Coronavirus : à quoi pourrait ressembler le monde économique de La Réunion post Covid-19 ?

C'est une question à laquelle il est difficile de répondre avec certitude, aujourd'hui. Mais, l'expert comptable, Abdoullah Lala, s'est appuyé sur des études économiques nationales, pour tenter de dégager des prévisions locales. Et sans conteste, le plus dur est à venir pour l'économie réunionnaise.
La France est en récession. Les entreprises sont en majorité à l'arrêt et les employés au chômage partiel. Le PIB français a chuté de 5,8 %, c'est la baisse la plus importante depuis 1949. 
Les ménages consomment moins. L'offre baisse. Et c'est tout le sytème social français qui est mis à mal. Résultat, le déficit de la France devrait atteindre jusqu'à 60 milliards de dette pour l'année 2020. C'est du jamais vu selon le ministre des comptes publics, Gérard Darmanin. 
 

L'ampleur du choc 


Cette crise sanitaire, on le voit impacte durement toute l'économie du pays.
Une analyse de " Xerfi ", un institut privé d'études économiques évalue ces pertes nationales selon les différents secteurs, en chiffrant le taux de chômage partiel. On s'aperçoit que les secteurs les plus touchés sont les activités des hôtels et restaurants avec plus de 80% des salariés placés en chômage partiel et le bâtiment, avec plus de 75%.

A La Réunion, un expert comptable, Abdoullah Lala a tenté de faire des prévisions sur ce que serait l'économie locale après cette crise Covid. Des prospections réalisées en se basant sur différentes études économiques nationales.
Ainsi, on découvre sans surprise que dans le département, tout comme dans l'Hexagone, les secteurs les plus touchés demeurent les secteurs de l'hébergement - restauration avec 90% de perte instantanée d'activité (estimations INSEE - 9 avril 2020) et  le BTP, avec 88%. Et une proportion plus importante de TPE ayant recours au chômage  partiel.
On le sait, ces secteurs représentent une part importante des entreprises de la Réunion. Pour l'expert comptable " l'arrêt de ces activités pourrait expliquer un dévissage plus important sur l’île ".
 

Quel impact sur le PIB et la croissance cette année ?


" Au niveau national, une baisse de 8% du PIB est attendue post-Covid. Une diminution importante qui sera partiellement rattrapée, l'année prochaine " avance Abdoullah Lala.
Mais à La Réunion ce rattrapage sera plus long. " Cela va être amplifié car il y a une situation endogène (interne) qui va prolonger voire accentuer ce phénomène dépressionnaire " précise l'expert comptable. 

Il s'appuie ainsi sur la dernière grande crise économique pour comparaison, celle de 2008. A ce moment, La Réunion avait décroché deux fois plus qu'au plan national, - 4% contre - 2,7% pour la France. Et puis en 2009, le PIB local avait reculé de 1,7 % alors qu'au plan national, il était à + 1,5%.
La Réunion avait donc subi une double récession deux années de suite.
 

 Si on continue à se projeter et qu'on applique les mêmes proportions que 2009, on craint une récession au moins entre 12 et 15 % en 2020. C'est une fois et demie de plus que ce qui est prévue au niveau national

 

Pourquoi La Réunion serait plus impactée?


Pour Abdoullah Lala, 3 facteurs expliqueraient les raisons d'un impact plus important de la crise sur l'économie locale :

- le caractère non récupérable des pertes de production dans de nombreux services.
" Les coiffeurs, les restaurants, les cinémas ont été mis en sommeil durant deux mois. Tout ce qui a été non consommé ne pourra pas être reporté. Cela est fini, terminé. Il n'y aura plus de production. Sans compter les difficultés liées à la reprise " ajoute l'expert comptable. 

- La limite des capacités dans certains secteurs tels que l'artisanat et le bâtiment qui ne seront pas extensibles à court terme.
En clair, " ces activités sont plus exposées au dévissage de l'économie en raison de la femeture des distributeurs spécialisés pendant deux mois " selon Abdoullah Lala,

- La baisse de l'emploi, + 7% de chômage au mois de mars, au niveau national. Couplé par une baisse des revenus des ménages. Les personnes en activité partielle ont touché moins, 84% de leur salaire. C'est une décote de 16%.
Résultat, pour l'expert comptable, " les ménages ont donc eu tendance à épargner. Cela crée un effet de traîne sur la reprise de la consommation qui est un moteur traditionnel de la croissance sur l’île ".
 

Que faut-il envisager pour La Réunion ?


Il peut y avoir différents scenarii, selon les prévisions d'Abdoullah Lala.
 

A La Réunion, on va rester dans un système dépressif de l'économie. A mon avis, on ne va pas retrouver le niveau de fin 2019 avant 2022. 


Ce qui éloigne la perspective d’une récupération rapide, en forme de V, à l’instar de ce qui est envisagé dans l’Hexagone. 

L'ensemble de ces prévisions seront présentées par Abdoullah Lala, le 7 mai prochain, lors lors de la commission de veille et de prospective de la CPME (Confédération des petites et moyennes entreprises).