Conditions indignes d’incarcération à Baie-Mahault : le ministère de la justice renvoyé à ses responsabilités

Le centre pénitentiaire de Baie-Mahault, a été une nouvelle fois, le théâtre d'une violente agression
Surpopulation et exiguïté, installations électriques défectueuses, absence de rangements et de poubelles adéquates... Parce qu’il reconnaît les conditions de détention sont indignes, au sein du centre pénitentiaire de Baie-Mahault, le juge des référés ordonne au ministre de la Justice de remédier à cette situation, à court terme, "dans l’attente d’une solution pérenne". Ainsi a statué le Tribunal administratif de la Guadeloupe, suite à une requête déposée par la section française de l’Observatoire international des prisons.

La section française de l’Observatoire international des prisons, qui dénonce les conditions de détention au sein du Centre pénitentiaire de Fonds Sarail, à Baie-Mahault, a obtenu gain de cause auprès du Tribunal administratif de la Guadeloupe.
Dans son ordonnance, datée du 27 juin 2024, le juge des référés enjoint au Garde de Sceaux de prendre des mesures dans les meilleurs délais.

Des conditions de détention indignes

Près de 700 détenus sont incarcérés à Fonds Sarail, alors que l’établissement à une capacité théorique d’accueil de 540 places. La surpopulation carcérale impacte particulièrement le quartier de la maison d’arrêt pour hommes où, actuellement, 126 prisonniers dorment sur des matelas posés au sol. Ils partagent des cellules standards qui font environ 8,6 m2, comprenant une salle d’eau.

Le juge acte des conditions de détention indignes à Baie-Mahault, sur plusieurs points, au niveau de l’espace vital des détenus d’abord et en tout premier lieu (...). L’espace vital par personne y est donc de moins d’1 m2. Ça, selon les normes de la Convention européenne des Droits de l’Homme, c’est automatique, on a une violation des droits fondamentaux des détenus.

Maître Antoine Le Scolan, avocat de la section française de l’Observatoire international des prisons

Les requérants rappellent, conscients qu’il est bon de le marteler, qu’une peine d’emprisonnement doit impacter uniquement la liberté d’aller et venir des détenus, mais aucun autre de leurs autres droits et libertés fondamentaux.

L’ordonnance du juge des référés

Dans sa requête, l’avocat de l’Observatoire international des prisons a formulé 42 mesures, touchant à la fois aux droits des détenus, à leurs conditions de détentions et à la surpopulation. 

Le juge des référés, conformément à son champ d’action, n’a retenu que quatre mesures, toutes ayant un caractère urgent et non structurel.

Il est question des installations électriques qui doivent être aux normes et qui doivent être fonctionnelles. Il parle aussi, et ça peut paraître bénin, des étagères dans les cellules ; parce que, quand on est à trois dans 8m2, il n’y a pas de place pour les affaires, on a des linges suspendus partout et, donc, les étagères, c’est la moindre des choses pour pouvoir s’organiser en cohabitation, dans une toute petite cellule. Il évoque également la mise en place de poubelles à couvercle dans les cellules.

Maître Antoine Le Scolan, avocat de la section française de l’Observatoire international des prisons

Ces mesures peuvent apparaître, de prime abord, superficielles ; mais elles contribueront à rendre aux détenus la dignité et la sécurité qu’ils ont en partie perdues, à cause de leurs conditions de détention choquantes.

Ce juge-là ne peut prendre que des mesures d’urgence, donc qui peuvent être mises en place à très court terme. Tout ce qui est d’ordre structurel, il ne peut pas le mettre en place. Deux solutions : soit on en reste là, soit on réfléchit à d’autres actions judiciaires, pour transformer cette requête en des demandes plus structurelles, sur le long terme.

Maître Antoine Le Scolan, avocat de la section française de l’Observatoire international des prisons

L’observatoire et ses partenaires, dont la Cimade, doivent peaufiner leur stratégie en ce sens.

Concernant les quatre mesures sur lesquelles le tribunal rappelle le garde des Sceaux à l’ordre, l’administration pénitentiaire prétend avoir un programme global. Reste à voir comment vont se traduire les réponses apportées aux problèmes pointés du doigt. L’avocat annonce qu’il sera particulièrement attentif à leurs mises en œuvre.