Élections à l'Université de La Réunion : les enjeux du scrutin

L'Université de La Réunion.
Les personnels de l'Université de La Réunion sont appelés aux urnes aujourd'hui afin de renouveler leurs représentants dans les conseils centraux. En jeu, la succession du président Frédéric Miranville, suspendu depuis octobre 2023.

Après un an et deux mois d'intérim, la succession de Frédéric Miranville, président déchu, est ouverte. Les personnels de l'Université de La Réunion sont appelés aux urnes jeudi 12 décembre afin d'élire leurs représentants aux conseils centraux, qui décideront ensuite du choix de la présidence, de la politique générale de l'établissement, de son budget, ou encore des axes de recherche et des modalités d'examen. On vous explique les enjeux de ce scrutin capital pour l'avenir des étudiants réunionnais. 

Le contexte

Le 6 octobre 2023, c'est un coup de tonnerre qui frappe l'Université de La Réunion. Visé par des accusations de harcèlement moral, son président élu depuis 2016, Frédéric Miranville, est suspendu de ses fonctions par la ministre de l'Enseignement supérieur et de la recherche. Alors qu'une enquête judiciaire est ouverte en parallèle, Frédéric Miranville n'a jamais récupéré son poste.
Malgré ses protestations, Frédéric Miranville est suppléé, d'abord par son vice-président puis, à partir de mars 2024, par un administrateur provisoire en la personne de Jacques Comby, chargé de mission auprès de la ministre Sylvie Retailleau.


Le 12 novembre dernier, dans le cadre d'une enquête de la Cour des comptes sur l'enseignement supérieur et la recherche dans les outre-mer, l'Université de La Réunion a été cette fois épinglée pour sa "gouvernance défaillante", une situation financière "précaire" et une offre de formation dépourvue "de véritable pilotage."

Retour à un climat "apaisé" ?

Après bientôt dix mois d'administration provisoire, "la plus longue jamais vue en France", le Pr Jacques Comby s'apprête à laisser la place à la nouvelle équipe élue. Joint par Réunion la 1ère, il estime avoir rempli sa mission qui consistait à "amener l'apaisement, rétablir la trésorerie et continuer le développement de l'Université." "Le climat est plus serein, les gens se parlent à nouveau" assure l'administrateur provisoire. 


En déficit de 4 millions d'euros à son arrivée, l'UR devrait finir l'année "avec un excédent, grâce à une meilleure perception des recettes et une restructuration de notre agence comptable. On est allé au-delà des attentes", estime-t-il. Enfin, certains grands chantiers se sont poursuivis, comme le projet d'amphithéâtre de Santé à Saint-Pierre. 


Jacques Comby souhaite désormais "que l'on parle de l'Université de La Réunion en termes positifs, car elle est belle, elle peut être l'une des meilleures de France et l'île peut en être fière." Et d'afficher sa confiance "dans les deux listes qui se présentent aux élections car elles veulent quelque chose de nouveau." "Il n'y a d'ailleurs eu aucun recours préélectoral, ce qui est déjà un signe", souligne-t-il.

Qui vote ?


Le scrutin du 12 décembre concerne le renouvellement des conseils centraux de l'Université de La Réunion, qui intervient tous les quatre ans. À savoir : le conseil d'administration, la commission de la recherche du conseil académique et la commission de la formation et de la vie universitaire du conseil académique. Seuls les représentants des étudiants, dont le mandat court jusqu'en mars 2025, ne sont pas renouvelés à cette occasion.


Ce sont donc quelque 1 500 personnels de l'Université, répartis en huit collèges (professeurs des universités, autres enseignants, personnels techniques et administratifs...) qui vont devoir voter lors de ce scrutin de liste à un tour à la représentation proportionnelle sur les différents sites universitaires : Moufia, Tampon, Terre-Sainte et Mayotte.


Les opérations de vote se dérouleront toute la journée, de 9h à 18h, aux urnes. Il n'y a pas de vote électronique ou par correspondance possible. Les résultats sont proclamés dans les trois jours suivant le scrutin, mais ils devraient être connus dès la nuit prochaine.

Qui sont les candidats ?

Comme lors des précédentes élections, deux listes s'affrontent à l'occasion de ce scrutin.

-Avenir, conduite par Jean-François Hoarau. Ce professeur des universités en sciences économiques est directeur adjoint du centre d'économie et de management de l'océan Indien depuis 2013. Sa liste comporte certains membres l'équipe présidentielle sortante.

Contacté par Réunion la 1ère, Jean-François Hoarau indique vouloir sortir de "la guerre des clans qui secoue l'université depuis 20 ans" et "réenchanter l'université" autour de trois axes principaux : "apaisement, confiance partagée et inclusivité."

Avec une liste "regroupant toutes les sensibilités", il souhaite faire de l'UR "un phare du savoir dans l'océan Indien". Plusieurs mesures sont évoquées : la création d'un conseil d'éthique et de déontologie, un "garde-fou dont la direction serait confiée à la liste d'opposition", une "re-décentralisation vers les composantes et les laboratoires", ainsi que la création d'un "revenu universel étudiant" pour "relever le défi de la précarité étudiante."


-Réunion université nouvelle, conduite par Richard Lorion. Cet enseignant-chercheur, maître de conférences en génie informatique, a été directeur de l'IUT de Saint-Pierre de 2014 à 2024. Il est appuyé par Brigitte Grondin-Pérez, professeure des universités et doyenne de l'UFR Sciences et technologies, et opposante à Frédéric Miranville lors du scrutin de 2020. Une liste qui met en avant "l'expérience" de ses 48 membres, dont des directeurs de composantes et d'unités de recherche, qui souhaitent "une gouvernance apaisée, avec des ambitions fortes pour la recherche et la vie étudiante."

"Développer l'offre de formation en lien avec l'insertion professionnelle, développer la recherche sur les enjeux territoriaux et internationaux, et revaloriser l'espace Campus" énumère Richard Lorion. Sur la gouvernance, il souhaite "sortir d'un fonctionnement binaire, et recréer un espace d'opportunité et de critique en interne."

L'accent est mis également sur "la précarité des personnels", pour lesquels sa liste promet "de la visibilité et un espace de confiance", notamment pour les contractuels. Elle souhaite encore "améliorer le reste à vivre étudiant" en renforçant les bourses et en développant la notion de "micro-campus", au plus près des usagers.

Quand sera connu le nom du nouveau président ?

Le prochain président, appelé à succéder à Frédéric Miranville, ne sera connu que le 17 février 2025. À cette date, le conseil d'administration composé en fonction des résultats du scrutin sera complété par les "personnalités extérieures" élues par le CA : un représentant du Conseil régional, un autre du Département, deux représentants des organismes de recherche et quatre autres désignés après un appel public à candidature. 36 membres au total, dont les représentants étudiants, qui éliront leur président.