Quatre Réunionnais sur dix sont frappés par la crise du logement. De plus en plus de personnes se retrouvent sans domicile et sont ainsi obligées de se faire domicilier par les CCAS et les associations agréées, explique, ce mercredi 23 avril, Matthieu Hoarau, invité de la matinale de Réunion la 1ère pour dévoiler le rapport 2024 de la fondation Abbé Pierre Réunion sur le mal-logement.
On considère qu’il existe 5 formes de mal-logement : le fait d’être dépourvu de logement personnel ; les difficultés d’accès au logement comme l’attente d’un logement social ; les difficultés pour se maintenir dans le logement ; les mauvaises conditions d’habitat ; les difficultés du parcours résidentiel.
De plus en plus de jeunes, de femmes, de personnes âgées
Le profil de personnes mal-logées est très large, il y a les catégories les plus précaires, qui n’ont parfois pas de ressources parce que droits sociaux ne sont pas ouverts, précise Matthieu Hoarau, directeur de la fondation Abbé Pierre Réunion.
" Ces dernières années, des catégories qu’on ne voyait pas ou peu sont en difficulté pour pouvoir se nourrir, se loger, se déplacer, se signer, qui viennent fréquenter nos lieux d’accueil de jour par exemple ", explique-t-il. Parmi eux, de plus en plus de jeunes, de femmes, de personnes âgées
Quatre Réunionnais mal-logés sur dix, en proportion, c’est deux fois plus que l’échelle nationale.
Regarder le reportage de Réunion la 1ère :
60 000 demandes d’hébergement d’urgence au 115
L’hébergement d’urgence ne fait plus face à l’urgence pour toute personne en situation de détresse sociale puisque l’hébergement est saturé.
Matthieu Hoarau, directeur de la fondation Abbé Pierre Réunion
Près de 60 000 demandes d’hébergement d’urgence auprès du 115 ont été enregistrées sur l’année, dont 16 000 non pourvues, " on n’a jamais eu un chiffre aussi important ", précise Matthieu Hoarau.
Parmi ces personnes-là, il y a des hommes seuls, des femmes seules, mais aussi des femmes avec enfants qui ne sont pas prises en charge, malgré une demande auprès du 115, insiste-t-il.
Un constat accablant
Le logement social est saturé, on construit peu de logements sociaux, on n’a jamais eu autant de demandeurs de logements sociaux et on n’a jamais attribué aussi peu de logements sociaux. 45 000 personnes sont en attente d’un logement social cette année, précise Matthieu Hoarau.
La difficulté de se maintenir dans un logement est une réalité forte, à savoir les ménages menacés d’expulsion pour impayé de loyers, faute de capacités financières suffisantes. La Réunion est l’un des territoires où les loyers sont les plus élevés de France, avec 15 euros du m², rappelle le directeur de la fondation Abbé Pierre Réunion.
Plus de 319 300 personnes vivent sous le seuile de pauvreté, à savoir 1 158 euros/mois, soit 36% de la population réunionnaise. En 2023, le taux de chômage était de 19% avec 153 400 demandeurs d'emplois, soit 2,7 fois plus que dans l'Hexagone.
De la difficulté de se maintenir dans un logement
35 000 ménages résident dans des logements trop petits. A La Réunion, le parcours résidentiel est particulièrement difficile, à savoir changer d’un statut de locataire du parc social au parc privé, ou encore devenir propriétaire. Pour certain, nait un sentiment d’assignation à résidence.
Quand on a attendu longtemps un logement social et qu’on sait que le logement qui va nous être attribué on va y rester pour 20 ans ou 30 ans parce qu’on n’aura pas la capacité de pouvoir aller ailleurs ou de devenir propriétaire, le choix est lourd à faire.
Matthieu Hoarau, directeur de la fondation Abbé Pierre Réunion
Des leviers existent par la politique du logement
Objectif zéro personne à la rue d’ici 5 ans pour la fondation Abbé Pierre Réunion, une ambition que l’insularité peut permettre, estime Matthieu Hoarau. Il prône l’usage de tous les outils du logement, en captant des logements privés à des fins sociales et adaptés au niveau des ressources des personnes, en mettant en place des maisons relais, des résidences sociales, des foyers jeunes travailleurs, de façon à ce que les personnes aient des réponses autres que la rue ou une place à l’hôtel.
Face à des indicateurs qui vont vers une dégradation très importante, " nous appelons à un sursaut de politique publique ", lance Christophe Robert, délégué général de la fondation Abbé Pierre. Depuis 7 ou 8 ans, beaucoup d'économies ont été faites par l'Etat sur le budget dédié au logement, avec la baisse des allocations logement, des budgets alloués aux bailleurs sociaux, ajoute-t-il.
Demain, jeudi 25 avril, une journée est organisée avec les décideurs, préfet, maires, députés, travailleurs sociaux, resposables d'associations, pour évoquer la reprise d'une dynamique, qui est " flottante " depuis 2 ans.
" C'est le moment de rebooster cette politique du logement. "
Christophe Robert, délégué général de la fondation Abbé Pierre