Le cannabis thérapeutique voté mais pas encore appliqué : "nous médecins nous sommes pour la sécurité"

Pied de cannabis (illustration)
Six mois après le vote de la loi sur la légalisation du cannabis thérapeutique par l'assemblée, le texte n'est toujours pas appliqué. Les associations concernées ont été invitées à travailler sur ces décrets d'applications mais leurs avis sont partagés entre avancée et manque d'envergure de la loi. La filière devrait pouvoir être lancée à la fin du mois de janvier.

À quelques semaines d’appliquer la loi sur le cannabis thérapeutique, le gouvernement joue la carte de la sûreté.

Sécuriser au maximum la filière

Le vote constitue un premier pas vers le développement de la filière du cannabis thérapeutique en Polynésie. Mais son exploitation nécessite une phase de recherche pointue, qui ne peut pas se faire précipitamment. C'est l'argument de l'association Onoea, qui œuvre pour le développement de la médecine traditionnelle.

Cette association mise sur des produits de très haute qualité même si cela nécessite d'attendre encore un peu. "Nous médecins nous sommes pour la sécurité absolue de cette filière. Il nous faut des principes actifs de qualité thérapeutique. Donc ce sont vraiment des produits ultra-bio, ultra-contrôlés. La loi de pays aujourd'hui nous autorise à aller dans ce sens, à développer une filière de production en sachant qu'il va nous falloir importer des graines de qualité pour pouvoir les produire ici et puis après il va falloir sécuriser la filière" explique Dr Éric Parrat, pneumologue et président de l'association. 

Quitte à retarder encore la mise en application

Le projet, qui avait suscité les espoirs des associations du secteur, a donc été revu à la baisse. Ce qui n'est pas sans déplaire à l'association Tahiti Herb Culture. Son président, Karl Anihia, s'impatiente. "Pour nous, cette expérimentation ne servait à rien parce qu'on a déjà toutes les données scientifiques, toutes les semences, toute la technicité internationale. On aurait pu gagner plus de temps" déplore-t-il. 

De la même façon, Karl Anihia considère que les nouveaux textes de loi sont trop limitants. Ils n'autorisent par exemple que deux producteurs de cannabis par archipel. "Toutes les dispositions qui ont été prises sont plus restrictives qu'en France. Aujourd'hui, pour cultiver du chanvre en France, tu n'as pas besoin d'autorisation. Tu fais juste une déclaration auprès de l'agriculture et de la gendarmerie. Chez nous, on est obligés d'attendre que le Président et le conseil des ministres décident qui va cultiver ce chanvre à 0,3%. C'est pour répondre à une crainte des élus. Mais dans le fond, elle n'est pas justifiée" lâche-t-il. 

Mais Moetai Brotherson, qui avait défendu la loi pour le cannabis thérapeutique pendant son mandat de député à Paris, n'est pas d'avis de précipiter les choses. Le président partage le point de vue du Dr Parrat. "Les choses se font dans l'ordre et avec méthode. Je ne suis pas d'accord avec ceux qui veulent aller trop vite, plus vite que la musique et qui veulent faire des choses illégales. Quant on parle de cannabis, on n'est pas en train de parler de tomates. On parle d'une plante qui a d'un côté des vertus extraordinaires et de l'autre, un psychotrope selon la variété que l'on cultive (...). Déjà à l'époque nous n'étions déjà pas d'accord avec Mr. Anihia qui a sa vision des choses très embrumée" a déclaré le président du pays. 

Le gouvernement a jusqu’au 23 janvier pour sortir ses arrêtés d’application et ainsi permettre au secteur de démarrer officiellement au fenua.