La Présidente du syndicat de la production audiovisuelle en Polynésie française (SPAPF), Christine Tisseau-Giraudel a coordonné les états généraux de la production cinématographique des Outremers.
Son interview, ici.
Son interview, ici.
•
FIFO : Quel est l’état du milieu audiovisuel dans les Outremers ?
Aujourd’hui, il y a 1000 techniciens sur tous les territoires Outremers et 90 sociétés de productions. Ces filières se sont créées entre 2001 et 2005. Elles sont jeunes et naissantes, mais elles ont réussi à se développer malgré un environnement peu propice. Sur la Polynésie française, il y a peu de diffuseurs : la 1ère, TNTV, et parfois quelques petites chaînes. Mais, rappelons qu’il y a encore quinze ans ces filières n’existaient pas. Les diffuseurs en place n’avaient donc pas l’habitude de travailler avec nous, car nous n’étions pas là. Les choses ont évolué, mais certains ont gardé des habitudes. Quand le FIFO a été créé, il y avait zéro documentaire de la Polynésie française. Le Pays a donc commencé à se pencher sur un fond de soutien local audiovisuel. On a ainsi pu se développer, et aujourd’hui, on produit plus de 30 documentaires par an, avec 120 techniciens pour seulement 5 il y encore quinze ans. Du fait de son statut, la Polynésie, comme la Calédonie, n’avait pas accès à certaine aide. Le Pays a signé en 2013 une convention avec le CNC, le Centre National du Cinéma et de l’image animée, ce qui a permis de développer les productions, avec un fond de 35 millions par an. Forte de ces avancées, la filière s’est structurée, et les professionnels se sont professionnalisés.
FIFO : Comment le documentaire et la fiction peuvent-ils se développer sur les Outremers ?
Aujourd’hui, les 30 documentaires produits par an sont diffusés au niveau local mais aussi au niveau national et international. En dix ans, nous avons réussi à développer une très belle filière documentaire. Parallèlement à cela, on souhaite développer la filière fiction. On ne va pas opposer les deux genres, mais si nous n’avons que le documentaire, nous ne pourrons pas développer les autres filières. Au niveau local, on pousse la fiction qui a vraiment commencé à émerger l’année dernière. Et d’ailleurs, on a vu que la proportion de techniciens polynésiens était plus importante que métropolitains. Ce qui n’était jamais arrivé. On a eu un basculement. Le Pays a d’ailleurs annoncé lors de la cérémonie d’ouverture qu’il nous aidera pour cette filière. C’est important car sans une volonté politique, les producteurs ne peuvent rien faire. Les états généraux de la production Outremer ont justement servi à ça. Aujourd’hui, nos députés et sénateurs se rassemblent pour porter tous d’une même voix une parole.
FIFO : Quel est le niveau de la production locale ?
Aujourd’hui, nous avons de très bons techniciens qui ont appris par l’expérience. Ils ont le feu sacré, c’est plus qu’un job de travailler sur un tournage. En Métropole ou ailleurs, les techniciens ont des postes très cadrés ; ici, on a plusieurs casquettes. Ce n’est pas le même état d’esprit, on est plus polyvalent, on a un esprit d’équipe, on sait s’adapter. C’est une force, et cela compte sur l’ambiance d’un film. Il faut néanmoins reconnaître, et parce que c’est une filière naissante, que nous n’avons pas tous les postes. On est donc obligé d’avoir des personnes extérieures pour ces postes. Il y a un échange, un accompagnement, mais nous devons nous développer. Les états généraux ont ainsi servi à s’interroger : Où en sommes-nous? Qu’est-ce qu’on sait faire ? Qu’est-ce qui nous manque ? Ce que pensent les producteurs européens quand ils viennent ? Nous devons développer par exemple l’écriture car si nos auteurs savent écrire pour des chaînes locales, est-ce le cas pour l’international ? Nous avons besoin de formations. Nous réfléchissons d’ailleurs avec l’Europe à comment ils pourraient nous accompagner sur des actions ponctuelles et à long terme pour les auteurs/producteurs, comment on pourrait être meilleur ?
FIFO : Qu’en est-il aujourd’hui des investissements faits par les chaînes ?
Chaines privées comme publiques, elles ont des obligations d’investissement en Métropole et en Outremer. France Télévisions a une obligation dans la production indépendante de 420 millions d’euros par an, sur ce montant seulement 0,16 % est investi en Outremer. Aujourd’hui, il est temps de rebattre les cartes. France Télévisions est porteur de la création en Métropole, mais moins en Outremer. On est un peu invisible, les gens pensent que il n’y a pas de producteurs ni de techniciens dans les Outremers. Aujourd’hui, les 1ère n’ont pas de budget, mais est-ce que France Télévisions dans cette enveloppe globale ne pourrait pas reverser une partie pour France Ô et aux 1ère ? Il faut redistribuer l’argent, nous sommes dans un cas d’école d’Egalité réelle, tout le monde doit être au même niveau. Il faut juste dire aux gens que nous existons et que des professionnels nous font déjà confiance. Il faut savoir que des sociétés de productions ou des chaînes sont venues ici tourner avec des techniciens et acteurs locaux, et ont décidé de revenir, donc cela veut dire qu’on n’est pas si mauvais !
FIFO : Quels sont les projets pour tenter de pallier ces manques ?
Des pré-restitutions des états généraux ont été organisées à l’Elysée, au ministère de la Culture, à l’Assemblée Nationale, auprès des chaînes et de certains grands groupes. Le premier retour a été de dire que nous étions une même voix, on est dans une logique d’avancer ensemble. Une charte entre producteurs et diffuseurs est d’ailleurs en projet. Aujourd’hui, les informations remontent à moi, et nous travaillons dessus. Mais, il faudrait par exemple que les chaînes donnent une vraie visibilité sur plusieurs années, permettant ainsi aux producteurs de réfléchir et présenter des projets. Et ainsi mettre en place un programme entre diffuseurs et producteurs. Car aujourd’hui, lorsqu’on est producteur en Outremer, on travaille encore au coup par coup. On n’est donc pas dans les normes, et on voudrait justement fonctionner normalement. Nous souhaiterions aussi remettre en place en Polynésie, comme en Martinique, un bureau d’accueil de tournage, chapeauté par Film France qui permet de crédibiliser une destination. Ce bureau d’accueil, c’est le guichet d’entrée des sociétés de productions nationales et internationales. Il doit donc être institutionnel car c’est l’image du Pays qui est en jeu. Ca n’aurait pas de sens que ce soit un privé qui porte cette responsabilité. Aujourd’hui, nous avons une volonté politique de créer un bureau, et nous avons aussi la personne qu’il faut, qui connaît le milieu et les institutions, et a déjà l’expérience de ce bureau d’accueil. Il n’y a donc plus qu’à…
FIFO : Présenter la restitution des états généraux de la production cinématographique des Outremers au FIFO est-il important ?
Bien-sûr. C’est le lieu. Car dès la première année, le FIFO a cristallisé l’audiovisuel. Avant, pendant, après, on parle audiovisuel, et de la filière dans son ensemble. Le FIFO a été un élément déclencheur dans le domaine. Les grandes annonces se font d’ailleurs pendant le FIFO, qui est un tremplin pour nous.
Aujourd’hui, il y a 1000 techniciens sur tous les territoires Outremers et 90 sociétés de productions. Ces filières se sont créées entre 2001 et 2005. Elles sont jeunes et naissantes, mais elles ont réussi à se développer malgré un environnement peu propice. Sur la Polynésie française, il y a peu de diffuseurs : la 1ère, TNTV, et parfois quelques petites chaînes. Mais, rappelons qu’il y a encore quinze ans ces filières n’existaient pas. Les diffuseurs en place n’avaient donc pas l’habitude de travailler avec nous, car nous n’étions pas là. Les choses ont évolué, mais certains ont gardé des habitudes. Quand le FIFO a été créé, il y avait zéro documentaire de la Polynésie française. Le Pays a donc commencé à se pencher sur un fond de soutien local audiovisuel. On a ainsi pu se développer, et aujourd’hui, on produit plus de 30 documentaires par an, avec 120 techniciens pour seulement 5 il y encore quinze ans. Du fait de son statut, la Polynésie, comme la Calédonie, n’avait pas accès à certaine aide. Le Pays a signé en 2013 une convention avec le CNC, le Centre National du Cinéma et de l’image animée, ce qui a permis de développer les productions, avec un fond de 35 millions par an. Forte de ces avancées, la filière s’est structurée, et les professionnels se sont professionnalisés.
FIFO : Comment le documentaire et la fiction peuvent-ils se développer sur les Outremers ?
Aujourd’hui, les 30 documentaires produits par an sont diffusés au niveau local mais aussi au niveau national et international. En dix ans, nous avons réussi à développer une très belle filière documentaire. Parallèlement à cela, on souhaite développer la filière fiction. On ne va pas opposer les deux genres, mais si nous n’avons que le documentaire, nous ne pourrons pas développer les autres filières. Au niveau local, on pousse la fiction qui a vraiment commencé à émerger l’année dernière. Et d’ailleurs, on a vu que la proportion de techniciens polynésiens était plus importante que métropolitains. Ce qui n’était jamais arrivé. On a eu un basculement. Le Pays a d’ailleurs annoncé lors de la cérémonie d’ouverture qu’il nous aidera pour cette filière. C’est important car sans une volonté politique, les producteurs ne peuvent rien faire. Les états généraux de la production Outremer ont justement servi à ça. Aujourd’hui, nos députés et sénateurs se rassemblent pour porter tous d’une même voix une parole.
FIFO : Quel est le niveau de la production locale ?
Aujourd’hui, nous avons de très bons techniciens qui ont appris par l’expérience. Ils ont le feu sacré, c’est plus qu’un job de travailler sur un tournage. En Métropole ou ailleurs, les techniciens ont des postes très cadrés ; ici, on a plusieurs casquettes. Ce n’est pas le même état d’esprit, on est plus polyvalent, on a un esprit d’équipe, on sait s’adapter. C’est une force, et cela compte sur l’ambiance d’un film. Il faut néanmoins reconnaître, et parce que c’est une filière naissante, que nous n’avons pas tous les postes. On est donc obligé d’avoir des personnes extérieures pour ces postes. Il y a un échange, un accompagnement, mais nous devons nous développer. Les états généraux ont ainsi servi à s’interroger : Où en sommes-nous? Qu’est-ce qu’on sait faire ? Qu’est-ce qui nous manque ? Ce que pensent les producteurs européens quand ils viennent ? Nous devons développer par exemple l’écriture car si nos auteurs savent écrire pour des chaînes locales, est-ce le cas pour l’international ? Nous avons besoin de formations. Nous réfléchissons d’ailleurs avec l’Europe à comment ils pourraient nous accompagner sur des actions ponctuelles et à long terme pour les auteurs/producteurs, comment on pourrait être meilleur ?
FIFO : Qu’en est-il aujourd’hui des investissements faits par les chaînes ?
Chaines privées comme publiques, elles ont des obligations d’investissement en Métropole et en Outremer. France Télévisions a une obligation dans la production indépendante de 420 millions d’euros par an, sur ce montant seulement 0,16 % est investi en Outremer. Aujourd’hui, il est temps de rebattre les cartes. France Télévisions est porteur de la création en Métropole, mais moins en Outremer. On est un peu invisible, les gens pensent que il n’y a pas de producteurs ni de techniciens dans les Outremers. Aujourd’hui, les 1ère n’ont pas de budget, mais est-ce que France Télévisions dans cette enveloppe globale ne pourrait pas reverser une partie pour France Ô et aux 1ère ? Il faut redistribuer l’argent, nous sommes dans un cas d’école d’Egalité réelle, tout le monde doit être au même niveau. Il faut juste dire aux gens que nous existons et que des professionnels nous font déjà confiance. Il faut savoir que des sociétés de productions ou des chaînes sont venues ici tourner avec des techniciens et acteurs locaux, et ont décidé de revenir, donc cela veut dire qu’on n’est pas si mauvais !
FIFO : Quels sont les projets pour tenter de pallier ces manques ?
Des pré-restitutions des états généraux ont été organisées à l’Elysée, au ministère de la Culture, à l’Assemblée Nationale, auprès des chaînes et de certains grands groupes. Le premier retour a été de dire que nous étions une même voix, on est dans une logique d’avancer ensemble. Une charte entre producteurs et diffuseurs est d’ailleurs en projet. Aujourd’hui, les informations remontent à moi, et nous travaillons dessus. Mais, il faudrait par exemple que les chaînes donnent une vraie visibilité sur plusieurs années, permettant ainsi aux producteurs de réfléchir et présenter des projets. Et ainsi mettre en place un programme entre diffuseurs et producteurs. Car aujourd’hui, lorsqu’on est producteur en Outremer, on travaille encore au coup par coup. On n’est donc pas dans les normes, et on voudrait justement fonctionner normalement. Nous souhaiterions aussi remettre en place en Polynésie, comme en Martinique, un bureau d’accueil de tournage, chapeauté par Film France qui permet de crédibiliser une destination. Ce bureau d’accueil, c’est le guichet d’entrée des sociétés de productions nationales et internationales. Il doit donc être institutionnel car c’est l’image du Pays qui est en jeu. Ca n’aurait pas de sens que ce soit un privé qui porte cette responsabilité. Aujourd’hui, nous avons une volonté politique de créer un bureau, et nous avons aussi la personne qu’il faut, qui connaît le milieu et les institutions, et a déjà l’expérience de ce bureau d’accueil. Il n’y a donc plus qu’à…
FIFO : Présenter la restitution des états généraux de la production cinématographique des Outremers au FIFO est-il important ?
Bien-sûr. C’est le lieu. Car dès la première année, le FIFO a cristallisé l’audiovisuel. Avant, pendant, après, on parle audiovisuel, et de la filière dans son ensemble. Le FIFO a été un élément déclencheur dans le domaine. Les grandes annonces se font d’ailleurs pendant le FIFO, qui est un tremplin pour nous.