Ce 19 novembre 2020 marque le 217e anniversaire d'une bataille décisive en Haïti, celle de Vertières, qui vit les troupes haïtiennes l'emporter sur celles du représentant de Napoléon, le Général Rochambeau. Hier, à Pointe-à-Pître, le CIPN a voulu rappeler cette page d'histoire aux Guadeloupéens.
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L'espace de la mémoire à la Darse de Pointe-à-Pitre s'est donc enrichi, ce mercredi, d'une nouvelle fresque historique. Cette fois, bien loin des rivages de notre archipel, c'est un fait de l'histoire d'Haïti que les associations organisatrices ont voulu porter à la connaissance des Guadeloupéens, ou, pour le moins, leur permettre de s'en souvenir.
Luc Reinette, CIPN
En l'occurrence, la bataille de Vertières, qui est pour Haïti, la fin d’une longue et sanglante guerre de libération.
Moins de deux mois après avoir écrasé l’armée française que Bonaparte avait envoyée rétablir l’esclavage, le 1er janvier 1804, Haïti devenait le premier État noir des temps modernes. A ce moment-là, l'histoire d'Haïti est étroitement liée à celle de la Guadeloupe. Car, c'est en apprenant la défaite des troupes guadeloupéennes en mai 1802, et le rétablissement de l'esclavage par Richepance et ses troupes, que le général Dessalines prend la tête des troupes haïtiennes pour les conduire jusqu'à la victoire décisive du 19 novembre 1803.
De fait, c’est un épisode qu'il faut s'empresser d'occulter de toutes les mémoires, un épisode qui amène les anciens esclaves de Saint-Domingue à proclamer l’indépendance de la colonie et qui est aussi le seul exemple d'une abolition de l'esclavage obtenue directement par d'anciens esclaves. On comprend que, dans ces conditions, la perte de Saint-Domingue soit un choc national refoulé. Un oubli qui passe sous silence le fait que ce ne sont pas moins de 70 000 hommes que Napoléon aura envoyés dans le seul but de rétablir le système esclavagiste à Saint-Domingue. 55 000 d’entre eux y ont perdu la vie, victimes des anciens esclaves ou des fièvres. L'évènement n'entrera pas dans les livres d'histoire de la France.
Les Guadeloupéens devront attendre 44 ans de plus pour voir les fers de la servitude tomber définitivement. 44 années durant lesquelles la mentalité de la société créole évolue et où ses valeurs changent. On lui apprendra à exécrer les vicissitudes de l'indépendance haïtienne sans lui trouver aucun mérite. Une mentalité qui est même à l'origine de la mise à l'écart des derniers esclaves débarqués devant les rivages de Capesterre Belle Eau et qui les fera se regrouper sur les hauteurs de Moravie pour assurer eux-mêmes leur survivance.
Longtemps plus tard, les stigmates de cet ostracisme face aux Haïtiens sont encore bien présents dans la société guadeloupéenne. Un Haïtien est d'abord un "homme à tout-faire" que certains n'hésitent pas à exploiter. D'ailleurs, cette même semaine où le CIPN met en relief par une fresque à Pointe-à-Pître ce fait de l'histoire d'Haïti, avait commencé par le relogement à Petit Bourg de plusieurs membres de la communauté haïtienne qui vivaient dans des conditions précaires et néanmoins coûteuses. Une situation encore très courante pour les Haïtiens en Guadeloupe. Un paradoxe dont les Haïtiens ont toujours été conscients (Voir ci-dessous : Nan danjé" de Ti Manno) et que des actes tels que celui vécu à la Darse de Pointe-à-Pître ce mercredi, tentent de combattre aujourd'hui. Pour que la mémoire puisse redonner à Haïti la place qui doit être la sienne dans l'Histoire universelle, et singulièrement, dans l'histoire de la Guadeloupe.
Luc Reinette, CIPN
En l'occurrence, la bataille de Vertières, qui est pour Haïti, la fin d’une longue et sanglante guerre de libération.
Moins de deux mois après avoir écrasé l’armée française que Bonaparte avait envoyée rétablir l’esclavage, le 1er janvier 1804, Haïti devenait le premier État noir des temps modernes. A ce moment-là, l'histoire d'Haïti est étroitement liée à celle de la Guadeloupe. Car, c'est en apprenant la défaite des troupes guadeloupéennes en mai 1802, et le rétablissement de l'esclavage par Richepance et ses troupes, que le général Dessalines prend la tête des troupes haïtiennes pour les conduire jusqu'à la victoire décisive du 19 novembre 1803.
La France amnésique sur cette victoire haïtienne
Mais la bataille de Vertières et l'indépendance d'Haïti qui en découle sera plongée dans l'oubli par la France et les Français.De fait, c’est un épisode qu'il faut s'empresser d'occulter de toutes les mémoires, un épisode qui amène les anciens esclaves de Saint-Domingue à proclamer l’indépendance de la colonie et qui est aussi le seul exemple d'une abolition de l'esclavage obtenue directement par d'anciens esclaves. On comprend que, dans ces conditions, la perte de Saint-Domingue soit un choc national refoulé. Un oubli qui passe sous silence le fait que ce ne sont pas moins de 70 000 hommes que Napoléon aura envoyés dans le seul but de rétablir le système esclavagiste à Saint-Domingue. 55 000 d’entre eux y ont perdu la vie, victimes des anciens esclaves ou des fièvres. L'évènement n'entrera pas dans les livres d'histoire de la France.
Le paradoxe guadeloupéen
Occulté des mémoires françaises, il le sera aussi dans les mémoires guadeloupéennes. Et pour cause... Après la défaite de Delgrès, Ignace et les autres, l'esclavage a été rétabli en Guadeloupe. Ce n'est donc pas le moment de promouvoir l'exemple haïtien.Les Guadeloupéens devront attendre 44 ans de plus pour voir les fers de la servitude tomber définitivement. 44 années durant lesquelles la mentalité de la société créole évolue et où ses valeurs changent. On lui apprendra à exécrer les vicissitudes de l'indépendance haïtienne sans lui trouver aucun mérite. Une mentalité qui est même à l'origine de la mise à l'écart des derniers esclaves débarqués devant les rivages de Capesterre Belle Eau et qui les fera se regrouper sur les hauteurs de Moravie pour assurer eux-mêmes leur survivance.
Longtemps plus tard, les stigmates de cet ostracisme face aux Haïtiens sont encore bien présents dans la société guadeloupéenne. Un Haïtien est d'abord un "homme à tout-faire" que certains n'hésitent pas à exploiter. D'ailleurs, cette même semaine où le CIPN met en relief par une fresque à Pointe-à-Pître ce fait de l'histoire d'Haïti, avait commencé par le relogement à Petit Bourg de plusieurs membres de la communauté haïtienne qui vivaient dans des conditions précaires et néanmoins coûteuses. Une situation encore très courante pour les Haïtiens en Guadeloupe. Un paradoxe dont les Haïtiens ont toujours été conscients (Voir ci-dessous : Nan danjé" de Ti Manno) et que des actes tels que celui vécu à la Darse de Pointe-à-Pître ce mercredi, tentent de combattre aujourd'hui. Pour que la mémoire puisse redonner à Haïti la place qui doit être la sienne dans l'Histoire universelle, et singulièrement, dans l'histoire de la Guadeloupe.