Haïti : plus de 5600 personnes tuées par la violence des gangs en 2024, selon l’ONU

Le corps d'un homme abattu repose dans une mare de sang dans le quartier de Pétion-Ville, à Port-au-Prince (Haïti) - 03/05/2024.
Il faut un engagement international, plus de moyens humains et financiers et des sanctions, pour qu’Haïti redevienne un Etat de droit. Le pays en est très loin, à l’heure actuelle. Les chiffres illustrant la violence des gangs font froid dans le dos. Les représailles sauvages des civils, aidés par une police corrompue, sont tout aussi condamnables. Le bilan 2024 dressé par l’ONU est sans appel.

Au moins 5601 personnes ont été tuées par la violence des gangs en Haïti, l'an dernier, soit 1000 de plus qu'en 2023, a indiqué le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme (HCDH), ce mardi 7 janvier 2025.

Ces chiffres ne peuvent à eux seuls rendre compte des horreurs absolues qui sont perpétrées en Haïti, mais ils montrent la violence incessante à laquelle les gens sont soumis.

Extrait du communiqué de Volker Türk, chef du HCDH.

En outre, 2212 personnes ont été blessées et 1494 enlevées, selon l'ONU.

Pays pauvre de la Caraïbe et parmi les plus démunis du monde, Haïti est confronté à la violence endémique de gangs armés et à l'instabilité politique, depuis des années.

Une MMAS impuissante

La violence de ces gangs, qui contrôlent 85% de la capitale, ne semble pas faiblir depuis l'arrivée, en juin dernier, de la Mission multinationale d'appui à la sécurité (MMAS), dépendante de l'ONU.
Menée par le Kenya, la mission, et ses quelque 400 policiers, fait face à un manque criant de moyens et n'a pas permis de diminuer les exactions des groupes armés, accusés de nombreux meurtres, viols, pillages et enlèvements contre rançon.
Des renforts viennent d’arriver sur place : des dizaines de soldats du Guatemala et du Salvador ont également été déployées début janvier pour soutenir la MMAS.

Des crimes odieux

Selon le Haut-Commissariat, lors de l'un des incidents les plus meurtriers de 2024, au moins 207 personnes ont été tuées, début décembre, lors d'un massacre orchestré par le chef du gang Wharf Jérémie, dans la capitale haïtienne Port-au-Prince.

Un grand nombre des victimes était des personnes âgées accusées d'avoir causé la mort du fils du chef par des pratiques vaudoues présumées. Pour effacer les preuves, les membres du gang ont mutilé et brûlé la plupart des corps, tandis que d'autres ont été jetés à la mer.

Extrait du communiqué de Volker Türk, chef du HCDH.

La même violence pour vengeance

Le HCDH a documenté, l'an dernier, 315 lynchages de membres de gangs et de personnes prétendument associées à des gangs ; des actes parfois facilités par des officiers de police haïtiens. Il y a eu, en outre, 281 cas d'exécutions sommaires présumées, impliquant des unités de police spécialisées.

Il est clair depuis longtemps que l'impunité (...) ainsi que la corruption, restent largement répandues en Haïti, constituant certains des principaux moteurs de la crise multidimensionnelle à laquelle le pays est confronté, aux côtés des inégalités économiques et sociales qui sont profondément enracinées.

Extrait du communiqué de Volker Türk, chef du HCDH.

Plus de moyens pour le rétablissement de l’état de droit

Volker Türk réclame "des efforts supplémentaires de la part des autorités, avec le soutien de la communauté internationale" pour s'attaquer à ces causes profondes. "Le rétablissement de l'état de droit doit être une priorité", a-t-il dit tout en appelant au soutien de la MMAS sur les plans logistique et financier.

Il demande aussi que les policiers qui auraient été impliqués dans des violations des droits humains rendent des comptes, avec l'aide de la communauté internationale.

Volker Türk réclame également que les sanctions imposées par le Conseil de sécurité de l'ONU et l'embargo sur les armes soient pleinement appliqués, et appelle les pays à ne pas renvoyer les Haïtiens sur leur île.