Nombreux sont ceux, en Guadeloupe, qui vivent dans des conditions très précaires.
En ce 17 octobre 2023, 30ème Journée mondiale du refus de la misère, nous sommes allés à la rencontre de quelques-uns qui peinent à joindre les deux bouts, voire même à s’assurer une vie décente.
Le quotidien difficile de Capesterriens
La misère est partout en Guadeloupe, souvent discrète, elle éclate parfois au grand jour, au détour d’une rue, d’un quartier, ou encore d’un foyer privé de tout.
L’exemple à Capesterre-Belle-Eau, où nous avons rencontré deux hommes concernés par cette problématique.
Maurice Pierre Francillette, ancien mécanicien de 71 ans, nous a dit toucher 30 euros par mois. Il nous a laissés rentrer chez lui, une maison située à la section Trou aux Chat que l’on pourrait croire abandonnée, vue de l’extérieur. C’est grâce à son voisin qu’il bénéficie d’un raccordement de fortune à l’eau et à l’électricité. Il souffre du dos et peine donc à se déplacer. Il se nourrit du peu qu’il peut se fournir, quand il parvient à trouver "un p’tit job". Ses enfants, parfois, lui emmènent aussi de quoi manger. Mais, en réalité, les visites de ses proches sont rares, trop rares de son point de vue. Il a perdu goût à la vie.
Son témoignage est poignant :
Si je meurs, ce sera mieux, au lieu de rester à souffrir. Personne ne vient me voir. Dans la situation dans laquelle je suis, c’est plutôt l’idée de la mort qui trotte dans ma tête.
Maurice Pierre Francillette, Capesterrien touché par la précarité
Jean-Claude Bikou habite, lui, à la section Cacador-Routhier. Il est originaire de Bouillante.
Aujourd’hui sans emploi, il est aussi diminué physiquement, après avoir été opéré de la jambe. Il doit subvenir aux besoins de son épouse, malade. Tous deux vivent dans une maison sans aucun confort, ni service essentiel : ils n’ont ni eau, ni électricité, des seaux remplacent les toilettes et la salle de bains. Le sol est semé de trous, les murs fragiles sont imbibés d’eau. C’est Jean-Claude qui s’occupe du ménage et de la cuisine. Dans la marmite, bien souvent, les fruits de leur jardin créole : fruits à pain, bananes et autres légumes pays. Ils ont aussi des bêtes, dans l’arrière-cour.
Mais ils ont une vie sans joie.
Ça me fait de la peine. Je pleure. Je m’assois, je réfléchis et l’eau coule de mes yeux. Je nourris les bêtes et je reste là. Je fais une petite marche, je fais un aller-retour sur le chemin, pour ne pas rester sur place, sinon je vais perdre la tête !
Jean-Claude Bikou, touché par la précarité
Plusieurs familles de la commune manquent de tout. Mais elles ne se font pas forcément connaître des services qui pourraient les soutenir, selon la directrice du Centre communal d’actions sociales (CCAS), qui ne demande qu’à leur venir en aide ; sans doute par pudeur...
Ils ont peur que l’on sache leur situation, ce qu’ils vivent vraiment. Ce n’est pas facile de dire qu’on est dans la misère. On a honte. Souvent, ces gens viennent, mais sont très réticents, ou bien ils ne viennent pas du tout. Nous sommes obligés quelques fois, après des signalements, d’aller vers ces personnes.
Maryse Fédéro, directrice du CCAS de Capesterre-Belle-Eau
Maryse Fédéro qui explique aussi que son service est régulièrement sollicité par des demandeurs de colis alimentaires. Dans notre archipel, des familles et, donc, des enfants aussi, n’ont parfois pas de quoi manger. Pour leur venir en aide, le CCAS compte notamment sur l’un de ses partenaires : la Banque Alimentaire.
Journée bien-être à la Maison Saint-Vincent
Dans le quartier d’Assainissement, à Pointe-à-Pitre, la Maison Saint-Vincent, Centre d’hébergement et de réinsertion sociale qui accueille notamment des personnes en situation de grande précarité et sans domicile fixe, proposait, ce mardi de 10h00 à 15h00, un évènement spécial, au profit des personnes démunies. Il y avait au programme une animation musicale, un repas festif et, pour valoriser les usagers, des ateliers coupes de cheveux et de massages. Un défilé de coiffure a été organisé ; une fresque de photos a aussi été réalisée.
Les bénéficiaires ont été partie prenante de l’organisation de ce moment convivial.
Cette année, ça fait aussi 30 ans que l’association existe (...). Il était important pour nous d’accompagner ces personnes, surtout un jour comme aujourd’hui. La misère change de visage, elle évolue. Nous avons plus de jeunes, beaucoup plus de personnes de grand âge et le secteur associatif doit pouvoir se mobiliser, pour pouvoir répondre à cette urgence.
Isabelle Rouin, directrice générale de la Maison Saint-Vincent
À noter que cette association, comme la Banque Alimentaire et d’autres structures qui œuvrent localement contre la pauvreté comptent sur la solidarité des Guadeloupéens ; des dons peuvent leur être adressés.