Mardi matin (6 février 2024), le préfet a réuni tous les acteurs de la filière canne-sucre de l’archipel guadeloupéen, à Basse-Terre, notamment les signataires de la convention-canne 2023-2028.
Tous espèrent que la campagne sucrière 2024 sera bonne, après la dernière année qui s’est révélée catastrophique pour les planteurs.
Un bilan 2023 désastreux
La récolte 2023 a été jugée désastreuse. Elle a été perturbée par de nombreux facteurs : les conditions climatiques, la faible richesse saccharine, ou encore le démarrage tardif de la récolte, qui s’est d’ailleurs terminée le 15 août.
Et, malheureusement, ces aléas sont susceptibles d’avoir des conséquences sur les cannes sur pied en 2024, peut-être trop jeunes pour être coupées, du fait de leur cycle de croissance.
C’est vraiment une année qui a été mauvaise à tous points de vue. Effectivement, on a une récolte qui a commencé tard l’année dernière. Est-ce que les cannes que nous avons maintenant sont déjà bonnes à couper ? Je ne sais pas. Est-ce que, comme elles sont trop jeunes, elles n’ont pas de richesse ? Nous avons beaucoup d’interrogations en suspens. Quoi qu’il en soit, selon ce qui a été dit a exprimé durant la réunion, tout le monde est prêt (...).
Yannick Kindeur, administrateur des Jeunes Agriculteurs, membre du CA de l’interprofession Iguacanne
Les prévisions 2024
Selon les premières estimations, l’usine sucrière de Gardel, à Moule, devrait recevoir 405.000 tonnes de canne, soit l’équivalent de ce qui a été livré l’an dernier.
L’usine de Grande-Anse, à Grand-Bourg de Marie-Galante, mise sur une augmentation de 15% de la récolte, par rapport à 2023, soit 62.000 tonnes.
Mais des ardoises restent à effacer.
Certaines subventions entrant dans le prix de la tonne de canne n’ont toujours pas été payées, pour la campagne précédente. C’est le cas des aides régionales.
La Région Guadeloupe fait partie des signataires de la convention canne. Elle s’est engagée à verser une aide de 2€ par tonne de canne (pour les 500 premières tonnes de chaque producteur), plus 5€ supplémentaires pour les planteurs de Marie-Galante (qui sont privés de la prime bagasse de 11€).
Promesse a été faite, mardi : les versements correspondants devraient intervenir d’ici un mois.
Sur la « Grande Galette », le choix de la collectivité est de financer davantage les planteurs de canne, afin d’obtenir une production de qualité. L’enveloppe allouée à la sucrerie rhumerie de Marie-Galante (SRMG) a donc été revue à la baisse. Jusqu’en 2022, la Région versait chaque année 850.000€ à l’usinier, en complément du 1,4 million d’euros apportés par l’Etat. Depuis, la collectivité a réduit nettement son soutien financier, qui disparaîtra en 2025.
Cette aide va être versée au début du mois de mars, du moment que nous, en Région, on aura l’autorisation de mandater. On est dans une période où on a suspendu les mandatements, préparation budgétaire oblige (...).
Benjamin Moustache, directeur de la croissance verte à la Région
La Région a, par ailleurs, décidé d’entrer dans le capital de la SRMG.
Un secteur toujours non équitable, selon certains planteurs
Un représentant du Collectif des planteurs a également été convié à la réunion de mardi. L’an dernier, ce groupe de producteurs s’était mobilisé en bloquant l’usine Gardel, estimant insuffisante la revalorisation du prix de la tonne de canne, actée dans la convention par les syndicats agricoles. Le Collectif réclame toujours une augmentation de la part payée par l’usinier.
L’état d’esprit du collectif n’a pas changé, puisque la situation n’a pas changé. On se rend clairement compte que le système économique du secteur canne n’est pas viable puisque, après calculs, nous nous rendons compte que nous ne touchons moins que le SMIC, alors que nous sommes des chefs d’entreprise. En tant que tel, on ne peut pas se contenter de 1275€ l’hectare (...).
Wilhem Monrose, porte-parole du Collectif des planteurs
Les planteurs, qui réclament un partage équitable de la richesse émanant de la filière canne, comptent sur le préfet pour arbitrer leurs échanges avec les usiniers, qu’ils accusent de bénéficier d’un système monopolistique.
Ni le préfet, ni le président de l’Iguacanne n’ont souhaité s’exprimer, à l’issue de cette réunion.