Ce samedi 25 février 2023, plusieurs dizaines de Guadeloupéens se sont rassemblés au cimetière de Capesterre-Belle-Eau. Ils s’étaient donné rendez-vous à 10h, pour rendre hommage à Sonny Rupaire, "on gran konbatan" à leurs yeux. Ceux qui honorent sa mémoire entendent faire en sorte que son œuvre soit connue des jeunes générations ; ils assument donc un devoir de transmission.
Un homme engagé
Le poète et militant nationaliste Sonny Rupaire est décédé il y a 32 ans, jour pour jour, l’année de ses 51 ans. Cet humaniste a largement contribué à la reconnaissance de la langue créole, jusqu’au sein des écoles où il a enseigné. Il est l’un des fondateurs du parti de l’Union Populaire pour la Libération de la Guadeloupe (UPLG) qui, dès sa création en 1978, prône l'indépendance. Il est aussi à l’origine, avec d’autres camarades, du syndicat Union générale des travailleurs de Guadeloupe (UGTG).
Son arme de prédilection était la poésie ; il l’a maniait pour revendiquer, dénoncer et/ou pousser à la réflexion. Pour ses écrits, dont le poème "Les Dameurs" (1957) dans lequel il décrit la cruauté de l’esclavage, ou encore le recueil "Cette igname brisé qu’est ma terre natale" (1960-1970), il a obtenu plusieurs prix littéraires.
Et comment ne pas évoquer son engagement aux côtés du peuple Algérien, alors en guerre contre la France. Une position qui lui a valu une condamnation, en 1963, à Bordeaux, pour insoumission ; il a été amnistié en 1971.
Hommage ce 25 février 2023
Ce samedi matin, gerbe de fleurs en main, brandissant le drapeau de l’UPLG, les militants (mais pas que) ce sont rendus sur sa tombe, sur laquelle une plaque reprend ses mots : "Jou nou ké mété a jounou pòkò vwè jou !" (Traduction : "le jour où on se mettra à genou n’est pas arrivé !").
Plusieurs personnes présentes ont alors pris la parole, pour évoquer ce grand homme Capesterrien ou pour lire ses écrits.
Extrait :
Pour l’ancienne secrétaire générale de l’UPLG, Marie-Christine Myre-Quidal, entretenir le souvenir de Sonny Rupaire est très important :
Sonny a été notre formateur, quelque-part. Il est membre fondateur de l’UPLG mais, au-delà de l’aspect politique, c’est également un grand poète. Sonny est connu de partout et, en tant que Capesterrienne, je suis fière que ma commune ait eu un grand homme tel que lui (...).
Marie-Christine Myre-Quidal, ancienne secrétaire générale de l’UPLG
Nathalie Minatchy, porte-parole de l’Alyans Nasyonal Gwadloup (ANG), a été marquée par l’homme qu’était Sonny Rupaire ; ce, à plusieurs titres :
J’ai connu Sonny alors que j’étais toute petite. Sonny faisait partie des amis de mon père et Sonny a, en quelques-sortes, guidé mes pas dans la lutte ; on peut dire cela ainsi parce que, petits, on regardait Sonny avec beaucoup d’admiration, d’une part pour ce qu’il était (l’écrivain, le poète, etc.), mais aussi l’ami de la famille, une personne qui avait toujours énormément de tendresse envers les enfants (...).
Nathalie Minatchy, porte-parole de l’ANG
Luc Reinette, membre du Comité international des Peuples Noirs (CIPN), se réjouit de constater que l’assistance est plus importante d’une année à l’autre :
Au fil des années, les personnes qui viennent se reconnaissent en Sonny et le voient comme un repère (...).
Luc Reinette, membre du CIPN
La mairie de Capesterre-Belle-Eau a donc accepté l’idée d’ériger une statue de Sonny Rupaire dans la commune. Les militants espèrent la concrétisation de ce projet, d’ici l’année prochaine.