Voilà bientôt trois mois que dure le conflit ukrainien, avec des conséquences jusque chez nous. Hausse des prix, difficultés d’approvisionnement... : ce vendredi 20 mai, la Chambre des métiers et de l’artisanat de La Réunion (CMAR) a fait le point sur la situation et présenté les résultats de son enquête sur les impacts de la crise ukrainienne sur l’économie artisanale. Une enquête réalisée du 2 au 8 mai auprès d’un panel de 340 entreprises artisanales volontaires sur l’île.
Les précisions de Bernard Picardo à Réunion La 1ère :
Le président de la Chambre des métiers et de l’artisanat, Bernard Picardo, est inquiet : “Il y a des secteurs qui sont plus touchés, comme l’alimentation ou le bâtiment, mais tous sont impactés par cette crise en Ukraine”. Selon le rapport de la CMAR, une entreprise artisanale sur deux est impactée par la guerre en Ukraine, avec une exposition à la crise différente d’un secteur à l’autre, alors qu'elles avaient déjà été fragilisées par la crise Covid.
Les entreprises de boulangerie, par exemple, sont 69% à rencontrer des difficultés, soit plus de deux entreprises sur trois. Alors qu'elles ne sont que 17% à exprimer des difficultés dans l’activité de mécanique automobile.
Deux tiers des entreprises confrontées à des augmentations de coût
Mais comment la crise impacte-t-elle ces entreprises ? Un tiers d'entre elles rencontre des ruptures ou un allongement des délais d’approvisionnement, quand deux tiers doivent faire face à des augmentations de coûts de production. Augmentations nombreuses, puisqu’elles concernent à la fois l’énergie, le fret, le carburant, les matières premières.
Tout ça fait qu’on est dans une situation très compliquée. Les coûts augmentent de tous les côtés et on doit maintenir un équilibre pour que ce ne soit pas le consommateur qui soit le plus impacté.
Bernard Picardo, président de la CMA
Regardez le reportage de Réunion La 1ère :
Tensions inflationnistes sur l'huile, le beurre, la farine...
En effet, l’artisanat doit faire face à des tensions inflationnistes qui ont des conséquences sur la production des artisans. Le prix de l’huile a bondi de 50%, celui du beurre de 32%, celui de la farine de 31%, ou encore la viande de 33%... Le tarif des emballages ou des couverts n’est pas en reste : +28%.
Dans le bâtiment ce n’est guère mieux : +54% sur le prix de l’acier et de l’aluminium, +36% sur le bois et les matériaux, d’après les chiffres de la CMAR.
Les causes de ces difficultés ?
Ces difficultés sont dues en grande partie à des effets d’aubaine chez les fournisseurs, ou à des tensions sur les marchés internationaux. Mais leur principale cause reste liée au trafic maritime perturbé (65%).
C'est donc sans surprise que les entreprises artisanales doivent s’adapter, en gelant leurs investissements pour 34% d’entre elles, en diminuant leurs marges, pour 72%.
La moitié des artisans déclare avoir été contrainte d’augmenter ses prix de vente.
Trois quarts des entreprises prennent sur elles malgré les augmentations des coûts. Mais on a effectivement une partie de nos secteurs qui ont été obligées d’augmenter leurs prix pour pouvoir tenir les équilibres et continuer à dégager des résultats.
Bernard Picardo, président de la CMA
Des mesures réclamées
Face à cette situation, les artisans attendent des mesures de soutien de la part du gouvernement, notamment des reports ou remises partielles de charges fiscales et sociales, ou des facilités de trésorerie. “Ca a été fait pendant la crise sanitaire”, commente Bernard Picardo, qui incite aussi les chefs d’entreprise à “ne pas rester seul et se rapprocher des services de la CMA pour qu’on puisse leur dire ce qui existe en terme de dispositifs”. Le plan de résilience économique et sociale, présenté en mars dernier, en fait partie.
Un secteur qui fait vivre 50 000 familles
Au-delà de ces mesures concernant directement leur trésorerie, près de la moitié des entreprises interrogées eux réclament une régulation des prix et un contrôle des abus tarifaires.
Car il en va, termine le président de la Chambre des métiers, de la survie d’un secteur qui fait vivre plus de 50 000 familles à La Réunion. Il en appelle à l’action des “collectivités qui peuvent aussi mettre en place des dispositifs d’accompagnement, pour qu’on puisse continuer à servir notre population à des prix raisonnables”.