Alors qu’il devait entamer un lourd traitement médical à l’hôpital de Moncton suite à une évacuation sanitaire, un patient originaire de Saint-Pierre dit avoir dû rentrer sur l’archipel. Plusieurs examens médicaux ont, pourtant, confirmé un cancer à un stade avancé. Témoignage.
C’est un message posté sur les réseaux sociaux qui a mis le feu aux poudres mercredi soir. Evacué vers le Canada, Pierre Desdouets n’aurait pas pu être soigné à cause de difficultés administratives entre le CHU Dr Georges-L.-Dumont de Moncton et la Caisse de Prévoyance Sociale (CPS) de Saint-Pierre et Miquelon.
Mardi 1er novembre, Jean-Pierre Desdouets, son fils, poste sur Facebook un message alarmant, partagé à de nombreuses reprises.
La procédure est soudainement interrompue, alors que la chambre implantable, petit boîtier par lequelle doit passer le produit, a été posée sous la peau du patient. « Ils étaient prêts à intervenir, tout était en place. ». Même si les médecins locaux parlent d’une urgence à agir, le protocole est suspendu.
Pour Jean-Pierre Desdouets, il n’y a aucun doute, la CPS de Saint-Pierre et Miquelon est responsable. "Le problème, il n’est plus médical, c’est à cause de décisions prises à Saint-Pierre par des gratte-papier."
Il évoque des difficultés généralisées au sein de l'hôpital qui touchent à la fois les patients de Saint-Pierre et Miquelon et ceux des différentes provinces canadiennes, en dehors du Nouveau-Brunswick. « Il y a un problème au service oncologie sur la charge de travail avec des files d’attente qui sont longues. Il y a une tension au sein du service oncologie, voire des chirurgiens de Moncton. »
Pas question pour autant de rompre le partenariat avec le CHU car "il s’agit d’un problème ponctuel." Ecoutez l’entretien en intégralité. Olivier Corbobesse répond aux questions de Frédéric Dotte :
Un communiqué de presse commun de la CPS, de l’Agence Territorial de Santé (ATS) et du centre hospitalier François Dunant vient appuyer ce témoignage dans la journée : "Ce problème est dû à un litige entre certains spécialistes (notamment dans le domaine de l'oncologie) et la régie provinciale de santé, compte tenu entre autres de la charge de travail et d'une remise en question de l'assurance responsabilité médico-légale".
Etant donné la gravité de la maladie, les médecins canadiens auraient alors insisté pour débuter des soins en urgence. Une procédure déjà réalisée pour des patients de l’archipel par le passé, sans difficulté. "Tout ça, ça s’est arrêté aujourd’hui, à cause d’une remarque d’une personne de la CPS à un chirurgien thoracique suite à la pause d’un stimulateur cardiaque sur un patient de Saint-Pierre."
Jean-Pierre Desdouets poursuit : cette personne « a précisé à ce chirurgien qu’il avait eu de la chance que ça se soit bien passé parce que si ça s’était mal passé, il aurait pu finir devant le tribunal. » Ecoutez l'intégralité du témoignage de Jean-Pierre Desdouets, au micro de Claudio Arthur et Alain Rebmann :
Le Réseau Santé Vitalité auquel appartient le centre hospitalier Dumont explique à nos confrères de Radio-Canada que des négociations sont en cours. "On ne peut pas contourner la démarche de ratification d'une entente dans le but d'assurer de garder quelqu'un sur place pour demander des soins", indique Luc Foulem, le porte-parole du Réseau Santé Vitalité.
De son côté, Olivier Corbobesse parle d'une "mauvaise interprétation des règles de responsabilité médico-légale." D'après lui, les médecins sont couverts pour traiter les patients, d'où qu'ils viennent, "à partir du moment où la personne est soignée à Moncton, dans l'hôpital où l'assurance du médecin s'applique."
Mardi 1er novembre, Jean-Pierre Desdouets, son fils, poste sur Facebook un message alarmant, partagé à de nombreuses reprises.
"Le problème n'est pas médical"
Ayant bénéficié d’une évacuation sanitaire il y a deux semaine, le père, malade d’un cancer de l’estomac, a dû rentrer à Saint-Pierre et Miquelon, alors qu’il allait entamer un traitement dans le service oncologie du centre hospitalier de Moncton : un protocole de chimiothérapie d’une durée de 9 semaines, suivi d’une opération chirurgicale puis de nouvelles séances de chimio.La procédure est soudainement interrompue, alors que la chambre implantable, petit boîtier par lequelle doit passer le produit, a été posée sous la peau du patient. « Ils étaient prêts à intervenir, tout était en place. ». Même si les médecins locaux parlent d’une urgence à agir, le protocole est suspendu.
On est arrivés à Moncton sur un pronostic de guérison de 25%. Aujourd’hui, vu à la vitesse où ça va, c’est entre 10 et 5%, pas plus.
Pour Jean-Pierre Desdouets, il n’y a aucun doute, la CPS de Saint-Pierre et Miquelon est responsable. "Le problème, il n’est plus médical, c’est à cause de décisions prises à Saint-Pierre par des gratte-papier."
La CPS, « mauvais payeur » ?
Interrogé ce jeudi, le directeur de la CPS décline toute responsabilité dans le retour à Saint-Pierre du patient. Olivier Corbobesse dément catégoriquement que la CPS est un mauvais payeur : « j’ai moi-même vérifié auprès des services, il n’y a aucune facture en souffrance. »Il évoque des difficultés généralisées au sein de l'hôpital qui touchent à la fois les patients de Saint-Pierre et Miquelon et ceux des différentes provinces canadiennes, en dehors du Nouveau-Brunswick. « Il y a un problème au service oncologie sur la charge de travail avec des files d’attente qui sont longues. Il y a une tension au sein du service oncologie, voire des chirurgiens de Moncton. »
Pas question pour autant de rompre le partenariat avec le CHU car "il s’agit d’un problème ponctuel." Ecoutez l’entretien en intégralité. Olivier Corbobesse répond aux questions de Frédéric Dotte :
Olivier Cordobesse, directeur de la CPS
Un communiqué de presse commun de la CPS, de l’Agence Territorial de Santé (ATS) et du centre hospitalier François Dunant vient appuyer ce témoignage dans la journée : "Ce problème est dû à un litige entre certains spécialistes (notamment dans le domaine de l'oncologie) et la régie provinciale de santé, compte tenu entre autres de la charge de travail et d'une remise en question de l'assurance responsabilité médico-légale".
Communiqué CPS ATS CHFD 03.11.16
Cancer de l'estomac, stade IV
L'évacuation sanitaire vers l'hôpital de Moncton a pourtant bel et bien été validée par la CPS, après que le cancer de Pierre Desdouets a été diagnostiqué à l’hôpital François Dunant à Saint-Pierre. Pendant deux semaines, des examens sont réalisés par des spécialistes de l’hôpital Dr Georges-L.-Dumont. Ils viennent confirmer la mauvaise nouvelle.Etant donné la gravité de la maladie, les médecins canadiens auraient alors insisté pour débuter des soins en urgence. Une procédure déjà réalisée pour des patients de l’archipel par le passé, sans difficulté. "Tout ça, ça s’est arrêté aujourd’hui, à cause d’une remarque d’une personne de la CPS à un chirurgien thoracique suite à la pause d’un stimulateur cardiaque sur un patient de Saint-Pierre."
Jean-Pierre Desdouets poursuit : cette personne « a précisé à ce chirurgien qu’il avait eu de la chance que ça se soit bien passé parce que si ça s’était mal passé, il aurait pu finir devant le tribunal. » Ecoutez l'intégralité du témoignage de Jean-Pierre Desdouets, au micro de Claudio Arthur et Alain Rebmann :
Des menaces qui auraient encouragé les chirurgiens du service oncologie du CHU de Moncton à assurer leurs arrières, d’après Jean-Pierre Desdouets. « Leur assurance ne les couvrent pas en cas de préjudices avec un patient étranger. Ils sont seulement couverts pour les patients du Nouveau-Brunswick. » En attendant qu’un accord soit mis en place avec la CPS, ils refuseraient de prendre en charge patients de Saint-Pierre et Miquelon.
Le Réseau Santé Vitalité auquel appartient le centre hospitalier Dumont explique à nos confrères de Radio-Canada que des négociations sont en cours. "On ne peut pas contourner la démarche de ratification d'une entente dans le but d'assurer de garder quelqu'un sur place pour demander des soins", indique Luc Foulem, le porte-parole du Réseau Santé Vitalité.
De son côté, Olivier Corbobesse parle d'une "mauvaise interprétation des règles de responsabilité médico-légale." D'après lui, les médecins sont couverts pour traiter les patients, d'où qu'ils viennent, "à partir du moment où la personne est soignée à Moncton, dans l'hôpital où l'assurance du médecin s'applique."
Plusieurs semaines d'examens, et maintenant?
Rentré à Saint-Pierre mercredi soir, Pierre Desdouets espère être, de nouveau, pris en charge au plus vite à Moncton, où les médecins connaissent bien son dossier. Son fils craint qu'il ne soit redirigé vers un hôpital de l'hexagone. "Ca nous ferait perdre un temps précieux. Trois semaines de plus, c'est trois semaines de trop!"Le député de Saint-Pierre et Miquelon, Stéphane Claireaux, indique sur son blog, ce jeudi 3 octobre, avoir de nouveau « demandé au préfet que l’ATS joue pleinement son rôle de contrôleur et de régulateur en matière de santé sur l’archipel et dans le cadre du parcours de soins de nos compatriotes. » Un message qui fait écho à une lettre adressée au préfet en mars dernier.
Les évacuations sanitaires vers Moncton suspendues
Dans un communiqué, envoyé en fin d'après-midi, le préfet, également directeur général de l’ATS explique qu’il a été "convenu avec la Caisse de Prévoyance Sociale d’ajourner toute évacuation vers Moncton tant que l’établissement ne sera pas en capacité de répondre de façon satisfaisante à la prise en charge des patients Saint-Pierrais et Miquelonnais." Une enquête a également été ouverte pour faire la lumière sur les éléments qui ont conduit au retour de Pierre Desdouets à Saint-Pierre et Miquelon.
Communiqué de la préfecture 03.11.16