Carnet de bord : à Tromelin, le paradis des oiseaux, la France entretient une présence permanente

Pour ce deuxième épisode, Laurent Pirotte, envoyé spécial sur le Marion Dufresne, prend la direction l’île de Tromelin. Située dans l’archipel des îles Eparses, une histoire tragique s'y est déroulée au XVIIIe siècle. Aujourd’hui, c'est un paradis pour les oiseaux, où la France entretient une présen

Derrière le hublot de ma chambre, l’image d’une mer d’huile, un répit selon l’équipage. Poussé par les Alizés, le Marion Dufresne poursuit sa route, plein nord. Direction l’île Tromelin, anciennement appelée l’île au sable. Un caillou dans l’Archipel des éparses, mais un trésor pour les scientifiques, les historiens et les météorologues. 

Après plus de 26 heures de navigations depuis La Réunion, le ravitailleur des terres australes et antarctiques françaises ralentit sa course. Des curieux visiteurs accueillent notre venue.

Regardez le reportage de Réunion La 1ère :

Direction les TAAF, où un de nos journalistes participe à la tournée du Marion Dufresne. Ce soir, il nous emmène à la découverte de Tromelin. Théâtre d’un récit tragique au 18ème siècle, la petite île est devenue un paradis pour les oiseaux.

 

Le paradis des oiseaux

Fous à pieds rouge, fous masqués, naudins bruns, gygis, sternes… Plus de 10 000 oiseaux ont élus domicile sur ce petit caillou ne dépassant pas un km², le plus petit territoire de France.

Ces animaux inoffensifs se laissent facilement approchés, tout comme les milliers de Bernard L’Hermite et les tortues vertes qui viennent pondre lors de la saison.

 

Une histoire tragique au XVIIIe siècle

C’est ici que s’est déroulée une histoire tragique. En 1761, un bateau transportant des esclaves de Madagascar s’est brisé sur le récif.

L’équipage des marins français a pu repartir. Quatre-vingt esclaves ont été abandonnés, oubliés pendant quinze ans. En 1776, lorsque le chevalier de Tromelin vient chercher les rescapés, il ne reste que sept femmes et un bébé en vie.

Depuis le naufrage, l’encre n’a pas bougé, et rappelle aux rares marins se risquant dans les parages, la dangerosité de cette région du globe. Aujourd’hui sur place, des traces de cette tragédie sont toujours visibles comme un vieux puit, un canon à l’entrée du bâtiment et une stèle à la mémoire des oubliés de Tromelin. Sous les fondations du bâtiment, les traces de murets en corail qu’avaient construits il y a près de 250 ans ces femmes et ces hommes. 

 

La présence de la France

Trois personnes vont descendre pour la relève. Le Colombien Simon Guittierrez, chef de mission, avec plus d’une vingtaine de missions sur Tromelin, il remplacera Jacky Leveneur, plus de 30 missions à son actif pour cet originaire de l’Entre-Deux. Les deux hommes ensemble ont cumulé dix années passées à Tromelin.

Audrey Cartraud remplace Florian Falaise pour l’agence de l’environnement, et enfin Juliette Jolivet relève Mélanie Robert à l’infirmerie.

La base accueille depuis peu un dispositif photovoltaïque important permettant à la petite communauté plus d’autonomie, et surtout un impact écologique moindre, même si deux groupes électrogènes de secours sont toujours sur place en cas de cyclone.

Pour assurer le suivit météorologique, et changer les capteurs, Yannick Dameron et Didier Gauvin, techniciens de maintenance à Météo France à Saint-Denis participent aux missions du Marion Dufresne, afin d’entretenir la station de mesure automatique et autonome. Une station importante car elle fournit à La Réunion et dans le monde toute information relative au passage de cyclones dans la zone.

 

"Ici, c'est la France"

Aujourd’hui, l’état entretient une présence permanente sur Tromelin et contrôle l’espace maritime, une zone économique exclusive de la taille de l’Italie. Les ressources comme la biodiversité, la pêche et l’obtention des permis sont importantes. Alors face à la revendication de la souveraineté Mauricienne, l’Etat reste ferme. En visite dans l’Archipel il y a deux ans, Emmanuel Macron rappelait qu’ici, c’était la France. 

Je fais partie de ces rares privilégiés à avoir passé la nuit sur place. De leurs balcons, les deux nuages de Magellan nous ont gratifiés d’une fantastique nuit céleste. Demain de bonne heure, Audrey et Florian nous emmèneront découvrir ces milliers de volatiles et la ponte des tortues vertes. Rendez-vous la semaine prochaine.