Thierry Tamata, conseiller municipal chargé de la mer, observe depuis 2018 la taille des poissons rétrécir sur les points de vente en bord de route. Pour lui, il est plus que temps de mettre en place un rahui afin de préserver la ressource. Dans son projet, la zone s'étend sur 54 hectares à Teavamotu : "c'est à peu près 6% du lagon total de Vairao. Et en termes de masse corallienne, c'est à peu près 15%. Donc c'est vraiment une partie infime du lagon qu'on voudrait ressourcer" présente Thierry Tamata.
Une partie infime du lagon ? Les pêcheurs peu convaincus
Sur ce point, Varink Tama a eu toute autre vision. Pêcheuse professionnelle et vice-présidente de la chambre d'agriculture et de la pêche lagonaire, elle craint une diminution de la surface de pêche et à fortiori, des revenus des pêcheurs. Fermer cette zone pendant trois ans n'est pas une bonne option à ses yeux. "Nous, on a un petit lagon à Vairao. Qui dit rahui de Teavamotu à Teavarahi, dit aussi enlever le parc à poissons, ça veut dire qu'il faut qu'on arrête d'aller sur le banc de sable alors que tous les week-ends, c'est full ?" interroge-t-elle.
Alors que faire ? La pêcheuse n'est pas foncièrement opposée au rahui mais voudrait changer de zone, en lieu et place du parc à rori par exemple, ou encore opter pour un "ré-ensemencement du lagon".
Protéger d'urgence
De son côté, l'élu défend son projet. "On sait pertinemment que si l'on ne restructure pas le cheptel du lagon, on risque l'éradication d'une espèce. (...) Je comprends leur priorité, mais il faut faire un choix. C'est le bon moment de laisser reposer Mère Nature et arrêter de prendre sans rien donner en échange à la mer qui nous nourrit tous. (...) Pensons à demain !" s'inquiète-t-il. À l'entendre, la mesure devient urgente...un avis que partage Poroi Tavararo. Cet habitant de Vairao vit en bord de mer et pêche pour le loisir. Depuis quelques temps, il "voit des gens le soir venir faire de la chasse sous-marine : c'est un massacre. [Le rahui] ne me fait pas du tout peur. C'est pour préserver nos denrées comme le faisait nos tupuna. Il faut le mettre en place" insiste-t-il.
Thierry Tamata prévoit une mise en place du rahui fin juin-début juillet, si le projet dans son ensemble est validé en conseil des ministres. "Laissez-nous trois ans et vous jugerez des résultats" lance-t-il.
Étude et budget
Un rapport réalisé par la direction des ressources marines doit bientôt être publié. "J'attends avec impatience une étude faite par la DRM l'année dernière qui portait sur la viabilité d'une espèce lagonaire en fonction de la pression de pêche et de la taille et des espèces pêchées" nous apprend Thierry Tamata.
Ce projet de rahui est estimé entre 300 000 et 1,5 millions Fcfp. Une demande de subvention a été faite auprès de la DRM et de la DPAM pour financer l'installation des panneaux de signalisation et des bouées. "On va boucler ces commissions participatives et on va remettre ça aux mains du comité de gestion" indique l'élu, en précisant qu'il "souhaiterait très fortement que le président du comité de gestion soit un pêcheur lagonaire" et non un élu de la commune, afin de dépolitiser le projet, qui revient d'abord aux pêcheurs.