Assemblée : Moetai Brotherson et Edouard Fritch s'écharpent sur le dossier Air Moana

Les membres du gouvernement et le président de la Polynésie à l'Assemblée de Polynésie
Deuxième séance de la session budgétaire à l’assemblée de la Polynésie française, ce mardi 24 septembre. La séance a débuté par les traditions questions orales au gouvernement. Parmi les sujets abordés, l’avenir d’Air Moana. Un dossier épineux qui a valu une vive séquence. Le président de la Polynésie a taclé l'ancien gouvernement lors d'une question posée par Nuihau Laurey. Edouard Fritch a réagi et rappelé que le dossier à l’époque n’était pas complet et que Moetai Brotherson avait « menti » sur ce sujet.

"C’est nous qui avons autorisé la création de la société Air Moana pour concurrencer Air Tahiti (...) Pourquoi il y a un problème de défiscalisation ? Pas parce qu’on n’a pas voulu, c’est faux de dire ça ! Vous êtes un menteur quand vous dites ça !". Le président du groupe Tapura à l'Assemblée de Polynésie était remonté lors de la deuxième séance de la session budgétaire. Édouard Fritch a souhaité prendre la parole sur le dossier épineux d'Air Moana. Un sujet d'abord abordé par le représentant non-inscrit Nuihau Laurey dans les questions au gouvernement.

Pour rappel, la compagnie aérienne est en grande difficulté financière, son avenir est en jeu et plus de 200 emplois sont menacés. Air Moana qui s'est lancé il y a un an et demi, a besoin de trouver 4 milliards de Fcfp pour maintenir son activité. Le vice-président de AHIP, A Here Ia Porinetia, a rappelé dans l'hémicycle que le maintien d'une concurrence dans le transport aérien local était "une nécessité". "Quelles autres mesures le Pays envisage-t-il de mettre en place pour assurer ou tenter d’assurer la viabilité d’Air Moana et surtout quelle stratégie compte-t-il déployer pour favoriser le maintien d’une concurrence nécessaire et loyale dans ce secteur économique si sensible ?" a-t-il donc demandé à Moetai Brotherson.

Dans sa réponse, le président du Pays Moetai Brotherson a taclé l’ancienne majorité sur la défiscalisation refusée à l’époque à la compagnie : "À notre arrivée, le même gouvernement qui a autorisé l’arrivée d'Air Moana l’avait condamné puisqu’il avait fermé la défiscalisation aux aéronefs de type ATR". Une déclaration qui a fait bondir l'ancien président de la Polynésie, Édouard Fritch.

"Il y a eu un problème de complétude du dossier, ils n’ont pas pu nous garantir les financements et vous le savez car aujourd’hui c’est une des conditions que vous imposez à la société (...) Le problème est que vous avez avancé ici même des solutions qui aujourd’hui sont en attente. Et c’est cette société qui aujourd’hui souffre de l’attente de vos engagements ou de vos déclarations. Mais ne dites pas à chaque fois c’est le Tapura qui n’a pas voulu ! C’est faux ! (...) Je retire ce que je dis : vous n’êtes pas un menteur mais vous faites beaucoup d’erreurs". 

Edouard Fritch - président du groupe Tapura à l'Assemblée

Cette vive séquence a valu un rappel à l'ordre du président de l'Assemblée de Polynésie à Édouard Fritch. En effet, l'élu est intervenu après que le président du Pays a répondu Nuihau Laurey. "Quand la réponse est posée et répondue, on n'intervient plus" a rappelé Antony Géros.

Entamer une réflexion sur le schéma de desserte aérienne

Pour le reste, Moetai Brotherson a estimé avoir mis en place les conditions du sauvetage financier de la compagnie. Après la proposition d'un texte adopté à l'Assemblée pour remettre les ATR dans le cadre de la défiscalisation, l’AMI a été lancée. Air Moana a été lauréate à hauteur de 2, 8 milliards de Fcfp. "Dans le même temps, la SOFIDEP était déjà intervenue sur Air Moana à hauteur de 100 millions, nous avons augmenté à 500 millions pour permettre un déblocage rapide, ce qui a permis un bol d'oxygène à Air Moana." Quant à la deuxième tranche de 250 millions de Fcfp, elle est soumise à des conditions qui ne sont pas levées par la compagnie à ce jour, selon le président. Moetai Brotherson a par ailleurs confirmé la proposition du Pays de participer à hauteur de 1 milliard de Fcfp via la SOFIDEP.

"Le Pays a engagé une lettre intention de prise participation de la SOFIDEP à 1 milliard mais il y a aussi un certain nombres de conditions notamment l'augmentation de participations privées au capital d’Air Moana qui à ce jour ne n'ont pas été levées (...) Nous avons ensuite, après discussion avec le Haut-commissaire qui nous a signifié l'intérêt de l'Etat au maintien d'Air Moana sur le marché domestique, convoqué les trois banques locales, la banque des territoires et l'AFD pour avoir leur point de vue et leur volonté ou pas d'accompagner le développement d'Air Moana (...) Aujourd’hui, la balle est très largement dans le camp d'Air Moana. Nous avons fait état des résutlats de cette réunion avec les banques à la direction d'Air Moana qui nous a assuré avoir certains leviers pour lever les conditions suspensives de la LOI et de nature à rassurer les banques. Nous attendons dans les jours qui viennent d'avoir la concrétisation de ces élements de la part de la direction générale d'Air Moana".

Moetai Brotherson - président du Pays - déclaration à l'Assemblée

À plus long terme, le Pays souhaiterait entamer une réflexion autour de l'évolution schéma de desserte aérienne du marché domestique. Avec Air Tahiti, Air Moana et prochainement l'arrivée de Motu Link dans le domaine du fret, le président de la Polynésie estime qu'il faudra à un moment donné mettre tous ces acteurs autour de la table "pour remettre au goût du jour le schéma de desserte aérienne".