ENTRETIEN. Le maître du tambour-kaf, Nicolas Moucazambo, un "père" pour une génération de percussionnistes réunionnais

Nicolas Moucazambo, percussionniste réunionnais hors pair aujourd'hui privé de mouvement, continue de transmettre son amour pour la musique.
De Sabouk à Trio Tambour, en passant par l’accompagnement de nombreux artistes locaux, malgaches et africains, Nicolas Moucazambo a passé sa vie à étudier, à jouer et à enseigner la musique. Rencontre avec le maître du tambour-kaf.

L’an dernier, on lui a diagnostiqué une SLA, une Sclérose Latérale Amyotrophique, connue sous le nom de Maladie de Charcot. Une pathologie dégénérative très agressive, qui prive aujourd’hui l’artiste de tout mouvement.

 

Transmettre la musique et plus encore

Reste sa parole pour continuer à transmettre et à guider ses plus fidèles élèves du Conservatoire à Rayonnement Régionale de La Réunion. Pour Nicolas Moucazambo, la musique est une façon de vivre, une façon de respirer. Tout musicien qui a l’amour de la musique a avant tout envie de jouer, d’être sur scène, et de partager avec ses dalons, avec le public.

L’enseignement, c’est différent. Cela ne lui est pas venu tout de suite, au départ il n’aimait pas trop, mais Nicolas Moucazambo a appris à aimer enseigner. Il estime que l’enseignement lui a apporté " plus de réponses pour moi-même ". A force de se question sur lui-même, il pense avoir réussi à transmettre cela aussi.

Nicolas Moucazambo, percussionniste réunionnais hors pair aujourd'hui privé de mouvement, continue de transmettre son amour pour la musique.

 

Faire résonner le tambour-kaf " le plus loin possible "

" Ma rencontre avec le tambour, c’est l’histoire d’une conversation avec le visible et l’invisible ", l’écrivain Sophie Hoarau cite Nicolas Moucazambo. Une parole qu’il est " très important " de reprendre selon elle, car il est celui qui a révélé le tambour-kaf "dans tout son sens", dit-elle.

Pour ce percussionniste d’exception, le tambour-kaf sera toujours reconnaissable car il est Réunionnais, un Réunionnais " qui a son propre son " qu’il faut faire grandir et résonner le plus loin possible.

Pour cela, il ne faut pas oublier d’où on vient, qui on est, lui qui se rappelle avoir été d’abord " attrapé " par le son d’un roulèr, conditionnant toute sa façon d’être et sa façon de jouer de la musique.

 

Des racines bien ancrées

Né sous un gros baobab dans le quartier de Château-Morange à Saint-Denis, Nicolas Moucazambo a toujours eu un rapport très particulier avec le pied de bois. " Ou connai, tambour lé fé avec un pied de bois ".

Aujourd’hui, c’est une génération entière de musiciens qui manifeste sa reconnaissance pour le travail accompli par Nicolas Moucazambo. Il est un "père" pour beaucoup d’entre eux, dans l’esprit africain du grand frère, estime-t-il.

Des racines auxquelles, le percussionniste a toujours été très attaché. Il aime à rappeler qu’en Afrique de l’Ouest, les forgerons sont ceux qui taillent le djembé et ceux qui ont le secret du feu et du fer. Son père était un forgeron, il travaillait le feu, la tôle, le fer.

Et d’ajouter : en Afrique, on dit une parole sans proverbe, c’est une parole sans sève. " Tant que le lion n’aura personne pour raconter son histoire, on racontera toujours l’histoire du chasseur ", dit-il, " moin ma parti rode l’histoire du lion, c’était moin ".

Nicolas Moucazambo, un passionné de percussion qui raconte son amour pour la musique, le son, le tambour.

 

A la découverte de soi-même

L’histoire, le mysticisme, ce que la percussion, le tambour apporte à un individu sur lui-même, sur les règles de vie en société, sont parmi les valeurs que Nicolas Moucazambo transmet à ses élèves.

Fadi Ali, percussionniste, l’un d’entre-eux, estime que les cours qu’il a reçu l’ont " conditionné " en tant qu’individu, bien plus que musicien.

 

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