Un an s'est écoulé depuis le drame, mais la douleur et la colère ne sont pas retombées. Venu assister mercredi 20 novembre au procès des mineurs ayant lancé le galet fatal à Kenya, sa compagne et mère de son fils, Damiano Parisi a fait part de son incompréhension face au positionnement des accusés et aux choix des poursuites retenues par la justice.
"À 14, 15 ans, on n'est plus des enfants"
"C'est la première fois que je rencontre les assassins de ma femme. Et je me rends compte qu'ils n'ont pas grand-chose dans la tête" déplore l'homme qui conduisait la BMW touchée par le projectile jeté depuis le pont de l'échangeur du Sacré-Coeur le 30 septembre 2023.
Des accusés qu'il se refuse à qualifier "d'enfants." "À 14, 15 ans, aujourd'hui, à l'époque dans laquelle on vit, avec internet, on est beaucoup plus évolué qu'à mon époque", estime le compagnon de Kenya.
"Ils ont tout organisé"
Qui exprime clairement sa déception d'avoir vu la justice requalifier en "violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner" les faits initialement qualifiés par le parquet en "assassinat".
"Ils ont tout organisé, c'était programmé", considère Damiano Parisi. "Quand on prépare un chariot pour pouvoir transporter des pierres, des munitions trop lourdes pour être seulement portées, et les jeter ensuite d'un pont... J'imagine que ce n'est pas comme jeter un caillou dans la mer ou en pleine campagne...
"Quand on jette des pierres d'un pont, on sait qu'il y a des voitures en dessous, pas des chars d'assaut."
Damiano Parisi, compagnon de Kenya
Pour ce conjoint éploré, il est évident que ces jeunes "avaient l'intention de tuer." Mais les réponses apportées à l'audience sont, pour le moment, loin d'être satisfaisantes.
"Ils ne savent rien. Aux questions du président, des juges, ils ne savent rien. Ils disent seulement que c'était un jeu", constate-t-il avec amertume.
"J'ai tout perdu"
Et d'évoquer les conséquences de ce drame sur sa vie, et celle de son jeune fils, trois ans et demi aujourd'hui.
"J'ai tout perdu. J'avais un très bon boulot, bien payé, une très belle vie. Depuis un an que je m'occupe de mon enfant, je n'ai plus de travail" décrit Damiano Parisi, encore bouleversé par la scène qu'il a vécu ce soir-là.
"Visions de guerre"
"J'ai eu des visions de guerre. J'ai vu ma femme sans son visage, sans les dents, sans les yeux", énumère le père de famille, qui s'en explique. "Je rentre volontairement dans le détail pour que ça choque tous les Réunionnais, c'est très important", insiste-t-il.
Le 19 novembre 2023, un mois environ après la mort de Kenya, une marche blanche avait été organisée à Saint-Denis, à laquelle Damiano Parisi et plusieurs dizaines de personnes avaient participé afin que "la violence gratuite cesse."
"Toute sa vie sans sa maman"
Avec ce procès qui s'achèvera demain, Damiano Parisi espère pouvoir "refermer cette page pour reprendre ma vie en binôme avec mon enfant." Bien conscient cependant que cela sera extrêmement difficile.
"La souffrance sera toujours là, pour moi et pour lui", conclut-il avec émotion. "Mon enfant va vivre toute sa vie sans sa maman, ce sera très compliqué."