En Australie, les dommages causés par les lapins sont estimés à 200 millions de dollars par an

Le lapin de garenne a été introduit en 1859 en Australie pour le bon plaisir du Britannique Thomas Austin, nostalgique de ses parties de chasse.
Il a l'air mignon et inoffensif. Mais en Australie, le lapin est responsable de ravages écologiques. Les autorités ont tenté de l'éradiquer mais cela n'a souvent fait qu'aggraver les choses.

En 1859, vingt-quatre lapins de garenne débarquaient sur les côtes australiennes en provenance d'Angleterre, pour le bon plaisir du Britannique Thomas Austin, nostalgique de ses parties de chasse. Plus de 150 ans après, selon une étude parue en 2022 dans le Journal de l'Académie des sciences australienne, ils sont environ 200 millions à pulluler au pays des kangourous, dévorant la végétation, détruisant les cultures et menaçant la survie de nombreuses espèces. 

L'invasion la plus rapide connue par un mammifère dans le monde entier.

L'organisme gouvernemental australien pour la recherche scientifique (CSIRO).  

Avec jusqu'à sept portées annuelles, de cinq lapereaux en moyenne chacune, et une maturité sexuelle dès l'âge de 3-4 mois, le lapin a la faculté de s'étendre rapidement. Le climat de l'Australie ne l'a pas freiné, il s'y est adapté rapidement. Sans prédateurs, il a agrandi son territoire de 110 km par an. En soixante-dix ans, il s'est répandu sur 70% de la masse terrestre du pays, "ce qui constitue l'invasion la plus rapide connue par un mammifère dans le monde entier", relate un rapport de l'organisme gouvernemental australien pour la recherche scientifique (CSIRO).

Il contribue à la désertification

Herbes, bulbes, graines, arbustes... Aucun herbacé ne résiste à son appétit. Résultat : il contribue à la désertification de l'outback, prive de nourriture d'autres espèces et grignote les cultures. Chaque année, il causerait environ 200 millions de dollars australiens de dommages agricoles et horticoles, estime le ministère de l'Agriculture d'Australie occidentale. 

Alors depuis plus d'un siècle, le gouvernement tente par tous les moyens de régler le problème. Chasse intensive, pièges, bulldozers pour détruire les terriers, poison ou même explosifs... En 1901, une barrière de 1 800 km de long est construite dans l'espoir de freiner l'irrésistible progression de la bestiole vers les terres agricoles de l'ouest. Mais le temps de la construction, elle est déjà de l'autre côté. Les autorités insistent : plus de 3 000 km de pieux et de grillage ont finalement été posés. En vain. 

Des remèdes pires que le mal

L'Australie tente alors d'introduire des prédateurs, comme le renard. Mais le remède s'avère pire que le mal. Le goupil préfère s'attaquer à des proies plus faciles, comme les petits marsupiaux endémiques de l'île, déjà menacés d'extinction. 

Dans les années 50, la science est appelée à la rescousse. Le virus de la myxomatose, une maladie provoquant des tumeurs mortelles chez les lapins, est introduit. Ça marche. Au départ. La population passe de 600 à 100 millions. Mais l'espèce envahissante finit par développer une résistance au virus. 

Des effets jusqu'en Nouvelle-Zélande

La puce espagnole ? Elle propagera des maladies parmi les lapins. Mais aussi chez d'autres animaux. En 1995, nouvelle tentative avec un virus de fièvre hémorragique. Très efficace sur les léporidés, il est hautement contagieux et se propage rapidement via les moustiques. Il arrive d'ailleurs deux ans plus tard en Nouvelle-Zélande, elle aussi aux prises avec une invasion lapine.  

Nouvelle catastrophe : privée d'une partie de ses proies, l'hermine, prédatrice principale du lapin, elle aussi importée, se rabat sur le kiwi, oiseau endémique de l'île qui se trouve à son tour menacé. 

"Cas d'école" de ce qu'il ne faut pas faire

Pour Elaine Murphy, scientifique au département de conservation néo-zélandais, l'Australie et la Nouvelle-Zélande représentent "des cas d'école" de ce qu'il ne faut pas faire en matière d'introduction et de gestion des espèces invasives.

La population de lapins semble aujourd'hui stabilisée sous les 300 millions, mais le gouvernement australien indique "continuer les recherches" pour trouver une solution durable et moins dévastatrice.