Le 2 janvier 2023, le pôle de santé publique du tribunal judiciaire de Paris a prononcé une ordonnance de non-lieu dans l'affaire du chlordécone aux Antilles. Une issue qui intervient près de 17 ans après le dépôt des premières plaintes et plusieurs années d'enquête des magistrats instructeurs.
Si ces derniers ont admis que l'affaire relevait bien du scandale sanitaire, ils ont cependant conclut qu'il était difficile d'apporter la preuve pénale des faits dénoncés.
En Guadeloupe, comme en Martinique, cette décision est vécue comme un camouflet et bien que plusieurs personnalités politiques (des deux îles) l'aient amèrement regretté, aucun positionnement concret n'est venu soutenir ce concert plaintes.
Et c'est justement cela que le CAGI veut changer en amorçant la réflexion par une conférence. Le postulat de départ est le suivant : puisque ce sont des décisions politiques qui ont engendré le "crime", alors sa réparation devrait aussi être politique.
Fred Réno - Professeur de sciences-politiques
La question du positionnement politique est d'autant plus cruciale qu'elle s'est révélée être une problématique clé de ce dossier, où les garants de l'intérêt général n'ont pas toujours rempli leur mission comme le dénonce vertement l'élu écologiste Harry Durimel.
La mobilisation comme moyen de pression
Lors de la conférence, une des pistes évoquées par les invités, serait une mobilisation franche et massive de la population des deux îles. Faire en sorte que la rue, modifie l'agenda de la représentation politique en la forçant à se positionner sans équivoque. D'autant que, sur l'affaire de la pollution à la chlordécone, le "combat de la vérité a été gagné" selon Harry Durimel. En effet, une fois le secret de l'instruction levé, les citoyens pourront connaître plus précisément les tenants et les aboutissants du dossier.
"Notre combat avait deux objectifs, la vérité et la justice. Aujourd'hui nous avons gagné le combat de la vérité car nous savons tout sur le chlordécone notamment grâce à ce volumineux dossier que nous avons monté pendant ces 17 années d'enquête. N'importe quel citoyen, une fois le secret de l'instruction levé pourra intenter un procès, car on sait tout, on connaît toutes les combines."
Harry Durimel, élu écologiste, maire de Pointe-à-Pitre
Il appartient donc aux citoyens de choisir la forme et le moment de la mobilisation, à condition qu'ils en aient envie. Dans un contexte de lassitude globale et de résilience, les foules sont bien moins promptes à se lever qu'auparavant. Dès lors, l'initiative revient aux politiques qui auront, selon les experts du CAGI, la mission de se réunir afin d'ouvrir, avec l'État, l'épineux dossier des possibles réparations.