Jérémy a trouvé sa voie, celle d’être au service de Dieu. Tous les dimanches, il se tient devant les fidèles dans l’église Saint-Jean-Baptiste de Mataiea. Sa liturgie de ce jour porte sur l’alliance d’Abraham avec Dieu, un chemin de croix qui lui a sauvé la vie. "Merci Seigneur de m'avoir déjà pardonné, et de m'avoir permis de te reprendre la main, parce que je sais très bien que ce n'est pas le Seigneur qui m'a lâché la main, c'est moi", reconnaît Jérémy.
Ancien boss
Jérémy était considéré comme le boss du quartier où il vivait à Pirae, à l’âge de 16 ans. Pour bien se faire voir, il fumait du paka, mais sa fierté et son égo l’ont poussé à aller plus loin, à consommer de l’ice. Au départ, ce n’était qu’un jeu, mais comme il l’a martelé, l’enfer l’a vite rattrapé. Il est devenu l’un des plus gros trafiquants d’ice de l’époque. Dans cette traversée du désert, Jérémy a tout vu. "Dans l'ice, il y a plein de mauvais dealers qui utilisent la drogue pour manipuler les jeunes femmes, tous ces genres de truc...Notre ligne de conduite était de ne pas traîner avec ce genre de mecs-là", dit-il.
Il fera de la prison et sa vie familiale s’effondrera. Il essaiera à plusieurs reprises de revenir dans le droit chemin, mais en vain. "Dans l'ice, tout le monde ment. Si je dois passer un message, et dire quelque chose à tous ces jeunes : si t'as envie d'être pauvre, si t'as envie d'avoir mal, l'ice c'est le meilleur truc", lâche Jérémy.
Marguarita Lucas le connaît depuis son enfance. Dans leur groupe de travail dominical, elle a remarqué ses progrès. "Il a été courageaux de témoigner, et je remercie le Seigneur. A un moment donné, il fallait ce témoignage, et il concerne tout le monde", précise cette dame.
"Se battre !"
La famille de Jérémy est bien connue dans le monde religieux. Son défunt père était katekita, catéchiste. Vaihere, la dernière de la fratrie, est fière de son grand frère. Un chemin semé d’embûches, mais il s'en est sorti aujourd’hui. "On l'a vu chuter, on l'a vu se relever, plusieurs fois. Mais je le félicite parce qu'à chaque fois il combat, il se relève", avoue Vaihere Mai, épouse Aumeran, et responsable d’un groupe de rosaire, de prières.
Jérémy a 3 enfants. Sa vie familiale est désormais stable. Son aîné, âgé de 21 ans, a réussi son concours pour faire partie de la brigade des...stupéfiants ! "C’est l’œuvre de Dieu", nous confie Jérémy, très ému, qui adresse un dernier message : "j'ai pensé fort à mes enfants, à tous nos enfants. Je sais que ça vient vous chercher par moment, et c'est à ce moment-là, quand ça vient vous chercher, qu'il faut se battre !"
Le reportage de Teupoo Fatupua-Avae et Hubert Liao :