Il a déjà parcouru 11 200 kilomètres. Le camping-car de la Fondation Père-Favron sillonne le Sud de l’île au départ de Saint-Joseph jusqu’à Saint-Anne dans l’Est et Saint-Paul dans l’Ouest. Mis en place en avril 2023, ce dispositif, le SAM (Service d’Accueil Mobile), répond à des critères bien spécifiques. Pour en bénéficier, plusieurs conditions. Être atteint de troubles neurocognitifs, habiter à Petite Île, Saint Joseph ou Saint Philippe. Et surtout, ne pas pouvoir se rendre sur l’accueil de jour de Ravine Blanche dans le Sud à Saint-Pierre. L'objectif : proposer une alternative aux accueils et hopitaux de jour présents sur l'île.
Regardez le reportage de La 1ère :
Un manque d’accueils de jour dans le Sud
Du lundi au vendredi, au départ de Saint-Joseph, jusqu’à quatre personnes alzheimer bénéficient de ce nouveau service. Aujourd’hui c’est au tour de Jean-Pierre et Roland, deux Saint-Joséphois. Atteints de la maladie depuis plusieurs années, ils ne peuvent se rendre en accueil de jour, faute de moyens de locomotion et d’une distance trop importante.
La fondation Père Favron dispose des deux seuls accueils de jour dans le bassin sud de l’île, à Bois d’Olive et Ravine Blanche à Saint-Pierre. Pour certaines personnes, il leur faut plus de deux heures afin de s’y rendre. Une mission compliquée aussi bien pour les malades que pour les aidants. Cette solution proposée par la Fondation Père Favron est une bouffée d'air frais, notamment pour ces derniers qui peuvent à nouveau "respirer" pendant une journée. "Je suis contente quand il part, ça lui permet de voir du monde car à la maison il ne fait que dormir, explique Marie-Christiane, la femme de Roland. Mais moi aussi ça me fait du bien, une fois par semaine, je sors en ville, je me repose moralement" avoue-t-elle.
“La problématique majeure dans le Sud c’est le transport, le temps passé dans les véhicules. Il a fallu mettre en place un accueil de jour mobile qui vienne directement vers le domicile des personnes âgées”
Cyril ArbaudDirecteur du pôle gérontologique Roger André, Père Favron
Un service complet
Une fois les bénéficiaires récupérés à leur domicile, direction un endroit "nature" propice aux promenade et pique-nique. "Aujourd'hui direction Saint-Philippe", annonce Catherine, accompagnatrice et Aide Médico Psychologique (AMP). Avec les bénéficiaires, elles sont deux pour conduire le camping-car et encadrer les sorties. Le matin elles s'occupent de récupérer les repas et organisent la journée avant d'accueillir les personnes alzheimer.
Jeux en plein air et cognitifs, tout est pensé pour aider les personnes alzheimer à se sentir intégrées. Jean Pierre et Roland quittent une à deux fois par semaine leur domicile et partent à l’aventure. L’objectif : aller dans un lieu insolite, et surtout, en plein air. A l’intérieur du camping-car, tout est compris : repas, couchettes, jeux, etc. Pour le plus grand plaisir de Roland et Jean-Pierre qui se sentent comme à la maison. "Quand on sort comme ça, ça me change les idées, explique Roland. C'est un peu comme-ci je partais en voyage. Quand je suis chez moi je peux rester une semaine sans voir personne", conclut-il.
“C’est la joie, ça me fait du bien de marcher la journée, en plus on voit des gens qu’on a jamais vu, on discute ensemble, ça fait plaisir”
Roland GrondinBénéficiaire du Service d’Accueil Mobile (SAM)
“Leur faire re-découvrir leur île”
Un service en plein air assuré de 8h à 15h. Au programme aujourd'hui : balade en bord de mer, repas et discussions avec les aidants. Une matinée bien chargée et un travail cognitif de tous les instants avec les bénéficiaires. "Le travail cognitif ça va être par exemple de discuter des plantes, de poser des questions, dialoguer, faire remonter leurs souvenir et pouvoir maintenir ce qu'il leur reste", explique Frédérique, aide-soignante et autre accompagnatrice aujourd'hui. “Il y a cette dimension de leur faire re-découvrir leur île, poursuit-elle. C’est vrai que ce n'est pas grand chose mais de voir cette joie sur leur visage c’est inestimable. Parfois on passe plusieurs fois au même endroit et pour eux c’est la première fois donc ça ne nous dérange pas d’aller plusieurs fois sur le même site", conclut-elle.
Un partage de connaissances et de savoirs qui s'étend sur toute une journée, la grande force de ce dispositif selon Catherine : "On a un partage toute la journée, du début à la fin. Parfois ils nous font aussi découvrir des choses", explique-t-elle.
Déjà des résultats positifs pour le SAM
Moment privilégié de la journée, le repas. Là aussi tout est assuré par la Fondation Père Favron. Au menu ce midi : riz cantonnais, poisson et poulet. Un moment d’échanges privilégié en petit comité qui porte ses fruits. Depuis son entrée au SAM, Jean-Pierre a retrouvé l’appétit et dix kilos en plus sur la balance.
“On passe un moment comme si on était en famille. C’est vraiment le moment de socialisation qui est important pour que ces personnes ne se sentent pas isolées. Parfois elles ne mangent pas chez elles car elles sont seules"
Frédérique EthèveAide-soignante
Un service expérimental prêt à s'étendre
Des bénéficiaires stimulés et des familles heureuses du résultat. 25 personnes bénéficient de ce service et déjà dix familles sont sur liste d’attente. Car pour ce service innovant, le coût n’est pas plus cher qu’une journée en accueil de jour. Comptez entre 39 et 50 € la journée au SAM, un prix similaire à celui de l’accueil de jour de Bois d’Olives. "L'objectif c'est d'orienter de plus en plus vers ce genre de dispositifs innovants et proposer de moins en moins des solutions tournées vers les EPHAD", témoigne Cyril Arbaud, Directeur du pôle gérontologique Roger André, Père Favron
Avec le Service d'Accueil Mobile, au total, quatre nouveaux services ont vu le jour à la Fondation Père Favron au sein du Service Expérimental de Répit des Aidants (SERA). Concernant le SAM, un appel à projet a été lancé pour la mise en place d’un deuxième camping-car, cette fois dans l’Est de l’île.