Entreprendre s’apparente, pour beaucoup, à un parcours du combattant. Pour les femmes, c’est encore plus compliqué.
Alors, pour favoriser l’entreprenariat au féminin, les acteurs de l’ADIE sillonnent en ce moment les quartiers, à bord d’un bus itinérant. Depuis le lundi 30 mai et jusqu’au 3 juin, cette « Association pour le droit à l'initiative économique » est mobilisée, dans le cadre d’une campagne de promotion de l’entrepreneuriat des femmes en Guadeloupe.
Les freins à l’entrepreneuriat au féminin
La disparité de genre persiste dans l’entrepreneuriat ; une femme sur cinq souffrirait de discrimination, au national.
Mais, dans l’archipel, c’est le constat inverse qui est fait. Localement, elles sont de plus en plus nombreuses à se lancer sur le chemin de la création d’entreprise ; six projets présentés sur dix ont été financées par l’association, en 2021.
Les jeunes femmes guadeloupéennes sont parmi les premières, au niveau de l’ADIE en tout cas, à entreprendre. C’est aussi le reflet de la société guadeloupéenne, avec quand même une place de la femme qui est forte et indépendante. Il existe aussi des cercles d’entraide aussi qui poussent ; on a de plus d’association qui se crée pour promouvoir l’entrepreneuriat au féminin. Il faut dire aussi que l’emploi salarié, en Guadeloupe, est très compliqué. Et la création d’entreprise arrive comme un palliatif.
Paul Vienot, directeur territorial de l'ADIE Guadeloupe et îles du Nord
Pour autant, de part et d’autre de l’Atlantique, les femmes font encore face à de nombreux freins, tant professionnels que personnels, dans leur progression de porteuses de projets.
Selon une étude de l’ADIE, 51% d’entre elles sont ralenties par des difficultés d’accès aux financements, mais aussi par le manque de temps, de confiance en soi, de soutien de leur entourage, ou encore par le sexisme.
Parmi les obstacles à franchir, les candidates à la création d’activité font également face à la charge familiale qui, bien souvent, leur est imposée.
Je ne m’exprime pas au nom des banques, mais je pense que, dans l’étude qui est faite de la situation, au niveau de l’entreprise, on va prendre en compte le fait que peut-être la personne va être amenée à être en congé maternité, ou autre. Et on sait que, dans une entreprise, si on n’est pas à 200% du temps disponible, c’est compliqué. Malheureusement, c’est le reflet de la société qui fait ça. Et c’est pour ça que l’ADIE est en lutte contre cet état de fait.
Paul Vienot, directeur territorial de l'ADIE Guadeloupe et îles du Nord
Au final, 15% d’entre elles abandonnent l’idée de se lancer, à cause d’une évolution de leur situation personnelle ; c’est presque deux fois plus que les hommes qui renoncent à leurs projets (8%).
Une voix s’élève pour exprimer un autre point de vue : celle de Dominique Virassamy, le président de l'association « Sauvons nos entreprises de Guadeloupe » (SNEG).
Il manque la partie cotisations sociales et c'est là le récif sur lequel se fracassent les jeunes chefs d'entreprise. A quoi sert la cotisation sociale? Comment et quoi payer? Comment décortiquer les différentes prestations ? Malheureusement, quand les créances arrivent, les jeunes indépendants renoncent à continuer, face aux sommes exorbitantes.
Dominique Virassamy, président du SNEG
Un bus itinérant dans l’archipel
Forts de ce constat, les acteurs de l’ADIE, dont l’engagement a permis le financement de 841 entreprises locales, en 2021, se mobilisent de nouveau, à travers divers ateliers gratuits. L’objectif est de de permettre aux femmes visées par cette action d’aller plus loin, de l’idée à la concrétisation de leur activité économique.
Cette campagne de promotion de l’entrepreneuriat au féminin est menée de manière originale : un bus itinérant sillonne les quartiers, pour promouvoir la parité à l’accès aux droits à l’initiative économique.
Pendant une semaine, toutes les équipes de Guadeloupe sont mobilisées, sur tout le territoire (on va essayer de couvrir toutes les communes de Guadeloupe), pour décomplexifier tout ce qui est création d’entreprise et, aussi, donner sa chance à toutes les porteuses de projet, de venir à notre rencontre et de pouvoir avoir les informations nécessaires, pour créer, ou développer leur projet d’entreprise.
Paul Vienot, directeur territorial de l'ADIE Guadeloupe et îles du Nord
A (re)voir le reportage de Patrice Gonfier et Olivier Duflo :
Pour s’inscrire, rendez-vous sur adie.org, rubrique « nos ateliers ».
Entretien avec Paul Vienot, directeur territorial de l'ADIE Guadeloupe et îles du Nord
Le cœur de métier de l’ADIE est le micro-crédit. L’association propose des financements jusqu’à 15.000 euros, sur 48 mois au maximum, principalement quand le système bancaire traditionnel ne peut intervenir. L’aide est délivrée au cas-par-cas, en fonction du profil, du projet et des moyens de chaque porteur de projet.
On est vraiment là pour amorcer des sujets, ou développer des projets qui n’ont pas encore accès aux crédits bancaires. On travaille en partenariat avec les banques, en fait. On emprunte de l’argent pour ensuite pouvoir le prêter aux personnes qui ne seraient pas solvables, en règles générales, c’est-à-dire qui perçoivent les minimas sociaux, qui n’ont pas de diplôme (...). Nous, on ne prend pas en compte les ressources.
Paul Vienot, directeur territorial de l'ADIE Guadeloupe et îles du Nord
A (ré)écouter la chronique radio « La Grande Interview », pilotée par Olivier Lancien et dont Paul Vienot était l’invité, ce mardi 31 mai 2022 :