Perché au sommet du mât de 25 mètres de haut, Grégoire Potot, le boat-captain du multicoque Le rire médecin-Lamotte, donne ses instructions pour installer les nouvelles voiles. En contrebas, Luke Berry, le skipper, se démène pour attacher l’une d’elles. “On remplace les voiles de convoyage pour installer celles de course. Elles sont plus neuves, plus performantes, plus légères mais plus fragiles. Il faut donc les préserver au maximum” nous explique Grégoire Potot.
Le top départ de la Route des Terres-Neuvas ne sera donné que vendredi, mais la course a déjà commencé pour les différents équipages qui s’activent à mettre leur vaisseau en configuration course, après une première traversée de l'Altantique en convoyage. Les Ocean Fifty peuvent dépasser les 35 nœuds, soit plus de 60 km/h. Les navires doivent donc être les plus légers possible pour avoir le meilleur rendement, rien n’est laissé au hasard. “On a tout vidé pour ne garder que l’essentiel. On n’aura que nos vêtements sur nous, plus un change. J’ai même épongé ce matin les quelques centilitres d’eau dans les flotteurs" nous confie Luke Berry.
À quelques dizaines de mètres est amarré le Réalités sailing team, un Ocean Fifty nouvelle génération dont les courbes futuristes font penser à celles d’un avion de chasse. Ici aussi les voiles ont été changées par un équipement optimisé, plus fin et beaucoup plus aérodynamique. “Chaque détail compte” affirme Axel Nicoleau, le boat-captain en charge des opérations. Son navire est l’un des plus légers de la flottille avec 3,250 tonnes sur la balance, contre un poids réglementaire limite fixé à 3,200 tonnes.
Cardio, sophrologie, marathons et sommeil
Si les navires sont soignés jusqu’au bout du mât, les trinômes, qui feront la course à bord des Ocean Fifty, ont dû suivre une préparation physique et mentale rigoureuse tout au long de l’année. Pour Antoine Joubert, le co-skipper du Rire médecin-Lamotte, l’endurance et la tonicité musculaire sont primordiales. Par exemple, il faut mouliner à la force des bras plusieurs fois par jour pour hisser les voiles. Pour rester en forme, “je fais des sports nautiques, du cardio, pas mal de marathons. Cette traversée ne sera pas une épreuve de force très dure, il faudra plutôt être très endurant”.
En plus du physique, Luke Berry, son skipper, associe une préparation mentale avec un préparateur qui l’aide dans la gestion du stress et des cas d’avarie. Pour Fabrice Cahierc, le skipper du Réalités sailing team, les quelques jours avant le début de la course représentent un moment de grande concentration.
Je rentre dans la course, j’étudie la météo, je fais des exercices de respiration et il faut absolument respecter ses phases de sommeil.
Fabrice Cahierc, skipper du Réalités sailing team
Les navigateurs dormiront peu, environ 4 à 5 heures fractionnées par jour. Ils ont donc tout intérêt à emmagasiner des heures de sommeil.
"Ils brûlent beaucoup de calories donc c’est important qu’ils mangent"
Pour performer, il faut aussi compter sur les rations alimentaires quotidiennes. En course, Fabrice Cahierc peut perdre entre 3 à 4 kilogrammes. Pour assurer l’avitaillement de son Ocean Fifty, il peut se reposer sur Julia Raymond qui s’est chargée de faire venir les vivres depuis l’hexagone. Retranchée au fond de l’école de voile, la team manager prépare près de 70 repas à base de plats appertisés à réchauffer au bain-marie. Au menu : ratatouille, parmentier de canard, dahl de lentilles, brandade de cabillaud ou encore Lotte au kar gosse, la préférence de ses hommes.
“On a de la chance d’avoir une équipe pas trop difficile, ils aiment tout. Ils brûlent beaucoup de calories donc c’est important qu’ils mangent et qu’ils aiment ça” nous explique Julia Raymond. Au total, une cinquantaine de kilogrammes de nourriture et une centaine de litres d’eau doivent être embarquées en plus du matériel. Il faut donc gérer nombre de calories et nombre de kilogrammes pour ne pas trop lester le multicoque. Chaque détail compte pour performer, jusque dans l’assiette.