"A cause de l'ice, mon fils s'est suicidé". Un témoignage poignant

"Maman, je ne m'en sors pas, je dois de l'argent à des amis" a déclaré le fils de Lisiane, Teremu, avant de commettre l'irréparable. "C'est comme si on m'avait poignardée", affirme-t-elle.
Il s’appelait Teremu. Il avait 27 ans. Il y a deux mois, il a mis fin à ses jours, après des années d’addiction à l’ice. Juste avant, il a envoyé un dernier message à sa mère. Entretien exclusif et bouleversant qui est aussi un message envoyé aux autres parents.

30 kilos d’ice ont déjà été saisis depuis le début de cette année. C’est déjà + que l’année entière 2023. Et pendant que certains choisissent de tirer profit en important cette drogue très addictive, le trafic se répand en Polynésie où les toxicomanes sont livrés à eux-mêmes. Le quotidien avec la famille devient invivable. C'est le cas de Lisiane (prénom d'emprunt). Ella a accepté de témoigner. Elle a perdu son fils en début d’année. 

Le fils de Lisiane n'a pas été inquiété par la police et la justice. Les opérations anti-stups se sont multipliées ces dernières semaines, notamment au profit de l'opération "place nette" organisée avant les JO.

"Il est devenu très agressif, ce n'était pas son habitude"

 P.1ère Qu'est ce qui vous a mis la puce à l'oreille ?

"C'était quelqu'un de très gentil et de très doux auparavant. Mais quand il a commencé à consommer, ce n'était plus le même. Il me répondait brutalement. Il ne mangeait plus. La nuit, il avait la bougeotte, il ne dormait plus. C'est par sa copine que j'ai su qu'il prenait de l'ice. Au départ, il a nié. Puis il m'a répondu que c'était pour arrondir ses fins de mois".

"Maman, je ne m'en sors pas, je dois de l'argent à des amis"

P.1ère Vous vous êtes sentie démunie ?

"Oui car je vis seule  avec mes enfants, depuis que mon mari est décédé. Mais j'ai essayé de le raisonner. Je lui ai demandé où partait son salaire. Il m'aidait un peu à la maison, 5000 à 10 000 FCP par mois, mais il ne payait presque rien. Il avait son travail, il vivait chez maman. Je lui ai dit qu'il me faisait souffrir, qu'il fallait avoir des projets dans la vie qui pouvaient l'aider à s'en sortir : faire des voyages. Il n'a pas voulu m'écouter".

30 kilos d'ice ont déjà été saisis depuis le début de 2024.

"C'est comme si on m'avait poignardée"

P.1ère Vous vous êtes sentie coupable quelque part ? Vous avez tout essayé...

"Depuis qu'ils sont petits, mes enfants gèrent leur indépendance. J'ai travaillé en horaires décalés souvent, et il n'y avait personne pour pouvoir les surveiller. Cependant j'étais là pour les éduquer, mais quand ils sont plongés dans l'ice on ne peut rien faire. On peut seulement prier. Pour lui, cette drogue était un loisir. Il se soulageait la conscience et ses problèmes comme cela..Quand il est parti, c'était une douleur insurmontable".

Son fils avait consulté un psychologue, mais avait rapidement abandonné son suivi. Sa mère a assisté, impuissante, à sa longue descente aux enfers.

P.1ère Il avait changé physiquement ?

"L'ice l'a beaucoup marqué. Il a pris un coup de vieux. Il avait des cernes, il avait maigri. Cela me faisait mal. Quand il est tombé dans cette spirale, il n'avait plus d'argent, plus de contrôle. Il n'a même pas écouté son parrain, mon frère. A un moment donné, quand un consommateur d'ice n'a plus d'argent pour se ravitailler, il va voir les dealers pour devenir lui même revendeur".

"Maman, je ne m'en sors pas, je dois de l'argent à des amis" a déclaré le fils de Lisiane, Teremu, avant de commettre l'irréparable. "C'est comme si on m'avait poignardée", affirme-t-elle.

"Maman, je t'aime. Pardon pour ce que je vais faire"

P.1ère Quel est le dernier message qu'il vous a envoyé ?

"Pardonne moi pour tout ce que j'ai dis ou fait. J'ai gâché ma vie. Je t'aime. Quand il est décédé, je me  suis adressée aux jeunes à la veillée pour tenter de les sensibiliser. Il y eu beaucoup de pleurs, mais cela ne les empêche pas de continuer. L'un d'entre eux a tout de même demandé pardon à sa maman, quand il a su que mon fils était décédé". Et elle ajoute, en colère, "la plupart des gens qui vendent de l'ice, ils sont d'un milieu plutôt aisé. C'est à croire qu'ils n'ont pas assez d'argent encore. Ils veulent toujours plus. Mon fils, lui, ne pouvait pas s'en sortir".

Il n’existe toujours aucun centre de désintoxication pour soigner les toxicomanes, en Polynésie. Aucune association non plus, de lutte contre les drogues. Parents et familles, restent seuls face à l’addiction.