CORONAVIRUS : l'exercice du droit de retrait est très cadré

Vous avez peur d'être contaminé au Covid-19, sur votre lieu de travail ? Ce seul argument ne peut suffire à être autorisé à faire valoir votre droit de retrait, selon l'avocat, Me Jérôme NIBERON.

Une question, une réponse*


Léa (nous l'avons appelée ainsi, pour respecter son choix d'anonymat) est caissière dans un magasin, où elle ne se sent pas en sécurité. En ces temps de pandémie due au coronavirus, elle voit au quotidien les clients faire "n'importe quoi". Léa souhaite faire valoir son droit de retrait. Mais sera-t-elle payée ? Question posée à Maître Jérôme NIBERON, avocat à la SCP Morton & associés et spécialiste du droit du travail :En somme, selon l'avocat Me Jérôme NIBERON, la pandémie ne justifie pas l'exercice du droit de retrait, par le salarié.

Ce n'est pas parce que tout le monde peut-être victime d'une infection au coronavirus, que tout le monde peut se prévaloir du droit de retrait.
Me Jérôme NIBERON

En revanche, l'employeur a l'obligation de veiller à la sécurité de son personnel ; obligation qui ne lui incombe pas vis-à-vis de ses clients.
Ainsi, le chef d'entreprise doit mettre en oeuvre toutes les mesures nécessaires pour que son personnel soit protégé. Dans l'actuelle situation inédite, il s'agit de l'application des mesures barrière, la distanciation, l'accès à des équipements d'hygiène (lavabo, savon, gels hydroalcoolique, etc.) ou encore des gants, si nécessaire.
 

Dans quels cas le droit de retrait est justifié... ou pas ?


Le droit de retrait peut s'exercer à deux conditions :
  • la situation de travail présente un danger grave et imminent, pour la santé ou la vie du salarié
  • le salarié constate une défectuosié dans les système de protection
Des précisions sont apportées par l'administration française quant à la définition des termes "grave" et "imminent".

Un danger est « grave » s'il représente une menace pour la vie ou la santé du travailleur (une maladie ou un accident grave voire mortel).

Un danger est « imminent » si le risque peut survenir immédiatement ou dans un délai proche.

Par ailleurs :

Dans le contexte du coronavirus, si l'employeur met en œuvre les recommandations du gouvernement, les conditions d'exercice du droit de retrait ne sont pas réunies sous réserve de l'appréciation souveraine des tribunaux. En principe, le travailleur n'a pas alors un motif raisonnable de penser que sa situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.
Si ces recommandations ne sont pas suivies par l'employeur, alors le travailleur peut exercer son droit de retrait jusqu'à ce que celles-ci soient mises en œuvre.

Exemples de mesures de protection qui incombent à l'employeur


Concernant les caissiers ou les guichetiers des établissements recevant du public, on a pu voir ériger, ici et là en Guadeloupe et ailleurs, des vitres en plexiglas, entre les opérateurs et les usagers.
Des marquages au sol sont aussi utilisés, pour vivement inciter les personnes à rester à plus d'un mètre les unes des autres.
Des écriteaux permettent de rappeler aux clients les règles à respecter.
Quand le public n'a pas le comportement approprié, il est toujours possible de recadrer les individus ; des vigiles peuvent veiller au grain.

Dans certains secteurs professionnels, les gestes barrières sont difficiles à appliquer


Il existe des secteurs professionnels où la règle de distanciation ne peut être respectée, parce que, par exemple, les salariés évoluent dans des milieus confinés ou exigus. Là le droit de retrait serait justifié.


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