Denis Kang, pionnier français du MMA

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15 ans de longévité, le Pride, l’UFC… La carrière de Denis Kang parle pour lui. Le combattant de MMA né à Saint-Pierre et Miquelon revient sur son parcours.

Sa carrière parle pour lui. Dans le panel des combattants de MMA français, Denis Kang fait figure d’avant-gardiste. Le Pride en 2005, l’UFC en 2009, The Super Korean a balayé le chemin, puis a montré la voie pour les futurs athlètes de son sport. Pourtant, quand on lui parle de son parcours, l'homme de 46 ans regarde en arrière avec humilité. "Je ne suis qu'un petit gars de Saint-Pierre qui, à force de travail et de détermination, a réussi à accomplir ses rêves. Ça montre que tout est possible."

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Car oui, tout a commencé sur le Caillou pour lui. Né d'une mère Saint-Pierraise et d'un père coréen venu dans l'archipel pour la pêche, le jeune Denis a obtenu ses premières licences de sportif dans l'archipel. Le judo avec Guy Lelorieux dans un premier temps, mais aussi la natation avec Yannick Arrossaména, pour lui donner la fibre. "En fait, j'étais avant tout un passionné de sport. Mais toujours avec un penchant pour les arts martiaux. J'étais fou des films de Bruce Lee, des jeux vidéo de combat comme Street Fighter. Et ça a vraiment conditionné mon rapport au sport et aux arts martiaux."

Guy, figure emblématique du club local du Butokuden Dojo, se souvient d'un élève qui n'avait déjà pas peur d'aller au combat.

Il était assidu, volontaire et surtout déterminé. Bien entendu, il n'était pas effrayé par le combat, il en était même friand.

Guy Lelorieux

"Je n'arrivais pas à me surpasser."

À dix ans, Denis et sa famille déménagent au Canada. Et c'est là que les choses sérieuses vont vraiment commencer pour le Saint-Pierrais. Sur une cassette vidéo, il découvre le MMA (arts martiaux mixtes) et tombe littéralement amoureux de ce mélange des genres. Une découverte qui intervient à une époque où le jeune homme avait du mal à aimer la compétition. "En fait j'aimais seulement le sport pour m'amuser. J'avais du mal à me surpasser. Puis j'ai découvert le MMA, et ça a été une révélation."

Pour s'initier, le natif de Saint-Pierre se perfectionne dans la lutte. À l’époque, le MMA est peu médiatisé. Pire, il est même décrié. Violent, peu encadré, il fallait être visionnaire, voire un peu fou pour envisager en faire carrière. Fou, Denis l'est peut-être un peu. "Ce sport n'avait vraiment pas une bonne image c'est vrai", rit-il. "Ça n'avait pas grand-chose à voir avec maintenant. Beaucoup de personnes ne prenaient pas ça au sérieux. Pour les gens, tu ne pouvais pas y dédier ta vie et ton corps."

Alors, voulant trouver un art martial le plus proche possible du MMA, Denis se tourne vers le hapkido. Un mélange de plusieurs techniques de combats. Grâce à ce sport il rencontre une personne qui va changer son parcours et qui va l'amener vers le ju-jitsu. "J'ai rencontré Marcus Soares quand il s'est installé à Vancouver. Et on s'est suivis, et il m'a accompagné toute ma carrière. Jusqu'à maintenant, il est avec moi."

S'expatrier pour passer un cap

Mais comment faire pour se jeter dans le grand bain ? L'athlète se souvient avoir rencontré des difficultés pour trouver des combats. Il fallait se débrouiller et être imaginatif. "Il n'y avait pas beaucoup de combats à l'époque. Heureusement, il y avait une grande communauté sur internet et sur des forums. C'est ainsi que j'ai réussi à faire des connexions, à trouver des combats, et à partir m'entraîner ailleurs."

Très vite, Vancouver devient trop petit. Denis s'entraîne tous les jours et se professionnalise. Boxe, combat au sol, préparation physique et mentale, rien n'est laissé au hasard. "

C'est devenu sérieux quand j'ai décidé d'y dédier ma vie et de m'entraîner tous les jours. Mais il fallait que je passe un cap alors je suis parti m'entraîner en Floride dans une équipe professionnelle, l'American Top Team.

Denis Kang

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S'en suivent pour lui des combats en Corée du Sud puis au Japon dans l'une des organisations les plus prestigieuses de l'histoire de la MMA : le Pride. "C'était pareil, voire mieux que l'UFC à l'époque."

Reportage de 2007 à l'occasion d'un passage dans l'archipel de Denis Kang.

©saintpierreetmiquelon

Le Pride, l'UFC et Georges Saint-Pierre

Sa carrière est lancée, Denis devient un combattant connu et reconnu. Au Japon, dans le pays des arts martiaux, le Saint-Pierrais s'épanouit. Les combats ont quelque chose de spécial au Pride. "Les gens qui ont regardé le Pride savent de quoi je parle. Le niveau de combat était très haut. La scène était riche et les combattants venaient de partout dans le monde. Le Pride axait vraiment leur travail sur le spectacle."

Du spectacle. Comme en atteste son combat contre Andrey Semenov en juillet 2005. À l’époque, les deux hommes s'affrontent pour une revanche après une bataille à Saint-Petersbourg où aucun des deux n'était sorti vainqueur. Cette fois-ci, le Franco-Coréo-Canadien bat son opposant. D'une manière plutôt spectaculaire. "En fait, je m'étais cassé la main. Donc j'ai usé de toute ma technique au sol pour gagner. C'est un souvenir dont je suis vraiment très fier aujourd'hui car il était très fort."

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Malheureusement, l'organisation nipponne va connaître quelques difficultés qui obligent Denis à trouver une porte de sortie. L'UFC apparaît donc comme une évidence. Il retrouve donc le Canada, et s'entraîne avec la légende québécoise du MMA Georges Saint-Pierre.

J'ai appris ce que c'était que de s'entraîner avec lui. Avant je croyais que je m'entraînais bien. Mais c'était faux. Georges Saint-Pierre ne laisse rien au hasard. La récupération, la préparation... J'ai beaucoup appris avec lui. Et nous sommes toujours en contact aujourd'hui.

Denis Kang

Son académie de combat à Vancouver

"Ce n'est pas parce qu'on ne combat plus, qu'on ne s'entraîne plus", tels sont ses mots quand on lui évoque son quotidien de combattant retraité. Tous les jours, même retiré de toute organisation professionnelle, il est à la salle. Pour s'entretenir, mais aussi et surtout pour développer les athlètes de son académie de combat à Vancouver. Pour lui, c'est comme rendre tout ce que le sport lui a donné. Recevoir pour transmettre ensuite. "Je m'estime très chanceux. Je n'ai jamais eu l'impression d'aller au travail. J'ai vécu de ma passion, et aujourd'hui même en étant de l'autre côté de la barrière, j'ai cette même reconnaissance."

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Il n'oublie pas non plus son archipel et compte revenir prochainement. Là où tout a commencé pour lui. "Ça fait quelques années que je ne suis pas revenu. Saint-Pierre, ce sont les souvenirs, j'aimerais bien revenir, ça me manque."