"Les effets de la crise sanitaire sur l’emploi ont été plus que résorbés en 2022." C'est le constat, positif, que dresse l'Isee dans son enquête sur les forces de travail, présentée jeudi 3 août à Nouméa.
NC la 1ère détaille.
1 Les créations d'emploi ont relancé le marché du travail
Si on développe, "entre 2020 et 2022, le nombre de personnes en emploi a nettement rebondi : quatre mille personnes ont rejoint le marché du travail en tant qu’actifs occupés. Cette hausse permet de dépasser le niveau d’emploi de 2019, puisqu’elle excède de beaucoup la perte de 2 900 emplois intervenue au début de la crise sanitaire, entre 2019 et 2020. C’est ainsi qu’un millier de nouveaux emplois ont été créés par rapport à 2019."
Les emplois perdus durant la crise ont été récupérés, donc. Or, en parallèle, il y a plus de monde qui aimerait trouver un emploi. "La bonne tenue du marché du travail en 2022 semble avoir incité de nouveaux entrants à vouloir travailler", analyse l'enquête.
2 Plus de personnes souhaiteraient travailler
Le vivier de main d’oeuvre l'an dernier a été estimé à 22 400 personnes. Parmi elles, 60 % étaient des chômeurs selon la définition qu'en donne le bureau international du Travail (rechercher activement un emploi et être disponible dans les quinze jours pour l’occuper). "Essentiellement des jeunes et des personnes sans qualification". Les 40 % restants relevaient de ce qu'on appelle le halo autour du chômage - des gens qui ne remplissaient pas tous les critères retenus par le BIT pour être comptabilisés comme des chômeurs, mais ont déclaré qu'ils voulaient travailler.
3 Un nombre de chômeurs en recul
Pour le dire autrement, en 2022, 13 400 personnes étaient au chômage au sens du BIT. Le nombre de chômeurs a reculé, entre 2020 et 2022. "Toutefois, il reste supérieur à celui de 2019 : + 400 chômeurs en 2022", relève l'Institut de la statistique et des études économiques. Même tendance pour la fameux halo: "après avoir progressé entre 2019 et 2020, le nombre de personnes dans le halo recule en 2022", lit-on. Cela dit, "la baisse ne compense que partiellement la hausse initiale et le halo totalise 800 personnes de plus qu’avant la crise sanitaire".
4 Des indicateurs qui s’améliorent
Le taux de chômage a retrouvé son niveau d'avant la période Covid. Cet indicateur mesure la proportion de chômeurs dans la population active. Il s'est établi l'an dernier à 10,9 %, après avoir grimpé à 13 % en 2020. Quasiment 11 %, c’est plus qu’en France métropolitaine (7 %) mais moins que dans la plupart des autres territoires ultramarins : il était en 2022 de 13 % en Guyane, 18 % à La Réunion, 19 % en Polynésie ou en Guadeloupe et même 35 % à Mayotte.
Le taux d’emploi, lui, représente la part de population qui a un travail comparé à la population totale. Et en Calédonie, il a progressé de 0,4 point entre 2019 et 2022. Il se montait l'an passé à 58,7%. "La hausse est moindre qu’en France métropolitaine, en Polynésie française, à La Réunion ou en Guadeloupe. Mais le taux d’emploi reste le plus élevé derrière l’Hexagone", insiste l'Isee.
5 Des emplois précaires et du temps partiel subi
En revanche, au moins 17 % de ces emplois étaient précaires, en termes de statut, de pérennité ou de durée : petit boulot (3 % des actifs occupés soit trois mille personnes), contrat d’apprentissage, CDD de moins d'un an, intérim, travail saisonnier, employé sans contrat de travail, aide familiale, ou encore titulaire d’un mandat politique ou syndical, ou responsable coutumier.
Par ailleurs, parmi les actifs occupés ayant déclaré leur temps de travail, 13 % occupaient un emploi à temps partiel. "Ce n’est pas un choix, ajoute l'Institut de la statistique : 60 % d’entre eux souhaiteraient travailler davantage. Ce sont essentiellement des personnes sans diplôme qualifiant et des jeunes."
6 Chômage : les jeunes et les non diplômés en première ligne
Dans le vivier de main d'œuvre évoqué plus haut, 45 % n'avait aucun diplôme qualifiant, et une personne sur deux avait moins de trente ans. Concernant en particulier les 13 400 chômeurs recensés en 2022, les jeunes restaient plus exposés que leurs aînés, avec un taux de chômage de 26 %, "fortement corrélé au diplôme".
7 Les écarts entre hommes et femmes demeurent
Autre enseignement de cette enquête menée par l’Isee, l'égalité professionnelle n'est pas encore au rendez-vous. Les bons résultats relevés entre 2020 et 2022 (quatre mille actifs en plus et le nombre de chômeurs qui baisse) profitent davantage aux hommes. Il est vrai qu'ils avaient subi de plein fouet les suppressions d’emploi en 2020. D'après cette enquête, "le taux d’emploi des hommes augmente plus rapidement que celui des femmes. Il s’élève à 63,3 % (+ 3,8 points par rapport à 2020), contre 54,1 % pour les femmes (+ 1 point). Pour les hommes comme pour les femmes, le taux d’emploi en 2022 est supérieur à ce qu’il était en 2019 avant la crise. Toutefois, l’écart homme-femme s’est creusé pour atteindre 9,2 points en 2022 au détriment des femmes."
La situation des femmes sur le marché du travail est assez curieuse parce que, tout en étant plus diplômées, elles se retrouvent dans des postes moins enviables que les hommes.
Olivier Fagnot, directeur de l'Isee
Leurs statuts d’activité et leurs conditions d’emploi sont moins favorables. "Bien que globalement plus diplômées que les hommes, les femmes sont moins souvent qu’eux employées sur des catégories d’emplois intermédiaires ou supérieures (15 % des femmes, contre 24 % des hommes)." En outre, elles sont plus souvent à temps partiel et dans la grande majorité des cas, c'est subi. Des femmes souvent victimes de préjugés, mais qui réussissent dans les métiers masculins quand on leur en laisse l’occasion.
8 Des différences subsistent entre Kanak et non-Kanak
En 2022, les Kanak représentaient 39 % de la population de 15 ans ou plus. Et ils accèdent de plus en plus à l’emploi "formel". Mais l'Isee fait ce constat pour 2022 : "La répartition des personnes entre chaque groupe selon leur situation d’activité révèle des divergences persistantes. 47 % des Kanak sont en emploi, contre 55 % des personnes des autres communautés. À l’inverse, les Kanak sont plus souvent au chômage ou dans le halo (15 % d’entre eux) que les autres (8 %)."
Malgré de réels progrès, "la population kanak reste globalement moins qualifiée : 49 % des 15-64 ans n’ont aucun diplôme qualifiant, contre 33 % pour les non-Kanak". Et même à qualification équivalente, des écarts persistent : "Dans l’emploi comme au chômage, la situation est plus défavorable aux Kanak qu’aux autres communautés, quel que soit le niveau de diplôme."