.
Ce dernier, lui, se rend à la police avouant être l'auteur des coups de feu. Placé en garde à vue, dans un premier temps, pour tentative d'assassinat, il est finalement poursuivi pour violences avec arme. Il est placé en détention provisoire, ce jeudi, "par peur de représailles sur sa personne" dira son avocat avant son procès en comparution immédiate, ce vendredi.
"Mayotte, ce n'est pas le far-west"
Pour le parquet, la légitime défense n'est pas à retenir. "Les services du procureur considèrent que Mayotte, ce n'est pas le far-west" soulignera d'ailleurs la substitut du procureur. Elle demande une peine de 30 mois de prison dont 18 mois avec sursis sans mandat de dépôt ainsi qu'une confiscation de l'ensemble de ses armes et d'une interdiction de 10 à 15 ans de détention de port d'arme. Son avocat clame la légitime défense et demande la relaxe.
Le tribunal va suivre les réquisitions du parquet, condamnant l'auteur des coups de feu à une peine de 30 mois de prison dont 18 avec sursis sans mandat de dépôt puisqu'il devra porter un bracelet électronique pendant un an. "On va se laisser le temps de faire appel" annonce son avocat.
L'audience a également remis sur le devant de la scène le contexte mahorais. Faut-il ou non, le prendre en compte lors des procès ? "il faut se rendre à l'évidence" dira par exemple, Virginie Bénech, la vice-présidente du tribunal judiciaire "s’il y a des ballades à faire à moto, c'est en métropole." en réponse à l'accusé qui a déclaré pendant l'audience avoir profité de sa soirée pour sortir à moto. Réponse de Maître Yanis Souhaïli, avocat de la défense dans sa plaidoirie. " Quel message donne-t-on aux habitants de Mayotte, à partir de 20h, c'est couvre-feu, on laisse les coupeurs de route faire la loi. Ne sortez pas de chez vous, si c'est le cas, si vous êtes agressés, c'est la fatalité ?"