Jour de fête pour les uns, jour de deuil pour les autres, la date du 29 juin n'a jamais fait l'objet d'un consensus entre les autonomistes et les indépendantistes. Après l'annonce de la suppression du 29 juin comme jour férié, le président du Âmuitahiraa o te Nunaa Maòhi, Gaston Flosse, n'a pas caché sa tristesse sur le plateau du journal du 2 mai de Polynésiela1ère "Je suis triste qu'on puisse ainsi bouger des signes qui sont importants". L'ancien homme fort du pays ne comprend pas la vision des indépendantistes pour qui le 29 juin est un jour de deuil. "Le 29 juin 1880, sur pression de la France, le roi Pomare V a accepté l'annexion de son royaume par les Français. Mais si ce n'était pas la France, ce serait l'Angleterre...Pourquoi c'est un jour de deuil pour les indépendantistes ? Eux, ils auraient voulu que ce soit l'Angleterre, c'est ça ?"
Même tristesse du côté d'Edouard Fritch, le lendemain matin, dans la matinale radio."Enfin, pour moi c'est plus que de la tristesse, parce qu'en fin de compte, on est en train de toucher aux fondamentaux de notre existence, de notre société." Le président du Tapura Huiraatira de rajouter : "C'est presque une revanche des Polynésiens par rapport à ce que l'on a appelé la colonisation. Nous avons acquis en 1984 certains pouvoirs. Nous avons eu des compétences, nous avons présidé notre pays. On avait tout pour créer une vraie société polynésienne, pourquoi pas demain un peuple polynésien ? Aujourd'hui, par esprit de revanche, la revanche des indépendantistes contre les autonomistes, on vient toucher aux fondamentaux, et là, je suis plus que triste".
Pas la priorité pour Gaston Flosse
Gaston Flosse s'attend à d'autres atteintes aux symboles de l'autonomie "Nous avons obtenu notre drapeau, notre hymne. Ils vont changer également le drapeau ? Ils vont changer l'hymne ? C'est ça l'indépendance?" Pour le président du Âmuitahiraa, il y a d'autres priorités en ce moment. Il n'hésite pas à s'adresser directement au président de la Polynésie française "Ecoutez, Monsieur le président Moetai, et je m'adresse à lui, ce n'est pas la priorité. La priorité de la population, c'est le coût de la vie, c'est la création d'emplois, c'est la pauvreté qui s'installe dans la population".
Pourquoi ne pas supprimer l'arrivée de l'Evangile ? Pourquoi ne pas supprimer le lundi de Pentecôte ?
Edouard FritchL'invité café 3 mai - Polynésiela1ère
Selon Edouard Fritch, lorsqu'il était au pouvoir, avec son ministre de la Culture, Heremoana Maamaatuaiahutapu, ils avaient envisagé de mettre en place un jour chômé pour Matarii i nià."Qu'on ne vienne pas me parler de fête, ce n'est pas une histoire de fête. Matarii i nià, on fête ça depuis 25 ans. C'est Louise Peltzer, ministre de la culture à l'époque, qui avait lancé ça. Avant que l'on ne soit privé du pouvoir, notre ami, Heremoana Maamatuaiahutapu avait effectivement prévu de proposer au gouvernement un jour de congé, mais qu'on ne vienne pas supprimer l'un pour faire l'autre. Pourquoi alors ne pas supprimer l'arrivée de l'Évangile ? Pourquoi ne pas supprimer le lundi de Pentecôte ?"
Le clivage autonomie/indépendance n'existe plus
Les deux leaders politiques semblent donc partager la même vision. Toutefois, dès que l'on aborde la question du clivage autonomie contre indépendance, les divergences sont importantes. C'est simple. Pour Gaston Flosse, le clivage autonomie/indépendance n'existe plus. "Ce terme-là, autonomiste et mais aussi indépendantiste, ça n'a aucune valeur, ça n'existe plus. Regardez les résultats du premier tour des législatives 2022, le Tavini fait 23.000 voix. Ça, c'est le compte des voix du Tavini. Et au deuxième tour des territoriales, le Tavini fait 64.000 voix. Le nombre de voix est multiplié par 3. Est-ce que cela signifie qu'il y a 64.000 indépendantistes en Polynésie ? C'est faux. Pas du tout. C'est fini cette époque des indépendantistes et des autonomistes. Il faudra trouver une autre terminologie".
Nous sommes des autonomistes purs et durs
Edouard FritchL'invité café 3 mai 2024 - Polynésiela1ère
De son côté, Edouard Fritch est moins catégorique. Lorsqu'on lui pose la question sur le statut de Pays associé de Gaston Flosse, la réponse de l'ancien président de la Polynésie est claire. "Nous ne sommes pas dans la même logique, c'est évident. Nous sommes des autonomistes purs et durs. Il faut faire attention pour arriver au statut que prévoit Gaston Flosse." Toutefois, Edouard Fritch prend soin de ménager son nouvel allié : "Je vais inviter Gaston Flosse à venir devant le Tapura très rapidement pour qu'il vienne expliquer l'esprit (de son statut NDLR). Vous savez que Gaston Flosse est un avant-gardiste. Il a une vision de l'autonomie pour ce pays. Donc, il y a sûrement un message derrière"