Féminicides : des associations féministes des Antilles crient leur "Colère" !

Slogan inscrit sur les murs par ceux qui dénoncent les féminicides.
La construction patriarcale, très présente dans notre société et qui conduit à une récurrence des féminicides, peut être combattue, jusqu’à éradication. C’est une question d’éducation et de mobilisation commune des forces de l’ordre, de la justice, des associations, ou encore des écoles. En finir est un "objectif réaliste", estiment les Féministes des Antilles qui, dans une lettre ouverte intitulée "Notre colère", dénoncent l’assassinat d’une jeune femme de 28 ans par son conjoint, à Capesterre-Belle-Eau, ainsi que les nombreuses autres violences sexistes et sexuelles.

Les Féministes de Guadeloupe et de Martinique se sont alliées pour dire stop aux féminicides, dans nos îles. Dans une lettre ouverte intitulée "Notre Colère" les adhérentes aux associations Koumbit Fanm Karayib, FORCES, Solidarité Femmes Guadeloupe, #Nous Toutes Guadeloupe et Culture Égalité montent au créneau pour dénoncer ces faits bien trop récurrents.

Elles rappellent que la victime assassinée le 28 mai dernier par son compagnon, à Capesterre-Belle-Eau, "a été tuée parce qu’elle est une femme et qu’elle avait décidé d’échapper à cet homme, après de multiples violences". Pour ces militantes, "les violences conjugales ne sont pas des différends ; ce sont des atteintes à la dignité, à la sécurité, à l’intégrité et à la vie des femmes".

STOP à la culpabilisation des femmes !

La présidente de l’association FORCES prône une prise de conscience, de part et d’autre, afin que ce phénomène soit éradiqué ou, a minima diminue en conséquence.
Le but est de permettre aux femmes de vivre comme elles l’entendent.

Il faut que les femmes puissent vivre en toute paix et en toute sérénité. Nous sommes dans une société où la violence envers les femmes est quotidienne et s’inscrit dans la durée. Le législateur a fait beaucoup d’effort pour protéger les femmes, néanmoins, le phénomène perdure. Malgré ces avancées, malgré les associations qui ne ménagent ni leur temps, ni leur peine, nous sommes dans une situation qui perdure, voire dégénère et s’amplifie. Il faut absolument trouver des solutions pour protéger davantage les femmes.

Christiane Gaspard-Méride, présidente de l’association FORCES

Selon Christiane Gaspard-Méride, on peine, aux Antilles, à sortir de l’image de la femme coupable, de l’image de la femme qui, peut-être, est responsable de ce qui lui est arrivé.

La société a changé, les choses ont évolué. Mais, force est de constater que, c’est presque culturel chez nous, on reporte toujours sur la femme la cause du mal-être, la cause du geste. Et, souvent, les femmes victimes de violences elles-mêmes culpabilisent, puisqu’elles vivent dans une société qui ne reconnaît pas encore suffisamment leur autonomie, leur droit à disposer de leur corps, etc.

Christiane Gaspard-Méride, présidente de l’association FORCES

De tels a priori doivent absolument être combattus, affirme la militante, pour atteindre une harmonisation homme/femme, basée sur le respect.

Ce n’est pas une utopie. C’est un désir légitime, que le couple homme/femme trouve son harmonisation. Parce que c’est toute la famille qui en souffre, notamment les enfants.

Christiane Gaspard-Méride, présidente de l’association FORCES

STOP au patriarcat !

La lettre ouverte "Notre colère" interpelle les hommes sur "l’urgence d’un changement de comportement face à la situation dramatique", dans nos territoires.

La femme (et son corps) n’est pas la propriété de son conjoint. Elle n’est pas un objet qu’il peut "posséder, marquer, ravager, sacrifier, sur lequel il a un droit de vie ou de mort", comme le système patriarcal le suppose. Soumettre, contrôler, dominer, terroriser, sanctionner, parfois jusqu’à la mort sont des schémas inégalitaires qui ne doivent plus exister dans notre société.

En Guadeloupe, une femme sur cinq est victime de violences, dans sa vie conjugale ; c’est le cas d’une sur quatre, chez les 20/29 ans. Une femme sur trois subit des violences psychologiques.

Depuis le début de l’année 2024, deux enquêtes pour meurtre sont en cours dans l’archipel ; les conjoints ou ex-conjoint des victimes sont suspectés.

Dans l’Hexagone et sur l’ensemble des territoires français, chaque année, peu ou prou, 120 femmes sont assassinées. Le terrorisme conjugal, crime de masse, s’avère être une guerre contre les femmes par son ampleur. Car ce sont bien les hommes qui tuent, c’est donc un problème d’hommes, de conception de la masculinité et d’éducation au respect du corps et de la dignité des femmes.

Extrait de la lettre ouverte "Notre colère"

PLUS d’aide, plus de considération !

Les Féministes sont en colère, aussi parce que ce crime aurait certainement pu être évité, "la police étant déjà intervenue plusieurs fois au domicile du couple, pour des violences conjugales".

Généralement, les violences surviennent progressivement dans le couple ; elles sont de plusieurs ordres : verbales, physiques, psychologiques, économiques, administratives, ou encore sexuelles. Les alertes sont donc nombreuses, au fil du temps.

Mais, quant à la batterie d’outils qui peuvent être déployés, la Guadeloupe reste sous-dotée, de l’avis des Féministes. Les brigades spécialisées de police et de gendarmerie sont jugées insuffisantes. Faute de financement et de pérennisation des budgets alloués, les associations manquent de professionnels dédiés à l’accompagnement des victimes.

Les rédactrices de la lettre "Notre colère" prônent "une action publique forte, continue et globale", notamment d’éducation des garçons et des filles.