Haïti : la transition bute sur des désaccords entre les futurs responsables

Des piétons marchent dans une rue vide de Port-au-Prince (Haïti). Le calme est relatif après les échanges de coups de feu du week-end - 25/03/2024.
Alors qu’en fin de semaine dernière la composition du Conseil présidentiel de transition d’Haïti était finalisée, des reculs ont été à déplorer, durant le week-end. La question qui cristallise les oppositions des forces politiques du pays : qui pour prendre la tête de ce Conseil ? Par ailleurs, cette gouvernance sera entièrement masculine, la seule femme en lice ayant renoncé ; sa famille a été menacée de mort

La transition en Haïti bute sur des désaccords entre les personnalités devant composer le futur organe dirigeant, a indiqué ce lundi (25 mars 2024) l'une d'elles à l'Agence France presse (AFP), deux semaines après l'annonce de la démission du premier ministre haïtien Ariel Henry.

Pour rappel, nommé quelques jours avant l'assassinat en 2021 du président Jovenel Moïse, Ariel Henry était très contesté. Son mandat a été marqué par une montée en puissance des gangs qui ravageaient déjà le pays et contrôlent aujourd'hui 80% de la capitale Port-au-Prince. Il a finalement accepté, le 11 mars dernier, de céder la place à un "conseil présidentiel de transition".

Petites avancées, reculs significatifs

Mais ce conseil, qui doit compter sept membres votants représentant les principales forces politiques en Haïti et le secteur privé, en plus de deux membres non votants, peine à voir le jour.
Pourtant, les formations politiques ont réussi à nommer chacune leur candidat, après des négociations et va-et-vient ardus. Mais, signe que la situation est mouvante, la liste a encore changé le week-end dernier.
Désormais, les représentants divergent sur la personnalité qui devrait être amenée à prendre la tête du conseil présidentiel, a affirmé à l'AFP l'un d'eux, sous couvert de l'anonymat.

Les personnalités se sont entretenues samedi, dimanche et lundi matin, par visioconférence et doivent se réunir avec la Communauté de la Caraïbe (Caricom), toujours à distance, dans l'après-midi, selon la même source. Cette réunion doit porter sur un accord politique, qui servira de document cadre pour l'installation du conseil présidentiel, a précisé ce représentant.
D'après lui, les réunions ont permis d'avancer sur plusieurs points, dont les critères pour devenir président du conseil et pour choisir un premier ministre par intérim.

Un Conseil exclusivement masculin

Durant le week-end, l'ambassadrice d'Haïti auprès de l'Unesco, Dominique Dupuy, sélectionnée pour représenter la coalition EDE/RED/Compromis historique, a annoncé qu'elle jetait l'éponge. La seule femme choisie pour faire partie du Conseil a évoqué des menaces de mort contre sa famille, ainsi que des attaques misogynes.
Elle a été remplacée par Smith Augustin, ancien ambassadeur d'Haïti en République dominicaine.

Après un week-end marqué par d'intenses échanges de coups de feu, un calme relatif régnait, ce lundi, à Port-au-Prince, où les activités avaient repris leur cours. Écoles et administrations publiques restent toutefois fermées.

Les Français évacués vers la Martinique

Les ressortissants français les plus vulnérables, qui ont souhaité quitter Haïti avec l'aide du gouvernement français, ont pu rejoindre un bâtiment de la marine nationale ; ils seront transportés "prochainement" à Fort-de-France, indique une source diplomatique, ce lundi.
Dimanche soir, le ministère français des Affaires étrangères avait annoncé la mise en place "de vols spéciaux" alors que la capitale d'Haïti est en proie à la violence et les liaisons aériennes commerciales avec Port-au-Prince sont interrompues.
Quelque 1.100 Français, dont un grand nombre de binationaux, vivent en Haïti, selon les chiffres du Quai d'Orsay.
Dimanche, celui-ci a précisé que l'ambassade de France à Port-au-Prince reste ouverte et poursuit son activité "malgré les conditions dégradées". "Elle demeure entièrement mobilisée en soutien à la communauté française sur place", avait souligné le ministère, qui a évacué son personnel non essentiel.