Les chiffres sont alarmants : l'an dernier, le Département a enregistré 6 192 informations préoccupantes pour violences intrafamiliales à La Réunion, soit 10% de plus qu'en 2022. Outre les adultes, ce sont aussi des enfants qui, chaque jour, subissent des situations dramatiques au quotidien.
"C'est un vrai drame, il nous faut faire reculer ce phénomène de violence", constatait le président du conseil départemental Cyrille Melchior.
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Que sont les violences intrafamiliales ?
La Réunion est fortement touchée par les violences intrafamiliales, confirme la procureure de la République Fabienne Atzori, rappelant la définition de ces faits. Des violences entre adultes, mais aussi physiques ou sexuelles à l'égard des enfants dans la famille, ou encore le simple fait pour un enfant d'être témoin de violences par un père sur une mère ou le contraire.
"Ce sont les êtres les plus fragiles de notre société"
Face à ce constat, la collectivité départementale qui a pour mission la protection de l'enfance, a réuni l'Etat, la procureure générale et le premier président de la cour d'appel, le rectorat, l'Agence régionale de santé (ARS) la Caisse d'allocations familiales (CAF) et plusieurs associations ce mercredi 21 février 2024, pour la signature d'un "plan départemental de prévention et de lutte contre les violences intrafamiliales en direction des enfants".
"Nous savons bien qu'il y a trop de violence dans les familles réunionnaises, qui touche les adultes, les femmes la plupart du temps, mais on oublie que parmi les victimes, il y a aussi les enfants. Ce sont les êtres les plus fragiles de notre société, il nous appartient de les protéger".
Cyrille Melchior, président du Département
Un plan de cinq axes stratégiques
L'Observatoire départemental de la protection de l'enfance, qui coordonne cette convention, a ainsi déterminé plusieurs axes d'action.
Les cinq axes stratégiques du plan de lutte contre les violences intrafamiliales à destination des enfants :
- Le repérage précoce des enfants victimes de violences intrafamiliales
- Une prise en charge adaptée sur le plan social, sanitaire et juridique de l’enfant victime pour une meilleure prise en compte de ses besoins fondamentaux
- Une culture commune en matière de prévention et de lutte contre les violences intrafamiliales
- Un plan de communication en direction du grand public et interprofessionnel
- Une gouvernance partagée
Détecter les situations précocement
En premier lieu, il s'agit de détecter le plus tôt possible la violence envers les enfants. L'attention sera aussi portée sur la prise en charge des petites victimes, en prenant en compte leurs besoins fondamentaux.
Aussi, la convention vise à mieux coordonner les politiques publiques pour que les uns travaillent avec les autres (associations, collectivités, Etat) dans un souci d'efficacité, souligne Cyrille Melchior, qui souhaite également agir pour éviter les récidives.
Renforcer la communication
En outre, tout un pan de la lutte concernera la communication auprès du grand public, "en allant vers les familles pour renforcer leur rôle éducatif, avec les caravanes d'accès au droit par exemple", achève le président du Département.
1 600 situations détectées par l'Education nationale
A l'heure actuelle, plusieurs acteurs participent déjà à la détection des cas de violences intrafamiliales chez les enfants : les PMI (protection maternelle et infantile), l'Education nationale, les médecins... entre autres.
Sur les informations préoccupantes enregistrées sur la dernière année scolaire, 1 600 émanaient par exemple de l'Education nationale. Un chiffre en augmentation de 18% sur les trois dernières années. "C'est beaucoup, mais ça veut dire aussi que la parole est ouverte, que les jeunes se confient, et qu'on est un des relais pour ouvrir cette parole", se félicite Karine Darlay, inspectrice d'académie représentant le recteur de La Réunion.
Le rôle de la justice "essentiel"
"L'intérêt de la charte est de créer une synergie entre les efforts de tous", souligne quant à elle la procureure de la République, rappelant que "le rôle de la justice est essentiel", puisqu'elle traite les repérages de violences, supervise les enquêtes en la matière, et porte l'accusation dans ces dossiers.
"Les chiffres sont préoccupants. Est-ce que cela signifie qu'il y a plus de violences ? Ou que notre dispositif de révélation, dans le scolaire, le médical, au conseil départemental... est plus efficace ? Je pense que c'est une conjonction des deux hypothèses"
Fabienne Atzori, procureure de la République
A noter que les mesures judiciaires, autrement dit les placements d'enfants en famille d'accueil, augmentent aussi de 10%. Un signe que la parole se libère, et que les actes violents envers les marmailles sont aussi de moins en moins tolérés.