Il lui aura fallu près de 200 heures de travail pour raconter l’histoire de “Zolikèr”, un marmay de La Réunion qui se questionne sur son identité. L'artiste Méo a peint une fresque au lycée de Vincendo, mais elle fait polémique au sein du corps professoral.
Regardez le reportage de Réunion La 1ère :
Une fresque qui valorise La Réunion
Entouré de bann cardinal, son bertèl et su son roulèr, Zolikèr est au centre de cette nouvelle œuvre de Méo, réalisée dans l’enceinte du lycée de Vincendo. Mais un détail situé sur la première de couverture du dernier livre posé sur la pile offusque certains professeurs de l’établissement.
Cet élément, c’est une partie de l’histoire où le marmay i décide de rature son band’ livres l’école. Sur la pile de livre, il y a l’histoire de France. Et Zolikèr, le héro de l’histoire, li décide de rayer le titre de l’histoire de France et d’écrire “Zistwar La Rényon” dessus, mais que li oublie pas aussi l’histoire de France que le professeur la apprend’ à li. Mais li, li aimerait aussi que son l’histoire lé appris à l’école.
Méo, artiste
Les élèves soutiennent l'artiste Méo
Cette œuvre émane d’un projet du lycée s’intitulant “Celui qui oublie ses racines n’atteint jamais sa destination”.
Des centaines d’élèves passent quotidiennement devant cette fresque et ils ne voient aucune ambiguïté dans le message que l'artiste souhaite véhiculer.
“Je comprends le message parce qu’à l’école, on étudie que l’histoire de la France, l’histoire en général. Et, à aucun moment, on ne parle de La Réunion. Donc, c’est un beau message. Il faut aussi apprendre notre culture et d’où l’on vient”, exprime une élève du lycée.
“L’artiste a vraiment voulu montrer qu’on était à La Réunion, qu’on a notre propre histoire, notre propre culture et notre propre langue", lance un autre élève.
L'histoire au cœur de la polémique
Joint par téléphone, le proviseur souligne la non-conformité entre le projet validé et la réalisation effectuée. Par courrier, le chef d’établissement demande un correctif. Pour Méo, cela reviendrait à de l’autocensure.
Si mi fais ça, ou demande à mwin de modifier mon message. C'est un manière de dire amwin que zot lé pas d'accord ek sak mi pense. Mwin mi na aucun message politique. Ma pas incite bana à haïr la France.
Méo, artiste
"Même dans l'art vous n'êtes pas libres"
L’établissement a saisi le comité des Experts Nationaux des valeurs de la République. Ces derniers devront juger de la conformité de l’œuvre. Ce contrôle est dénoncé par certains députés qui se sont saisis du dossier.
Ce que je trouve assez choquant, c'est qu'on vienne censurer un artiste, alors que son œuvre n'est constitutive d'aucune infraction d'aucune sorte. Chacun est libre de l'interpréter à sa manière. Censurer ou s'auto-censurer, je pense que c'est le pire message que l'on pourrait envoyer à nos jeunes "même dans l'art vous n'êtes pas libres".
Emeline K/Bidy, députée de La Réunion
Même son de cloche pour le député Frédéric Maillot.
La censure, c’est la Gestapo de l’esprit. Méo est l’un des artistes militants les plus prodigieux de La Réunion. L’histoire retiendra qu’on a tenté, en 2024, de le censurer.
Frédéric Maillot, député de La Réunion
Une plaque explicative pour la fresque ?
Le proviseur attend de pied ferme les conclusions des experts avant de trancher. De son côté, Méo n’envisage aucunement de corriger sa fresque. Il se dit tout de même prêt à apposer une plaque explicative à côté de son œuvre.