Guyane : Forte contamination de la population au plomb et au mercure

Les résultats de l'enquête "Guyaplomb", menée de 2015 à 2017 font état d’une contamination nouvelle au plomb sur l’ensemble de la Guyane, notamment chez les enfants, et du maintien de l’intoxication au mercure dans les villages amérindiens.
Durant deux années (de 2015 à  2017), une équipe de scientifiques a mené une étude sur la contamination au plomb en Guyane. Baptisée "Guyaplomb", l'étude en question a été effectuée sur près de 600 jeunes Guyanais de moins de 6 ans.
Les résultats sont édifiants. On parle d'une contamination au plomb sur toute la Guyane et d'une intoxication au mercure, qui n'est pas récente, dans certains villages amérindiens. 

Toute la Guyane exposée au plomb

En 2011, les premières détections de plomb avaient été faites à Charvein, dans la commune de Saint-Laurent-du-Maroni, dans l'est de la Guyane. "Depuis Charvein, on avait peu de données sur le saturnisme à l’échelle guyanaise même si on suspectait une imprégnation élevée au-delà de cette zone géographique" a expliqué Audrey Andrieu de la cellule interrégionale d’épidémiologie (Cire).
Des inquiétudes qui se sont confirmées. 
Les cas de saturnisme sont "plus importants chez les garçons et les enfants sous CMU" (couverture maladie universelle) et "sur le littoral guyanais". Néanmoins, à Camopi et Trois-Sauts, villages amérindiens sur le fleuve Oyapock, frontalier avec le Brésil, les taux sont très élevés. A Camopi, 16 enfants sur 20 prélevés ont une plombémie supérieure à 50 µg/l.
La CIRE a précisé que les causes de cette intoxication étendue "sont encore en cours d'étude", mais de fortes suspicions pèsent sur une cause alimentaire.
Le saturnisme est une intoxication au plomb particulièrement nocive chez les jeunes et les conséquences sont terribles : effets neurologiques, rénaux et hématologiques.

Les Améridiens victimes du mercure

Une deuxième étude épidémiologique a confirmé une forte imprégnation des Améridiens au mercure, notamment vers le Haut-Maroni. "On suspectait une imprégnation élevée" au mercure en Guyane, a indiqué Audrey Andrieu. Au final, avec 22,8 µg/l (microgrammes de mercure par litre de sang) en Guyane, "la moyenne géométrique est plus élevée" que la moyenne nationale (15 µg/l), qu'en Guadeloupe (20,7 µg/l), ou en Martinique (19,8 µg/l), a-t-elle précisé.
Le seuil de déclaration obligatoire auprès des organismes médicaux est de 50 µg/l de sang.
Il y a 6 ans déjà, le taux d'imprégnation était élevé pour plus de la moitié de la population vivant dans cette région. Pour le docteur Rémy Pignoux, en charge de l'étude menée de 2012 à 2017, sur les 300 femmes enceintes et jeunes enfants suivis, "87 % des femmes présentent un risque au niveau foetal" pouvant engendrer des "malformations définitives" et "40 % des enfants" sont contaminés à plus de 5 µg/l.
Toutefois, de nombreuses femmes enceintes ont compris l'importance de ne pas consommer les poissons du fleuve, contaminés par le mercure utilisé pour l'orpaillage clandestin. 

Qu'est-ce que le saturnisme ?
Le saturnisme est une intoxication par le plomb particulièrement dangereuse pour la santé des enfants et des femmes enceintes.

Lorsque le plomb est respiré, avalé ou transmis à travers le placenta chez une femme enceinte, il passe dans le sang, est stocké dans l'organisme, en particulier dans les os, et met plusieurs années à s’éliminer.

La présence de plomb dans le corps est mesurée par le taux de plomb dans le sang ou plombémie.

Le plomb a toujours des effets toxiques sur l'organisme, même à faible dose, surtout au niveau du système nerveux, de la moelle osseuse et des reins.

Selon l’âge et la durée d’exposition, une intoxication par le plomb peut provoquer des troubles réversibles (anémie, troubles digestifs), mais aussi irréversibles (retard mental et/ou psychomoteur) lorsque le système nerveux est atteint.

Le saturnisme est essentiellement dû à la présence de peintures anciennes à base de plomb, dans les logements construits avant 1949, et à la présence de tuyauteries contenant du plomb. Les sites industriels émettant du plomb sont également source de contamination. (source Ameli)